2. Le rapprochement

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Le lendemain

Le soleil brillait déjà à travers la fenêtre de la chambre de Freddie, ce qui signifiait que midi était déjà passé. Il n'avait donc aucune chance d'être à l'heure. Ça ne l'aurait pas préoccupé plus que ça un autre jour, mais il voulait absolument faire bonne impression au groupe et encore plus à Roger.

Il attrapa les premiers vêtements qui lui vinrent sous la main et après une brève douche, quitta enfin sa maison.

Farrokh s'approchait de l'endroit où allait se dérouler la répétition. Il avait donné son numéro à Brian la veille pour convenir du lieu de rendez-vous, et il pouvait déjà apercevoir le garage du guitariste.

Il se fit accueillir chaleureusement malgré quelques taquineries sur son retard. Ils se mirent assez vite au travail. Freddie était plutôt intrigué par Bri', il était très grand et avait de long cheveux bruns bouclés, le guitariste portait également un gilet sans manches par-dessus une chemise blanche, mais ce qui l'étonnait était surtout le fait qu'il ne jouait pas avec un médiator mais une pièce de monnaie.

Après plus d'une heure de travail acharné, ils décidèrent de faire une pause.

— On se boirait bien une bière ? suggéra Brian qui voulait également fêter l'arrivé de Freddie dans le groupe, mais subtilement.


— Ou deux, s'exclama Roger avec enthousiasme.

— Je viens de regarder et il n'y en a plus. Je pars en chercher. J'en ai pour une bonne heure, continuez sans moi, annonça Brian après une petite dizaine de minutes consacrée aux recherches.

— Pas de problème, on va entamer les nouveaux morceaux.

— Tu avais dit que tu m'attendrais, dit le brun avec une légère inquiétude dans la voix qui trahissait une déception.

— Ok, ce sera pour une prochaine fois, je te charrie, Brian, avoua Rog' satisfait de sa petite feinte.

— Tu m'as fait peur, déclara-t-il avec soulagement. À tout de suite

— Ouais, à tout'

Il ne restait donc que Freddie et Roger qui comptait bien faire le sortir de son mutisme, seuls dans la pièce.

— Tu fais de la musique à part le chant ? demanda-t-il.

— Du piano, j'ai commencé à sept ans, répondit Freddie ravi que sa conquête s'intéresse à lui davantage.

— C'est cool ça !

Roger n'était pas de nature timide, loin de là pourtant, avec Freddie, il éprouvait beaucoup de difficultés à trouver ses mots. Un détail le sortit de ses réflexions sur sa psychologie, son nouveau chanteur était en train de lui sourire bêtement, une main crispée devant sa bouche. C'était bizarre mais mignon. Ce qu'il ne savait pas, c'est que Freddie avait toujours été complexé par sa dentition proéminente. Ça lui procurait une voix sans pareille, mais son sourire était un peu trop fourni à son goût.

Rog' trouva que ce moment de silence intense devait prendre fin et proposa à Freddie d'essayer sa batterie. Celui-ci n'en avait jamais fait, et ne s'en sortait pas très bien d'après le vacarme que produisait la percussion des tambours. Roger vint à sa rescousse en posant ses mains sur les siennes ce qui le fit frissonner, ils étaient vraiment très proches, le torse de Roger frôlait les cheveux d'ébène du pianiste. Freddie ressentait une sensation nouvelle en lui traverser tout son corps et il ne put contrôler sa pulsion soudaine. Il releva la tête et colla ses lèvres contre celles du batteur qui, contre toute attente, intensifia ce long et doux baiser en posant la main qu'il avait de libre sur la joue de Freddie.

— On ne peut pas, s'exprima Roger avec difficulté.

— Pourquoi ? questionna le chanteur, la gorge serrée par l'émotion d'avoir obtenu un espoir qui s'évanouissait aussitôt.

— Je pense que le groupe a un potentiel ça serait con de tout gâcher, révéla le blond, presque malgré lui.

— Mais je t'aime, protesta Farrokh complètement dévasté par la soudaine peur qu'éprouvait l'homme dont il était éperdument amoureux face à cette relation.

— Moi aussi, mais les gens vont nous prendre pour des malades mentaux, avoua enfin Roger.

C'était donc ça, il avait peur que les gens freinent leur amour, leur travail, leurs vies. Il fallait absolument lui ouvrir les yeux. Ce n'était habituellement pas son genre de prêter attention au jugement des autres, mais ses sentiments ont pris le dessus sur sa raison.

—Mais, je ne comprends pas. Pourquoi se soucier des gens, on se moque du regard des autres, répliqua Freddie bien décidé à lui faire entendre raison.

—Non, si on veut rentrer dans l'Histoire du rock. Il faut se cacher, dit Roger pour la deuxième fois, déjà.

— Alors, qu'est ce qu'on va faire ?

— Trouve-toi une copine pour qu'il n'y ait aucun soupçon. On ne s'aimera qu'à l'abri des regards, révéla-t-il.

Roger commençait à entendre raison, mais il avait sûrement besoin de plus de temps pour réfléchir à ce qu'il venait de se passer.

— Il n'y a pas d'autre moyen ? demanda Freddie une dernière fois avant de se résigner pour respecter le choix de son nouvel amant.

— Non, personne ne doit savoir même pas Bri'.

Freddie ressentait une immense tristesse, si le sentiment était réciproque, pourquoi ne pas s'aimer ?
Il ne fit cependant pas couler de larmes, il resta fort en dépit de son envie de pleurer. Il quitta le tabouret de la batterie et fit semblant de relire les paroles d'une chanson. Semblant, car son esprit n'arrivait pas à se concentrer sur autre chose, il ne voyait pas de mots sur la feuilles, juste une vision brouillée de traces noires qui contrastaient sur le blanc du support, tel un enfant en bas-âge qui n'aurait pas appris à lire.

Par miracle, la porte du garage s'ouvrit comme pour effacer leur peine silencieuse. On pouvait déjà distinguer les chaussures en cuir marron de Brian, mais il n'était pas seul.

Love Cannot DieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant