54 Un véritable ami

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- Allô !

Mon cœur se met à battre à vive allure tant que je suis heureuse d'entendre sa voix. S'il ne m'avait pas répondu, je ne sais pas ce que j'aurai fait.

- Seb, je... Je... Faut que...

Je n'arrive pas à trouver mes mots et les larmes me secouent si violemment que faire une phrase est un exercice impossible. Au fond du trou et complètement désemparée, je ne sais pas par où commencer.

- Calme-toi Adri. C'est quoi le souci ?

- Je... C'est que... Je...

- Écoute-moi. Respire en même temps que moi. Inspire profondément puis expire. Voilà c'est bien. Recommence. Tu vas voir ça ira mieux.

Sans réfléchir, je m'exécute dans l'espoir de parvenir à me calmer rapidement. Sa voix douce et chaleureuse m'apaise autant que ses conseils qui s'avèrent efficaces.

- C'est ça. Concentre-toi sur ma voix. Je suis là pour toi Adri. Arrête de paniquer. Dis-moi simplement ce qui t'arrives. Quoi que ce soit, je serai là pour toi.

Ses mots me rassurent. Ils sont ce dont j'avais besoin. En l'espace de quelques secondes, je retrouve le contrôle de mon corps et de toutes mes émotions.

- On a eu une engueulade avec William et... Il... Il est parti. Je... Je sais pas quoi faire, dis-je d'une voix brisée.

- T'es où ?

- Las Vegas.

- Je peux être là dans quatre heures. T'es dans quel hôtel ?

Cette simple question me fait angoisser à nouveau car elle me rappelle que je n'ai aucun endroit où me réfugier. J'ai envie de pleurer, mais je me retiens.

- Adri ?

La voix de Seb est pleine d'inquiétude. Mon silence l'effraie et je m'en veux de l'embêter avec mes histoires. Malheureusement, je n'avais pas vraiment d'autres solutions.

- On m'a piqué mon sac. Je peux rien payer et je suis à l'aéroport.

- A l'aéroport ?

Je saisis au ton de sa voix qu'il ne comprend pas vraiment ce qu'il m'arrive. Toutefois, il prend soin de ne pas me poser plus de question. Il a bien compris que la situation était complexe et que j'avais déjà suffisamment de mal à la gérer.

- T'inquiètes, je t'envoie un uber. Il t'emmènera au Caesars Palace. Je réserve une chambre à ton nom et je te retrouve là-bas.

- Merci.

Mon cœur est lourd, mais grâce à Seb je me sens un peu mieux. Ma situation est moins effrayante et catastrophique qu'il y a quelques minutes. Je n'ai maintenant plus qu'une seule hâte : m'enfermer dans ma chambre d'hôtel pour pouvoir laisser mes larmes me submerger. Le manque me torture toujours, mais je n'ai pas le temps de m'en inquiéter. Je gérerai ce problème plus tard.
D'un pas lent, je sors de l'aéroport. Les gens que je croise me dévisagent. Je n'ai jamais dû ressembler autant à une toxico en manque. Sans parler de mon maquillage qui a probablement coulé sur tout mon visage. Ils doivent se demander comment j'ai fait pour en arriver là. Alors que j'attends mon taxi, j'observe la vie qui se déroule autour de moi. Les personnes qui sortent de l'aéroport ont toutes le sourire aux lèvres. Elles sont excitées à l'idée de vivre leur séjour dans cette ville si singulière. Je me souviens alors de mon arrivée ici. J'étais heureuse et amoureuse. Je n'arrive pas à réaliser que j'ai tout perdu en si peu de temps.

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Quand j'ouvre la porte de ma chambre, j'éprouve un profond soulagement. Mon premier réflexe est de me jeter sur le lit et d'engouffrer ma tête dans un des multiples oreillers à ma disposition. Je repense alors, sans même le vouloir, aux paroles de William et à son regard empli de haine. Ces images me brisent le cœur, mais elles me font surtout réaliser que j'ai détruit ce qu'il y avait de plus beau dans ma vie. J'ai toujours entendu dire qu'on ne réalisait pas la chance qu'on avait d'avoir quelque chose avant de la perdre. Je me suis toujours dit que c'était idiot. Néanmoins, je réalise à ce moment précis à quel point c'est vrai. J'aime William et je serai prête à donner tout ce que j'ai pour revenir en arrière. Si tout était à refaire, je ne ferai pas les mêmes choix idiots. J'aurais dû être honnête avec lui et lui faire confiance, mais j'avais trop peur de le décevoir et donc de le perdre.
C'est terminé. Tu entends. C'est fini entre nous, jamais je pourrai te pardonner ton attitude. Ces paroles tournent en boucle dans mon esprit. Je n'arrive pas à y croire. Je refuse d'y croire. Si je repousse cette réalité de toutes mes forces peut-être que je pourrai l'empêcher d'exister. C'est idiot, mais j'ai envie d'y croire. Notre amour est si fort, il ne peut pas s'éteindre comme cela. Nous étions si heureux.
Soudainement, tous nos bons souvenirs envahissent ma mémoire. Chaque image de nous en train de rire, de nous chamailler et de nous embrasser est une torture encore plus douloureuse que le manque. L'esprit est pervers et il me fait repenser aux belles choses que nous nous sommes dites, aux projets que nous avions. J'ai l'impression que je ne m'en remettrai jamais. Je suis brisée et les pleurs me gagnent à nouveau.
Je le revois me regarder avec le sourire aux lèvres quand je portais Noham dans mes bras. Je le revois me dire qu'il voulait m'épouser. Tout cela n'est plus. Tout cela n'existe plus que dans ma mémoire. Ce ne sont que des souvenirs comme de la poussière sur un meuble qui s'envolera au premier courant d'air pour disparaître à jamais.
Des questions emplissent alors mon esprit. A-t-il arrêté de m'aimer ? Puis-je le retrouver ? Et si je lui expliquai tout, me pardonnerait-il ? L'espoir qui se dégage de ses questions est encore plus douloureux que mon cœur brisé.

- T'es là, Adri ?

La voix de Seb me sort de mes pensées. Quand il apparaît dans l'encadrement de la porte, les sanglots me secouent à nouveau. Sans un mot, il me rejoint dans le lit et me prend dans ses bras. Il ne me pose aucune question ce que j'apprécie car je n'aurai pas la force de lui répondre. Nous restons dans les bras l'un de l'autre pendant de longues minutes. Mon âme tourmentée retrouve un peu d'apaisement. 

- Tu veux qu'on en parle ? Finit-il par demander alors qu'il caresse lentement mes bras.

- Non. Je... T'as des comprimés sur toi ?

J'ai honte de ma question, mais le manque est trop fort. Je ne peux pas me battre contre mon addiction et mon cœur brisé en même temps. Je n'ai pas assez d'énergie pour cela. J'ai même l'impression que je vais mourir ensevelie sous tous mes problèmes si je n'ai pas un peu d'aide.

- Oui. Mais je suis pas sûr que ça soit une bonne idée.

A ma plus grande surprise, son ton est neutre. Il n'y a ni blâme ni jugement dans ses paroles. 

- J'en veux juste un, dis-je en le suppliant. Juste un dernier. J'en peux plus. J'ai mal de partout.

Il sort alors du lit et fouille dans sa veste avant de me tendre un sachet d'amphétamines. C'est exactement le même que celui que je lui avais volé.

- J'ai pas envie de me battre avec toi maintenant, mais je te préviens. Je t'en donne un seul et demain tu te reprends. Je vais pas te laisser te tuer de cette manière, ajoute-t-il en me tendant ma dose.

Immédiatement, je me jette dessus et l'avale. L'effet est rapide et les douleurs s'estompent peu à peu.

- T'en prends pas ? Je demande pour essayer de dissiper le silence pesant qui règne dans la chambre.

- Je suis clean depuis trois ans. Je prends plus rien et j'ai aucune intention de replonger.

Je ne peux pas retenir un petit rire de surprise.

- Pourquoi t'en as toujours avec toi alors ? 

- C'est con, mais ça me rassure. Je me dis que si jamais j'en ai besoin j'en aurai, même si je n'ai aucune intention d'en prendre.

Il n'a pas besoin de m'en dire plus car je sais exactement ce qu'il ressent. Moi aussi je suis passée par là. Pendant longtemps, j'ai eu le même réflexe pour me rassurer. Le jour où j'ai arrêté de le faire, j'ai même cru que j'étais définitivement sortie d'affaire. Tout ça me semble terriblement lointain.

- Pourquoi t'as mis du GHB dans ma bière ?

Je n'ai pas pu retenir cette question qui me brûlait les lèvres. Même s'il est venu à ma rescousse, je n'oublie pas que c'est à cause de lui que je me suis retrouvée dans cette situation.

- Adri, je t'ai déjà dit que c'était pas moi. Je connais les désastres de la drogue et je sais à quel point c'est dur de s'en sortir. Jamais je ferai un truc pareil.

- J'ai trouvé du GHB dans ta sacoche. Ça aussi tu vas le nier ?

Seb me regarde avec surprise avant de rire.

- J'ai jamais pris de GHB et j'en ai jamais eu avec moi. T'as dû te tromper de sacoche !

La sincérité dont est empreinte sa voix me surprend. Face à ma stupeur, il s'assied à mes côtés et semble réfléchir à toute cette histoire.

- Adri je suis sérieux ! T'en as vraiment trouvé ?

- Oui. Enfin non, j'étais en crise de manque. C'est Tina qui a fouillé et qui l'a trouvé.

- Tina ? Putain, j'y crois pas. Cette fille est une véritable salope. 

En colère, il se lève soudainement avant de mettre un violent coup de poing dans la porte de la chambre. Je sursaute, mais le coup semble l'avoir calmé. Il se rassoit à mes côtés avant de prendre mes mains dans les siennes. Son poing est rougi à cause de la puissance de son coup.

- Je parie que c'est elle qui l'a mis dedans.

- Quoi !? Pourquoi ?

- Je crois que c'est assez évident. Elle voulait faire de moi le coupable idéal. Je crois qu'il va falloir que tu me racontes tout depuis le début.

Dans son univers - DJ SNAKEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant