XVIII. 29 mars 1932 - la rencontre

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Le restaurant choisi pour l'occasion était placé dans l'Avenue de Traverse, sur les limites reculés, loin de la foule et des magasins. C'était Lycoris qui le lui avait conseillé, celle-ci subtile en matière de goût gastronomique. Il n'avait pas voulu lui dire que le choix du restaurant était bien la dernière chose qui lui importait, surtout quand il s'apprêtait à rencontrer sa future femme.

Il arriva devant et sortit sa montre à gousset. Il était à l'heure. Quand l'aiguille dépassa le douze, elle fut en retard. Il rangea de nouveau le bijou dans la poche de sa veste et fixa avec irritation l'allée qui serpentait devant lui. Cassiopeia aurait eu au moins un quart d'heure d'avance. Sa soeur s'arrangeait toujours pour paraître la plus organisée et disciplinée, même si son fort caractère déteignait un peu sur cette seconde qualité. Il sourit à cette pensée. Elle avait beau
être jalouse, aucune femme ne lui arriverait à la cheville. C'était bien pour cela qu'il avait été passionné par elle dès son plus jeune âge. Cassiopeia était juste unique.

La figure d'une femme se dessina au bout de la fine allée. Plissant les yeux, il vit ses traits plus nettement alors qu'elle marchait dans sa direction. Ses cheveux bruns coupés au carré se balançaient au dessus de ses épaules, les effleurant à peine. Sa robe respectaient les tendances de la mode, s'arrêtant en dessus des genoux et épousant les courbes de ses hanches. Une petite fraîcheur hivernale soufflait sur Londres, mais elle portait sa cape à son bras comme s'il faisait trop chaud pour la porter. Quand elle le reconnut, un petit sourire s'afficha sur son visage. Ses pomettes saillirent comme des roches quand la mer se retire. Il n'allait pas jusqu'à dire qu'elle était belle, ni laide, juste... normale. Il fut légèrement rassuré. Il s'était attendu à une femme négligée à lunettes, le nez plongé dans un livre du temps passé.

-Bonjour ! annonça-t-elle en arrivant à sa hauteur. Désolée du retard, j'ai du demander plusieurs fois où se trouvait le restaurant parce que, pour être sincère, je ne me suis jamais vraiment aventurée dans cette partie là du Londres Magique, et comme mon sens de l'orientation est un peu...

Elle mima une vague puis éclata d'un petit rire. Pollux releva un sourcil, surpris par sa manière d'aborder si simple et facile. Elle parlait beaucoup. En l'absence de réaction, elle reprit un air sérieux, jetant un coup d'oeil à la bâtisse.

-C'est très chic.

Les colonnes du portiques étaient dorées, reflétant la lumière du soleil partout dans la rue. Les larges fenêtres laissaient voir l'intérieur : des murs revêtus de velours bordeaux, des lustres en cristal et un bar en marbre.

-C'est passable.

Il s'avança vers la porte et la laissa ouverte pour la faire entrer. Plongée dans la contemplation de l'édifice, elle ne s'en rendit pas compte. Que faire ? Comment l'appeler ? Par son prénom ? Non, ce serait trop familier. Son nom ? Par Merlin, ils n'étaient plus à Poudlard, ni dans un entretien formel. C'était la première fois qu'il se retrouvait dans une position pareille face à une femme, et la sensation lui déplaisait fortement. Finalement, il se racla la gorge. Elle posa presque immédiatement ses yeux sur la porte ouverte et esquissa une moue d'excuse.

-Merci, marmonna-t-elle en passant devant lui.

Un serveur marcha vers eux, un fin tissu immaculé posé sur le bras.

-Mr Black et Mme Crabbe ?

-En effet, confirma Pollux.

-Une table a été réservée pour vous à l'étage. De là-haut, on y voit tout le Londres Magique.

Lycoris et ses idées romanesques.

-Parfait, fut-il forcé de dire.

Ils montèrent un escalier en colimaçon recouvert d'un tapis rouge et décoré par endroit de plantes vertes. Une musique de jazz flottait doucement dans l'air. L'étage était similaire au rez-de-chaussée, excepté que les clients avaient l'air d'être issus d'une plus haute classe et que la vue était plus élargie. Pollux ne reconnut aucun sang-pur présent, pour sa plus grande déception. Appréhendant la suite du dîner, ils s'installèrent devant les hautes fenêtres. La pièce était plongée dans la lumière faiblarde de printemps, mais Irma réagit comme si elle venait de passer sous un arc-en-ciel.

Ascension - 𝔅𝔩𝔞𝔠𝔨 𝔖𝔢𝔯𝔦𝔢𝔰 IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant