Chapitre 30

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L'air était lourd, le ciel se couvrait et d'épais nuages grisâtres tendant sur le noir avaient coloré le plafond céleste privant son peuple de sa teinte bleue habituelle. Les fleurs s'étaient toutes refermées sur elle-même, les feuilles des végétaux se recroquevillaient étrangement tandis que le branchage des arbres semblait pendre pathétiquement : la Nature était comme endeuillée. Aucun oiseau ne chantait, les habitants des villes mais aussi des campagnes n'étaient pas de sorties comme si les gens sentaient les mauvaises ondes à l'extérieur. Le Royaume Gaïa était devenu terne et morne, les Tokësor ainsi que les divers êtres vivants sur le territoire savaient que ce jour ne serait pas de fête.

Dans le Palais résonnait une mélodie dramatique, une sonorité serrant les cœurs tout en humidifiant les yeux de tous les domestiques : les lamentations des jumeaux. C'était le grand jour, le départ de Dongju du château, la séparation des deux frères si complémentaires. Au bout d'un couloir, enfermé dans sa chambre, le marié tentait vainement de retenir ses sanglots mais son visage se distordait en une hideuse grimace trahissant son état brisé. Dongmyeong, quant à lui, ne se retenait pas.

Le futur souverain du Royaume de la Terre avait passé cette dernière nuit dans le lit de son double. Les jumeaux s'étaient blottis l'un contre l'autre en observant l'éclat lunaire au travers de la baie vitrée menant au balcon. Leur langue s'était déliée, les souvenirs passés avaient été partagés rappelant les meilleurs instants de leur enfance : les plus mémorables bêtises qu'ils avaient effectuées aux plus belles journées qu'ils avaient passé dans ce Palais où ils avaient grandi. Leurs iris avaient pétillé de nostalgie toute la nuit durant, leurs cœurs ne cessaient de battre agréablement en se souvenant de ses scènes d'antan où le monde semblait si doux, si gentil. Bien des choses avaient changé.

Dongmyeong n'arrivait pas à lâcher la chemise de nuit de son frère, ses poings serraient fortement le morceau de satin, ses trémolos gagnaient en intensité tandis que le jour se levait à l'extérieur. Ils savaient que, lorsque ce nouveau jour débutera, une page se tournera, un chapitre prendra fin, un nouvel arc commencera et, dans ce dernier, ils ne seront plus ensemble. Ils étaient arrivés au jour des adieux, à la séparation de leur route... Et cela, aucuns n'arrivaient à l'accepter.

Les oreillers devinrent humides à cause des larmes dévalant ces deux visages, les gorges étaient nouées douloureusement faisant que les sons qui s'en échappaient n'étaient que des couinements de souffrances donnant le sentiment qu'on arrachait un organe aux deux. Sebastian, accoudé derrière la porte, ne savait que faire. Lui qui avait vu les frères grandirent ensemble, rirent aux éclats en cavalant dans les couloirs. Le majordome avait aussi été celui qui devait calmer les enfants lorsque leur dispute allait trop loin ou bien les couvrir après qu'ils avaient cassé un énième vase. Sebastian avait été spectateur de leur évolution, de leur échec tout comme leur réussite, il était là depuis leur naissance et il comptait les protéger jusqu'à sa mort. Hélas, l'un des deux devaient partir, le petit Dongju s'en allait pour un long voyage sans retour possible.

Contre la porte de la chambre, l'homme se mit à pleurer à son tour tandis que les sanglots des frères s'intensifièrent, devenant un véritable cri d'affliction qui se diffusa dans tous les couloirs du château provoquant de nombreuses crises de larmes chez les domestiques. Le départ était déjà dur à avaler pour beaucoup mais les sentiments étaient amplifiés à cause de la légère perte de contrôle de Dongmyeong. Effectivement, l'enfant de l'Orchidée était tellement plongé dans son désespoir que sa fragrance avait pris une senteur légèrement amère et elle se diffusa sur l'entièreté du territoire Tokësor traversant même les mers impactant les Bymehet habitant sur la côte. L'odeur florale s'infiltrait dans les esprits puis elle diffusa une sensation de tristesse intense dans tous les corps faisant que des centaines de personnes se mirent à pleurer sans raison. Cette date particulière fut baptisée « le Jour des lamentations » et devint un événement historique pour le peuple de la Terre.

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