Partie 2 REELLE - Ch.13 Derrière la lucarne (1)

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Celle-ci ? Non ! ? Ca ?

Seigneur, je ne sais pas quoi mettre. Pour le dessus, facile, j'aime bien le jaune et j'ai une blouse un peu ample et à courtes manches couleur canari dans laquelle je me sens toujours bien. Mais alors, le bas ! J'ai essayé la jupe en jean, trop raide, c'est aussi beau qu'un tube géant. Une autre à fleurs était trop affriolante. C'est censé être ce que je préfère. Je suis plus friande des jupes que des pantalons, qui me font des fesses encore plus larges qu'à l'origine. Mais alors... laquelle a ma préférence ? Je dirais la noire qui tombe aux genoux. Et qui est stretch. Simple, amincissante, confortable. Voilà, c'est bon ! Il n'est pas trop tard, je file. Même s'il est bizarre et même si je suis morte de trouille, je déteste être en retard.

Plus j'avance, plus j'affermis mes pas : ce sera ma tactique, ce soir. Il ne faudra pas flancher. Le salaud doit être aux anges, j'espère au moins qu'il a prévu un repas sympa et surtout sans chandelle. J'aimerais bien donner tort à Nora. Me dire qu'il est moins mauvais que ses procédés ne le laissent paraitre, que je pourrais l'influencer au lieu de le faire chanter en tombant aussi bas que lui. Ça m'embêterait d'avoir à en venir à cela pour qu'il me fiche la paix. Mon cœur bat la chamade, tandis que j'appuie sur la sonnette. Son « ouiii ? » me parait étudié pour être aussi voluptueux qu'agaçant.

—Bonsoir ! On a déjà passé le cap des présentations, il me semble ?

—Bien sûr, entrez, miss Caty. Troisième étage, juste devant l'ascenseur.

Je déglutis, avant de reprendre contenance. Je vais veiller à ce qu'il tienne parole jusqu'à sa dernière phalange. Lorsqu'il m'ouvre, j'étire un sourire crispé. OK niveau détente, je suis nulle, je ne sais pas mentir. Lui étire le sien jusqu'aux oreilles, mais quand il tend la main pour prendre mon manteau, il freine bien son geste à distance et m'adresse un regard qui signifie « je peux ? ».
—Bienvenue dans ma tanière ! Rassure-toi, je suis un célibataire propre. Pas comme les étudiants que j'ai en guise de voisins.

J'observe toute la pièce de vie sur laquelle on déboule et qui, au fond, donne directement sur la Grand Place. Il y a là une grande table, trois portes à droite, aucune à gauche, un canapé face à un meuble télé, quelques armoires de rangements le long des murs, un bureau entre les deux portes du fond, et un coin cuisine délimité par un mur de briques qui permet une ouverture sur tout le séjour. Je fais deux pas, mais sans me démonter, je pivote vers lui et lui adresse une expression pleine de soupçons.

—Quel est le mot de passe ? raillé-je.

Ses sourcils se froncent et, une fois de plus, je ne parviens pas à me détacher de son regard. Mais je feins d'agir par insistance, pendant qu'il réfléchit en silence.

—Hmm euh... Supermarché ? J'ai bon ?

Il ose un petit sourire, qu'il ravale aussitôt, visiblement embarrassé. J'ai remarqué que, quand il se sent mal à l'aise, Mike a tendance à se gratter la nuque et dévier son regard. Je croise les bras, histoire de l'enfoncer dans sa gêne, pour qu'il me sorte enfin des semblants d'explications.

—Je... Écoute, c'est... Je sais ce que tu crois, mais vraiment, je ne te suivais pas, je faisais juste mes courses et... enfin, on n'habite pas loin et y a pas trente-six supermarchés dans le piétonnier.

Il ricane, puis se racle la gorge. OK. C'est tout ? Je n'aurai droit qu'à ça ? Je décide de ne pas répondre. Provoquer mon mutisme fera clairement passer le message de mon insatisfaction. Bingo ! Il rouvre sa jolie bouche.

—J'ai vu que je t'avais fait peur et je m'en suis... trop voulu pour t'approcher. J'ai préféré m'en aller.

Son ton plus grave ne me fait pas douter de sa sincérité. La tristesse envahit son visage, alors je soupire :

—Va pour la lâcheté. On tourne la page.

Je traverse les lieux, jusqu'à la loggia qui éclaire toute la pièce. Elle donne sur le cinéma, mais un sofa est tourné vers les cafés et c'est sans surprise que je découvre l'appareil posé sur un pied. J'étais bien trop curieuse de découvrir le lieu du crime. Voilà donc où s'installe Mike. Je constate dans le focus sa belle vue sur mon balcon.

—C'est donc d'ici que tu m'espionnes. Je comprends mieux la précision de mes faits et gestes à l'intérieur.

Mes doigts se posent autour de l'appareil que j'allume.

—Que fais-tu ?

—Je veux savoir jusqu'où tu peux m'observer d'ici, grogné-je.

—Assez pour voir un sein nu, me glisse-t-il à l'oreille, mais pas assez pour savoir s'il pointe à la sortie de ta douche.

Saisie, je me redresse en lui envoyant un regard noir. Il a traversé la pièce en douce pendant que je me concentrais sur l'appareil ! Il lève des mains innocentes, pile derrière moi. Son sourire de gredin me donne envie de...

—Ça n'est arrivé qu'une fois, j'avais rien planifié. Je te charrie.

SBAF ! Ma main est partie toute seule sur sa joue, parce que bon sang, il dépasse les bornes ! Tandis qu'il masse sa peau rougie, surpris, je bombe la poitrine.

—Heureusement que moi, j'ai le droit de te toucher, parce que tu l'as mérité, petit voyeur !

Mon regard sur toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant