Chapitre 61

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Les jours de repos s'étaient écoulés à une vitesse similaire à celle de la lumière aux yeux de Dongju. Les instants passés au côté de sa famille, ses amis, son jumeau... Tout cela l'avait aidé à aller mieux, à retrouver lentement le sourire et la santé. Hélas, cela eut aussi l'effet de l'emprisonner dans cette bulle de bonheur en fuyant cette cause pour laquelle il se battait : le retour à Zéphyr effrayait le jeune garçon. Il avait tout fait pour repousser l'échéance. Ignorant Geonhak ou discutant avec lui afin de lui faire accepter pour une énième fois l'idée de rester quelques temps supplémentaires à Gaïa : le prince du Lotus avait tant fait pour que ce jour ne puisse jamais arriver.

« - On ne peut pas fuir indéfiniment, s'énerva légèrement le Ajri en faisant les cent pas tandis que sa valise faite reposée sur son lit parfaitement bordé.

- Rien qu'un jour de plus, s'il te...

- Non ! »

Cela avait sonné comme un ordre aux oreilles du plus jeune qui recula de quelques pas : il avait cru apercevoir l'aura du Roi Kim au travers de son fils. Les yeux exorbités et brusquement larmoyant, les mains de Dongju se mirent à trembler tout comme sa lèvre inférieure : les souvenirs revenaient abruptement dans son esprit le faisant tanguer vers un état de panique.

Cherchant un moyen de fuir, les sens du garçon passèrent sur un mode instinctif et non raisonné. Le Son se devait de courir, fuir pour sauver sa vie sinon il l'attraperait et recommencerait ses horreurs.

Hyperventilant, les jambes du garçon se plièrent sous son corps et ce dernier s'effondra sur le sol mais cela ne l'empêcha pas de reculer davantage. Ses bras poussèrent sur la surface polie, ses fesses frottaient sur le carrelage en le brûlant légèrement mais cette sensation d'endolorissement était tellement insignifiante comparée à l'anxiété qui dominait le noble.

Partir. Fuir. S'évader. Disparaître. Tant de synonymes résonnaient dans l'esprit du paniqué qui, soudainement, sentit son dos cogner contre une surface dure et lisse : le mur. L'angoisse devint bien plus intense, les larmes dévalaient ses joues tandis que l'oxygène peinait à rentrer dans ses alvéoles pulmonaires causant une hypoxie dans l'organisme de Dongju.

Le blanc de ses yeux devint de plus en plus présent à force qu'il tournait de l'œil à cause de cette violente crise, ses ongles légèrement longs vinrent vivement se planter dans la chaire de ses paumes comme dernières méthodes pour rester ancrer dans ce monde mais le garçon partait, lentement.

Les images s'imposèrent tel un diaporama projeté sur un écran blanc. Les murs de la chambre devinrent similaires à ceux de la prison, l'odeur florale fut remplacée par celle nauséabonde des cadavres en décomposition et Dongju ne put s'empêcher de vomir face à cette réminiscence olfactive.

Ses boyaux se tordirent, le goût acide de la bile remonta le long de son œsophage jusqu'à s'étaler sur le sol propre. Les larmes se mêlaient à l'acide gastrique : l'enfant du Lotus se sentait défaillir. On l'appela, la voix était lointaine et le timbre indiscernable mais, plongé dans son traumatisme passé, le garçon l'associa à celle de son bourreau. Les insultes se mêlaient aux mélanges de fragments mémoriels : la scène paraissait affreusement réelle.

« - Dongju ! »

Le noble aurait tant voulu lâcher un « laissez-moi » ou une phrase allant de ce sens, néanmoins, il était bien trop occupé à régurgiter les liquides présents dans son estomac. La crise semblait insurmontable, le jeune homme pensait qu'il allait devenir fou et que son cerveau finirait par exploser comme son cœur qui battait à une vitesse ahurissante.

« - Dongju ! Reviens ! »

Qu'avait-il dit ? Le bourreau lui disait de revenir ? Pourquoi le rappelait-il à l'ordre ? Il avait sûrement dû faire une chose de mal. La tentative de fuite ne devait pas avoir plu à l'homme source de toutes ses souffrances : Dongju allait payer le prix de sa rébellion.

Kingdom {Oneus}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant