58. Staying Alive

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Freddie et Roger s'étaient installés ensemble à Garden Lodge. Cela faisait une semaine qu'ils s'étaient retrouvés.

— Dépêche-toi ! Ça va commencer !

Freddie était impatient.

— Tu veux vraiment qu'on regarde ce truc ?

— Évidemment !

Sorti il y a deux ans, Staying Alive était déjà un film culte.

— Pitié ! s'écria Roger. Tout sauf du disco !

— Chut...

— Je déteste les Bee Gees.

Roger se résigna et s'assit dans le fauteuil à côté de Freddie en continuant de râler.

— C'est la première fois qu'il passe à la télé, je ne peux pas manquer ça ! En plus, John Travolta joue dedans !

— Je dois être jaloux ? demanda Roger, un sourcil arqué.

— Peut-être, répondit le chanteur avec un sourire coquin.

Roger prit un air faussement outré et croisa les bras en faisant rire Freddie. Entendre ce rire était tout ce qui lui importait désormais. Il savait que le temps leur était compté et qu'ils devaient en profiter un maximum.

Le film ne passa pas aussi lentement que ce que Roger avait d'abord imaginé. Quand il commençait à s'ennuyer, il regardait Freddie : un sourire aux lèvres, des étoiles pleins les yeux. Il aimait le voir ainsi et souriait également. Au bout de quarante-cinq minutes, une coupure publicitaire remplaça l'image dansante de John Travolta.

Freddie se leva d'un bond, plaça sa main gauche sur sa hanche, serra le poing droit en relevant l'index, et commença à lever son bras et à le rapprocher en alternance dans le plus disco des pas de danse.

— Ha Ha Ha Staying Aliiiiiive !

Ensuite, le pianiste s'approcha de son bien-aimé, une main tendue vers lui pour lui demander une danse. Roger soupira en détournant le regard, mi-amusé mi-embarrassé, plongea ses yeux dans ceux de Fred' et finit par accepter l'invitation. Le blond se leva maladroitement et essaya de danser par mimétisme, écrasant les pieds de Freddie à chaque mouvement. Roger baissa la tête, gêné.

— On va essayer autrement, dit Freddie avec un sourire.

Joignant les gestes à la parole, il passa dans le dos de Roger et prit délicatement sa main droite en posant sa gauche sur ses hanches pour reproduire la scène emblématique du film. Après quelques instants, Roger parvint à se détendre et ses gestes devinrent plus fluides, les deux amants dansants dans une parfaite harmonie. Puis, Roger se retourna, posa ses mains sur le visage de son cher et tendre et l'embrassa. Le moment de douceur fut brusquement interrompu par la sonnerie du téléphone.

— J'y vais ! déclara le chanteur.

Et il partit décrocher au pas de course.

— Allô? Freddie ?

Sa respiration se bloqua, son pouls s'accéléra, ses jambes se raidirent. C'était Paul.

— Oui, répondit-il simplement.

— Écoute, Fred'. Je suis désolé pour ce que j'ai fait. Vraiment. Ça me gêne de te demander ça, mais tu sais bien que je n'ai plus d'emploi. J'comprends que tu ne veuilles plus de moi chez toi, mais j'ai pas un penny en poche et nulle part où aller. J'ai besoin de toi. Moi, je t'ai aidé quand tu avais besoin de moi.

" Je t'ai aidé quand tu avais besoin de moi", ces mots résonnèrent dans l'esprit de Freddie. C'était une blague ? Tout ce qu'il avait fait, c'était de le droguer. Mais une autre partie de Freddie se dit que Paul n'était qu'un être misérable et que pour lui, ça avait sans doute été une véritable aide.

— Je vais voir ce que je peux faire.

— Merci beaucoup, Freddie ! Tu me...

Le musicien n'entendit pas la suite de la phrase, ayant reposé le combiné.

— C'était qui ? demanda Roger quand il réapparut dans le salon.

— C'est rien, ne t'inquiète pas.

La bonté de cœur de Freddie, sa loyauté mal avisée, le poussaient à aider Paul. Roger l'en aurait empêché, il le savait. Sans doute aurait-il eu raison de le faire, mais Farrokh se serait senti égoïste.

Il se rassit dans le fauteuil aux côtés de Roger pour voir la suite du film et reprendre leur baiser là où il avait été interrompu.

Le lendemain, il rencontra Paul pour lui remettre les clefs de son appartement de Stafford Terrace ainsi qu'un peu d'argent pour qu'il puisse subsister confortablement et s'amuser à Noël qui approchait à grands pas.

Love Cannot DieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant