LXII. 3 février 1936 - la fuite

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La porte de la chambre s'ouvrit. Perseus s'infiltra discrètement et referma la porte malgré les bras chargés. Callidora se redressa, le souffle entrecoupé. Il était venu. Il avait tenu sa promesse. Il la sauvait.

-Ne fait pas de bruit ! chuchota-t-elle.

Il ne fallait surtout pas réveiller le monstre. Pas alors qu'elle s'apprêtait à sortir. Mais Perseus l'ignora et marcha comme on marcherait dans la rue. Elle agrippa son poignée quand il arriva à sa hauteur, un index posé sur sa bouge pour lui indiquer de se taire.

-J'ai ma baguette, la rassura-t-elle. Cette chose ne te touchera plus. Maintenant, il faut que tu m'écoutes d'accord ?

Il était gentil. Pourquoi faisait-il cela ? Le méritait-elle ? Elle avait passé tellement de temps enfermée qu'elle doutait de son innocence. Et si on l'avait mise ici parce que c'était ce qu'elle méritait ?

Il l'enveloppa d'une cape fourrée. Une chaleur étrangère vint chauffer sa peau. Elle n'avait pas connu de telle sensations depuis des mois. Des mois, ou des années, elle ne sut le dire.

-Je n'ai pas réussi à te trouver des bottes, je suis désolé.

Elle ne répondit pas, trop occupée à toucher du doigt la fourrure. C'était doux, trop doux. C'était comme se noyer dans du coton, plonger dans une mer de chaleur.

-J'ai dit écoute-moi.

Elle releva la tête. Il lui présenta un poignard. Son manche portait un corbeau de cuir et des pierres vertes. Elle fit un effort considérable pour savoir d'où venait ce symbole, tandis qu'elle le prenait dans ses mains le plus délicatement possible.

-Il appartient aux Black ? demanda-t-elle.

-Non, les Black ont trois corbeaux. Les Lestrange n'en ont qu'un.

Oh. C'était donc le sien. Et lui, qu'avait-il pour se défendre ? Sa baguette, c'était vrai. Depuis combien de temps n'avait-elle pas vu la sienne ? Trop longtemps.

-Je fais quoi avec ?

Plusieurs secondes s'envolèrent dans un silence.

-Tu tues.

Il lui proposa sa main pour l'aider à se lever. Enfin debout, l'armoire se mit à trembler. L'instinct dissipa toute forme de rationalité et elle brandit la lame, le bras plus tremblant qu'une feuille morte.

-Wow, wow. Fait attention avec ça.

Il lui baissa doucement le bras. Callidora continuait de fixer obsessivement le meuble, les yeux aussi ronds que des billes. Il la prit par la main et la tira vers la sortie avant qu'il ne doive lutter contre la créature. Les sorts seraient beaucoup trop bruyants, Marianne viendrait les arrêter avant qu'ils ne puissent mettre un pied dehors. Et c'était tout sauf le moment qu'on les découvre. Avec une infinie délicatesse, il ouvrit la porte et la tira vers l'extérieur. Callidora observa les alentours comme si elle les découvrait pour la première fois.

Les portraits la dévisageaient. Elle avait oublié qu'ils pouvaient bouger. Qu'ils vivaient, comme des vrais êtres humains. Son cerveau n'était qu'une bouillie meurtrie par le monstre et cette découverte de l'extérieur bousculait ses sens. Ses doigts s'étaient cripés au couteau, sa seule arme pour se protéger. "Tu tues", lui avait-il dit.

Pour retrouver sa liberté, elle tuerait.

-Ok, maintenant j'ai besoin de toute ton attention.

Elle vit ses yeux se planter dans les siens, elle sentit ses mains se poser sur ses bras, mais elle ne les sentit presque pas à cause de la cape. Cette fourrure était une armure. Le poignard, son épée. Et elle tuerait quiconque se trouverait sur son chemin. Elle devait fuir le monstre.

Ascension - 𝔅𝔩𝔞𝔠𝔨 𝔖𝔢𝔯𝔦𝔢𝔰 IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant