Rita [TERMINÉ]

• CHAPITRE SOIXANTE •

— Maman... Maman ? Maman ?!

J'entends ses pas se précipiter dans les escaliers, envisageant une catastrophe.

C'est pourtant tout l'inverse.

Elle ouvre la porte, affolée, tandis que mon corps, sujet à tant de frustration, se libère enfin.

Mon regard perdu trouve le sien et je laisse mes lèvres faire le travail :

— J'ai réussi. J'ai réussi, maman !

Elle fronce d'abord les sourcils, désemparée, puis, désirant partager mon bonheur, sourit.

— Qu'est ce que tu as réussi, ma chéri ?

A la porte des toilettes, ma pauvre mère doit s'interroger sur ma santé mentale.

Ce qu'elle ignore jusqu'à présent, c'est que cet événement signe la plus grande avancée de mon état psychologique.

— J'essaie tous les mois. Je n'y crois jamais alors, comme d'habitude j'ai retenté sans grande conviction et... et, je ne sais pas, j'ai senti que cette fois-ci, c'était différent. J'ai eu un peu mal mais j'ai réussi !

Elle secoue la tête, tantôt heureuse, tantôt confuse.

Puis, soudainement, elle semble avoir saisi mon discours tout à fait maladroit.

— Tu as réussi à mettre un tampon ?

Cette phrase, sortie de sa bouche, sonne tellement étrange que mes lèvres tremblent légèrement et rapidement, nous explosons de rire.

Bientôt, des larmes de joie inaugurent la fin de ce calvaire et la femme devant moi semble ressentir autant, si ce n'est plus, cette délivrance.

Elle me prend dans ses bras et me serre si fort que j'en perds mon souffle.

Je lui rends aussitôt son étreinte et laisse mes larmes s'agglutiner à la chair de son cou.

— Tu t'es lavée les mains, n'est-ce pas ? me chuchote-t-elle à l'oreille.

Je ne réponds pas alors elle se détache de moi en haussant les sourcils, un peu inquiète.

Puis je souris :

— Oui, maman.

***

Plusieurs semaines se sont écoulées depuis ma victoire - c'est ainsi que je l'ai nommé - et j'ai le sentiment que cette lettre y est pour beaucoup.

Je ne sais pas. C'est une sensation inexplicable. C'est la première fois que je me livre entièrement. Il n'est question que d'une feuille de papier mais, entre les mains d'Aaron, c'est différent.

Je lui ai enfin donné, en main propre, avec la certitude que lorsqu'il la lirait, ce serait les mots d'une battante qui noirciraient ces lignes parce que je ne suis plus terrifiée à l'idée de partager cet instant de ma vie.

Je me sens plus en paix avec mon corps. Je ne saurais dire si je lui ai pardonné mais, manifestement, c'est sur la bonne voie.

En parlant de réconciliation, Marine a répondu à mon message, il y a plusieurs jours. Comme quoi, mieux vaut ne pas baisser les bras.

Nous avons décidé de recommencer sur de bonnes bases et, même si je n'approuve décidément pas sa relation avec Matt, je la respecte.

Si elle l'aime, si elle est heureuse avec lui, alors je suis de tout cœur avec eux...

D'accord, peut être pas totalement mais je me dois de me mêler de mes affaires. Au moins pour elle.

Ils ont enfin emménagé dans leur nouvel appartement et, même si cet événement me paraît précipité, je n'ai pas mon mot à dire. C'est sa vie et ce sont ses choix.