Acte I 🌷: Chapitre 6 🐍

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Noblesse était hors d'elle.

Dans sa petite chambre d'internat, elle tournait en rond, envoyant valser tout ce qui lui tombait sous la main. Habituellement, la jeune fille n'est pas aussi impulsive, mais ce soir, elle se permettait un écart.

Elle revoyait son carnet à dessin - si cher à ses yeux - tomber dans l'eau. À ce moment, elle avait hurlé avec une rage presque folle, jurant contre son rival aussi violemment qu'elle le pouvait ! Cependant, celui-ci ne semblait pas le moins du monde affecté par ses paroles : il se contentait de lui dire qu'il s'agissait d'une juste punition, et que la prochaine fois, elle se prosternerait devant lui.

À la limite du meurtre, elle s'était retournée et avait décidé - malgré l'interdiction - de franchir les barrières du pont pour aller dans la rivière rechercher son bien.

Si elle est tellement en colère, c'est non seulement parce qu'elle a perdu tous ses projets - les pages avaient fondu dans l'eau et étaient irrécupérables - mais aussi parce qu'elle a fini entièrement trempée avec un mot en prime !

Elle allait lui faire regretter. Elle le devait. Ce maudit badboy, trop fier, trop méprisant, trop désagréable, et beaucoup trop beau, allait comprendre que l'étudiante n'était pas du genre à abandonner ! Pas pour lui en tout cas !

Noblesse se mit au lit sans aucune délicatesse, consciente qu'elle ne parviendrait pas à trouver le sommeil si rapidement. Alors qu'il ne restait plus que sa lampe de chevet allumée, elle enfouit son visage sous les draps.

Outre tous ses souvenirs effacés, elle voyait le visage de son père mourant découvrir son carnet de correspondance. Elle imaginait la déception dans ses yeux et les paroles dénigrantes auxquelles elle aurait droit.

Ne sera-t-elle même pas capable de tenir sa promesse ? N'était-elle vraiment bonne à rien ?

Sous la couverture, personne ne la vit pleurer. Parce que bien plus que d'avoir perdu son travail, elle avait perdu l'estime de son père.
Et ça,

On ne l'invente pas.

Le mardi matin, la lycéenne était d'une humeur exécrable. Elle avait ruminé sa vengeance durant toute la nuit sans trouver l'idée du siècle. Dans la cour froide du lycée Asgard, elle avançait d'un pas lourd, emmitouflée dans son manteau noir offert par sa tante. Elle s'aperçut avec désespoir que son ami n'était pas là et que tous les bancs étaient pris !

Elle soupira en s'adossant au mur du bâtiment de la direction. Elle portait déjà des gants et un bonnet alors que l'été n'était pas officiellement fini ! Néanmoins, au royaume de Jötunheim, il fait froid presque toute l'année. L'hiver est rude : on ne voit quasiment plus le soleil et la température descend si bas que, parfois, les établissements ferment. La vie s'arrête quelques mois pour reprendre plus tard, lorsque doucement, les températures s'approchent du zéro et quittent les négatifs.

Il est peut-être temps de vous parler de la situation politique du pays, d'ailleurs. Loin d'être idéale, il serait plus judicieux d'employer le mot "crise" : l'économie s'écroule, les habitants fuient, et les souverains ne s'entendent même pas ! Les Laufeyson ne parviennent plus à sauver leur nation, et, sans héritier, l'avenir ne semble pas prospère... Enfin, je parle de la reine Laufey et du roi Farbauti mais en réalité, la situation est la même pour tous les habitants ! Nous devrions plutôt dire :

Il n'y a aucun avenir à Jötunheim.

Voilà pourquoi Noblesse - et tout le monde en fait ! - n'ose pas songer au futur. Mieux vaut faire les aveugles que d'avoir conscience d'avancer dans un mur.

Si seulement les Laufeyson
avaient eu un fils !

C'est ce que se disait toute la population. Pourtant, même s'ils avaient un héritier, il faudrait que celui-ci ait la tête sur les épaules ! Il s'agirait d'une véritable malédiction comme héritage : un royaume en ruine. Peut-être valait-il mieux ne pas donner ce fardeau à n'importe qui finalement !

FAÇONNE-MOI | Loki ~ TERMINÉ ~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant