Chapitre 35

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Le Soleil n'était pas encore levé, sa consœur la Lune était toujours reine dans le plafond astral et la majorité des êtres vivants se reposaient encore quelques instants avant ce début de journée. Enfin, ce n'était pas le cas de tous. Effectivement, dans les murs du château Zéphyr, les premières âmes s'éveillaient en s'étirant douloureusement à cause de leurs articulations douloureuses et les courbatures difficilement supportables. Le repos trouvé sur les futons de paille n'était jamais ressourçant, il s'agissait simplement d'une pause permettant de recharger les batteries des domestiques d'une dizaine de pourcents avant de reprendre leur tâche ingrate.

Wooseok, dans un coin de son dortoir d'une vingtaine de mètres carrés qu'il partageait avec dix autres personnes, était déjà sorti du pays des songes depuis quelques minutes déjà. Sa discussion avec Youngjo la nuit précédente lui trottait dans la tête et il avait décidé d'aider le jeune prince à tout prix : aujourd'hui il passerait à l'action. Se redressant, le garçon attrapa ses lunettes qui avaient été mises à l'abri dans une petite boîte sous une latte du plancher qui se retirait puis le servant commença à se diriger vers la sortie en passant au-dessus de ses collègues émergeants doucement.

Une fois sortie de la pièce, l'odeur de sueur quitta enfin les narines du domestique qui soupira de bonheur avant de se diriger vers les douches communes afin de prendre une courte toilette à l'eau froide et d'enfiler son autre uniforme de travail puisque celui qu'il avait empesté la transpiration. Dans la petite salle d'eau délabrée, quelques âmes endormis étaient déjà dénudées sous le jet d'eau glacial. Les marques sur leur corps exposées à tous, ces bleus témoignant des brutalités infligées au personnel de maison, ses coupures et cicatrices signalant de la gravité de la situation de chacun. Tous les servants étaient des tas d'os recouverts d'un épiderme bleuit ou verdit par la violence de maître sans cœur et Wooseok n'échappait pas à cette règle.

Se dirigeant vers le dernier pommeau de libre, il retira délicatement son uniforme puis le déposa sur les lavabos sales avant d'avancer, en tenue d'Adam, vers l'eau qu'il fit couler. Ses muscles se contractèrent aux prémices du nettoyage lorsque les gouttelettes du liquide non-chauffé tomba sur son corps meurtri mais, avec le temps et l'habitude, le garçon se détendit et attrapa le petit morceau de savon que se partageaient péniblement tous les domestiques. Le savon rêche à la désagréable odeur commença à mousser et Wooseok garda ses yeux clos durant l'entièreté de l'opération : son corps avait fini par le dégoûter et le terrifier, il ne pouvait plus l'observer sans vomir l'instant d'après.

Quand le domestique finit de se préparer, la lune avait énormément entamé sa descente stellaire et l'aura chaleureuse du soleil commençait à percer l'obscurité de la nuit créant un dégradé bleuté et violine dans le ciel. Wooseok fit un tour à la salle des machines à laver afin de mettre son uniforme à nettoyer puis il trottina en direction des cuisines tout en faisant très attention de ne pas faire trop de bruits dans les couloirs : les maîtres dormaient toujours. Telles des ombres agissant sans un bruit, le personnel astiquait, rangeait, préparait les lieux dans un silence total. Dans la cuisine, l'agitation était importante : les fourneaux tournaient à pleins régimes, la vaisselle passait au-dessus des têtes pour préparer les déjeuners des occupants du palais et les indications se faisaient en langage des signes car, même dans ce lieu éloigné des chambrés, aucun bruit ne devait résonner.

Le servant de Dongju se faufila dans l'assemblée active, il trouva rapidement sa place sans qu'aucun ne le remarqua et il débuta la préparation du petit déjeuner de son maître qui était très maigre : une omelette avec un peu de salade composée ainsi qu'un jus de fruit et un café glacé. C'était ce qui était écrit sur la fiche du prince Tokësor, ce repas était celui qu'il ingérait à Gaïa mais, ici à Zéphyr, il n'y avait jamais touché à l'inquiétude de Wooseok. Une fois le dressage finit, le serviteur ajouta un bouquet de fleurs tropicales dans l'espoir d'amener un peu de baume au cœur de son maître, il déposa le couvert sur un plateau d'argent puis quitta la cuisine grouillante tandis que les rayons du soleil perçaient les fenêtres parfaitement propres : la journée débutait.

Kingdom {Oneus}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant