27] Désobéissance

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Mardi se déroule aussi péniblement que lundi.
Antigone n'a l'esprit happé que par Césaré, et plus rien d'autre ne compte. Elle a toute la journée la tête obnubilée par cet homme, et ne pense plus ni à ses cours, ni à ses amis, ni à rien d'autre. Elle veut le revoir, elle veut le sentir de nouveau, et cette fois complètement. Elle supporte avec de plus en plus de mal ce jeu qu'il lui inflige, de lui donner à chaque fois un peu, mais jamais autant qu'elle voudrait. C'est littéralement une torture pour la jeune femme.

Ses cours n'en finissent pas et malgré tous ses efforts elle ne parvient pas, même une seconde, de concentrer son cerveau sur autre chose que son Maître. Son Maître! Son Maître!

En plein milieu de l'après midi elle décide de rentrer chez elle, comprenant qu'il est inutile de continuer la poursuite de ses cours dans cet état. Elle marche à vive allure dans les ruelles parisiennes jusqu'à atteindre sa voiture. Elle monte, jette son sac sur le siège passager, met le contact et pose ses mains sur le volant. Mais elle ne fait rien. Elle regarde droit devant elle, hésitante.
Elle veut le voir. Elle veut aller chez lui. Maintenant. Et elle veut qu'il la prenne. Fermement. Tant pis pour les punitions, tant pis pour les représailles. Elle est prête à tout affronter pour le sentir en elle. Maintenant.

Alors elle démarre et au lieu de retourner chez elle, elle se dirige vers l'appartement de Césaré, tremblante d'adrénaline et de pulsions bestiales.

Au bout de vingt minutes elle arrive et se gare en bas de chez lui. Mais elle ne sort pas immédiatement. Elle hésite encore. Se dit qu'il est encore temps de changer d'avis, encore temps de retourner chez elle. S'il la fait patienter de la sorte c'est qu'il a ses raisons, et en tant que sa soumise elle n'a pas à aller en travers des décisions de son Maître.
Seulement voilà... le désir qu'elle éprouve envers lui est bien plus ardent que sa vocation de soumise exemplaire.

Alors elle sort, claqué la portière, monte sur le trottoir, tape le code qu'elle connaît par cœur et entre dans le hall. Elle va dans l'ascenseur, appuie sur le bouton du dernier étage et se regarde dans la glace. Ses joues sont empourprées et elle ne peut empêcher ses mains de trembler.

« La soumise s'interdit de contester ou de contrarier les ordres de son Maître »

Les lignes du contrat résonnent dans sa tête. Qu'est-elle en train de faire? Et si... et si elle était en train de tout gâcher?!
Et d'ailleurs... qui dit qu'il est chez lui à cette heure? S'il s'avère qu'il est absent elle attendra son retour. Ou alors elle partira. Elle ne sait pas. Elle ne sait plus. Ses idées sont confuses et plus l'ascenseur se rapproche du duplex, plus son cerveau bouillonne.

Finalement les portes métalliques s'ouvrent elle se retourne en face de celle de Césaré. Il est le seul à vivre à cet étage. Il n'y a donc qu'une seule et unique entrée.

Elle s'approche, serrant son sac contre sa poitrine et s'apprête à frapper mais quelque chose la retient. Elle n'y arrive. Peut-être lui claquera-t-il la porte au nez.
Elle respire longuement et finit par prendre une décision.

Il lui ai déjà arrivé d'oublier ses clefs chez elle et elle avait réussi à ouvrir sa porte avec sa carte de crédit. Cela peut marcher. A la condition qu'elle ne soit pas fermée à double tour et qu'il n'y ai pas les clefs dans la serrure.

Si la porte est fermée à double tour cela signifie qu'il n'est simplement pas là et elle partira.
S'il a laissé les clefs dans la serrure elle prendra ça comme un signe et partira également.

Mais si elle réussit à ouvrir alors elle se dit que d'arriver sans faire de bruit peut être une sorte de « surprise » et que par conséquent il ne lui en tiendra pas rigueur. Du moins elle l'espère. Car en réalité peut être sera t'il plus furieux que jamais qu'elle ait pénétrée chez lui sans son accord...

Elle ouvre son sac, sort son portefeuille et prend sa carte bleue avant de l'introduire dans la fente.
Elle force un peu, priant au fond inconsciemment pour que la porte ne s'ouvre pas et qu'elle reparte chez elle, loin de cette idée stupide.
Mais soudain un déclic.
Elle a réussi... Elle n'en revient pas elle même.

Elle pousse doucement la porte, et jette un œil à l'intérieur. Personne ici.
Elle entre et referme derrière elle sans faire le moindre bruit.
Elle avance au hasard et se met à l'affût du moindre bruit. Il doit sûrement travailler dans son bureau. C'est le plus probable.

Elle se dirige vers ce dernier mais avant qu'elle ne pose sa main sur la poignée un bruit provenant d'une autre pièce la fait sursauter. Quelque chose vient de claquer violemment.

Elle avance, se laissant guider par un deuxième claquement presque identique. A croire qu'il s'entraîne contre un meuble à manier le fouet. Elle pourrait bien arriver au moment le plus opportun. Il se vengerait alors sur ses fesses, et elle n'en serait que plus excitée.

La porte n'est pas fermée, juste poussée. Elle pose sa main et l'ouvre le plus délicatement qu'elle le peut, frétillante d'impatience de le revoir.

Et là, elle découvre Césaré. Comme elle l'imaginait: torse nu, luisant de sueur, les muscles saillants et un jean noir lui tombant sur les hanches. Dans sa main droite non pas un fouet, mais un martinet aux lanières de cuir. Tout est parfait, comme elle le pensait et le fantasmait. À une seule exception.

Non, ce n'est pas sûr un meuble que son Dominant est en train de s'entraîner. Non ce n'est pas sûr un objet inanimé... mais sur un être humain. Sur une femme. Nue. Suspendue la tête en bas par des cordes qui enserrent chacun de ses membres et cambrent son corps d'une manière visiblement insupportablement douloureuse. Ses cheveux sont attirés par la gravité et touchent presque le sol. L'intégralité de son visage est recouvert d'une cagoule en cuir noir qui adhère à la perfection à la forme des contours de son visage. Il n'y a comme seule ouverture, un petit trou au niveau de sa bouche qui lui permet de respirer.
Sa chair est lacérée par les cordages, sa peau est tirée et soit trop blanche, soit trop rouge. Ses seins sont enlacés par la corde. Mais malgré tout ça. Malgré la douleur inimaginable qu'elle doit vivre elle ne fait pas un bruit. Elle respire calmement. Elle attend chaque nouveau coup avec sérénité. Elle sait ce qu'elle est en train de vivre et elle s'en délecte, cela se sent.

Antigone est paralysée. Elle voudrait fuir. Elle voudrait hurler. Mais elle ne peut pas. Ses jambes refusent de bouger et sa langue est inerte.
Elle ne peut que regarder ce spectacle infernal qui s'offre à elle... et dont, elle le sait, elle n'oubliera jamais l'ampleur.
À cet instant précis, elle ne le réalise pas encore, mais son cœur vient d'exploser en mille morceaux dans sa poitrine.

Antigone Où les histoires vivent. Découvrez maintenant