27 Mars 1978
La lumière filtrait à travers les rideaux de la chambre. Ça devait être l'après-midi alors que Freddie venait à peine d'ouvrir les yeux. Tout était calme, seuls les passants entrecoupaient la respiration régulière de Paul qui dormait toujours profondément. Habituellement, il le laissait dormir et commençait sa journée de son côté.
Mais cette fois, il ne se leva pas. Il ne voulait plus descendre prendre son petit-déjeuner seul, s'habiller seul, écouter la radio seul, s'occuper de ses chats seul. Il n'en pouvait plus d'être seul. Freddie n'avait jamais senti tant de solitude.
Désormais, il portait du cuir et avait officiellement "rompu" de son inexistante relation avec Mary Austin dans le cadre d'une interview, le libérant de tout ce qu'il restait de l'emprise que Roger avait encore sur lui. Il s'était laissé guider par tous ceux qui lui hurlaient liberté, et maintenant il était en plein dedans : plus de censure, plus de restriction, plus de limite.
Mais le chanteur n'avait vu que le dessus de l'iceberg qu'était la liberté. À présent, il comprenait que cela signifiait aussi être seul. Seul face aux obstacles dont il venait d'écarter tous les éléments qui auraient pu l'aider à y faire face. Finalement, il se demandait si l'emprise de Roger et toutes les sécurités dont il l'avait entouré ne lui manquaient pas.
Freddie commençait à sentir les imperceptibles doigts de la solitude se resserrer subrepticement autour de sa gorge pour le garder auprès d'elle dans une éternité qui le conduirait droit en enfer. Il réfléchit un peu plus longuement à là où la solitude le mènerait. Il réfléchit jusqu'à ce qu'il retrouve les pensées noires qu'il croyait avoir semées de justesse en se tournant vers la liberté. Au fond, la solitude n'était qu'une vieille amie de la Faucheuse dont l'existence avait pour seul but de lui faciliter les choses.
Farrokh ne voulait pas se lever pour ne pas avoir à l'affronter, mais bien que son emprise manquait de force, ça n'avait suffit à empêcher la solitude de le retrouver. Elle commençait à l'étouffer, même avec Paul dormant à ses côtés, et pour seule défense, son cerveau lui ressortait le vieux mot magique dont il avait déjà usé à l'abus. Ce mot, c'était cocaïne. Le pianiste avait laissé de côté les faux-semblants et les espoirs dérisoires : plus de "Je serai fort" ni de "Je reste sobre ce soir". Liberté, aucune limite, tous les excès lui étaient à présent servis sur un plateau d'argent.
Freddie se leva finalement, prit un rail ou deux, et partit se recoucher en prenant Paul dans ses bras, défoncé, blotti contre lui, il n'avait plus cette sensation de vide. Et, quand il l'embrassait, il était pratiquement convaincu que cette emmerdeuse amie de la mort était allée voir ailleurs.
À quinze heures, les deux amants s'étaient enfin levés après s'être réveillé depuis plus d'une heure et avoir fait l'amour. Une soirée les attendait ; un vieil ami de Freddie les avait invités pour célébrer son anniversaire. Le malheureux ne soupçonnait néanmoins pas que les mots qu'il avait prononcés, c'est-à-dire "Invite qui tu veux", allaient se retourner contre lui.
La clique de Freddie se composait toujours d'au moins cinq personnes prêtes à lui obéir au doigt et à l'œil en échange de quelques privilèges que Paul leur offrait. C'était lui qui les sélectionnait et ces gens changeaient pratiquement à chaque sortie. C'était presque de la prostitution, mais Freddie s'en fichait. Il ne voulait pas être seul. Il ne devait pas être seul, c'était tout ce qui comptait.
Sa plus grande peur était de replonger dans les ténèbres qui s'étaient emparées de lui le jour de sa dernière commande au Ten Bells. Il n'avait plus jamais remis les pieds dans ce café depuis, il n'osait pas affronter les souvenirs. Il savait, que ce soit la solitude ou les souvenirs, qu'un face-à-face lui coûterait cher. Farrokh était conscient que la drogue ne faisait qu'envelopper tout ça d'une fine couche d'illusion, mais il aimait cette illusion et il voulait la faire durer le plus long temps possible. Il cessa de se livrer à la paranoïa : son escorte était là.
Il se rendit à la fête accompagné de tout son monde. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas vu l'ami qui célébrait son anniversaire, c'était à peine s'il s'en souvenait. Il n'avait même pas choisi le cadeau, Paul s'en était chargé. Les contraintes de la vie fatiguaient le musicien et il se sentait bien mieux en ne profitant que des choses amusantes, il avait confié tout ça à Paul. La soirée l'ennuyait, écouter quelqu'un que les vices lui avaient fait oublier raconter sa vie était barbant pour lui. Il avait besoin de quelque chose en plus.
— Clopes.
Toutes les personnes qui l'accompagnaient lui tendirent immédiatement leur paquet ainsi que leur briquet à la seule évocation de ce mot. Qu'est-ce qu'il pouvait aimer cette compagnie, bien qu'inconnue, sur laquelle il exerçait un grand pouvoir. Il fuma tranquillement, il s'ennuyait toujours, mais la cigarette l'occupait.
— Pipi
Il voulait aller aux toilettes, accompagné, évidemment. Ses "invités" se regardèrent quelques secondes dans les yeux avant qu'un jeune homme ne se lève pour ne pas qu'il reste seul.
Le reste fut tout aussi ennuyeux pour lui, jusqu'au moment de rentrer. De retour chez lui, le chanteur allait enfin pouvoir s'amuser un peu ; drogue, tabac, alcool. Il offrit aussi son corps à tous les gens que Paul lui avait dégoté pour la soirée. C'était en quelque sorte leur payement, la chose en échange de laquelle ils effectuaient tous ces services envers Freddie.
Farrokh venait, sans s'en rendre compte, de refermer définitivement le cercle vicieux qui guettait cette occasion depuis longtemps. Mais il avait perdu les notions de la réalité et le seul danger imminent était de le livrer à la solitude.
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Love Cannot Die
FanfictionAttention fanfiction LGBT+. Homophobes, c'est à vos risques et périls... Nous savons tous que Freddie Mercury est un des plus grands musiciens de l'Histoire. Il est assez extravagant et a la tête rempli d'ambitions. Mais connaissons-nous vraiment s...