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Mathieu réajusta le bonnet de Lina alors qu'elle claquait des dents. Le vent de février frigorifiait ses os si fortement qu'elle était prête à reprendre un vol et ne jamais revenir. Il embrassa son front en attendant les bagages.

« On va rentrer au chaud et t'oublieras tout de suite qu'on est à Paris. » Il refixa sa casquette et sa capuche tout en s'assurant de ne pas être vu. « J'peux même peindre le studio avec des palmiers. » Elle pouffa contre lui, le nez enfoui dans le bras du sweat du blond.

« T'es tout aussi gelé que moi, fais pas genre. » Elle lui pinça les côtés. « Et j'suis sûre que tu préférais me voir en maillot de bain plutôt qu'en doudoune. »

« J'aime bien aussi. » Il attrapa les valises. « T'es toute mignonne comme ça. » Elle leva les yeux au ciel et il la poussa gentiment vers la sortie. « Allez, viens, on rentre, j'ai bien besoin de dormir. »

Elle acquiesça tout en le suivant. Toutefois, ils eurent à peine le temps de sortir de l'aéroport et d'affronter le froid du parking que le téléphone de Mathieu se mit à sonner. Il n'attendit pas d'être dans l'habitacle d'un taxi, répondant directement. Lina souffla tout en se collant à lui. Il la prit dans ses bras tout en se concentrant sur la conversation. Elle passa ses mains sous son sweater et elle le sentit se contracter tout en retenant un cri de surprise.

« Mat, dépêche, j'ai froid. »

Pour seule réponse, il la serra un peu contre lui pour l'abriter du vent. La brune, elle, observa les alentours et sursauta quand elle vit une voiture de police se garer à plusieurs mètres d'eux. Elle se renfonça un peu plus dans les bras de Mathieu qui était beaucoup trop concentré sur sa discussion pour voir le changement d'attitude de Lina. Alors qu'ils sortaient du véhicule, elle se mit à tirer sur la manche du blond frénétiquement.

« Mat ! Mat ! »

« Bébé, hey, attends, j'en ai pas pour longtemps. » Elle attrapa son téléphone pour raccrocher et il fut surpris par son comportement. « T'es sérieuse ? »

« Y a les flics ! »

Mathieu observa enfin le parking et les vit arriver dans leur direction. « Va t'en. »

« Quoi ? » Elle se mit à pleurer alors que le ton de son petit ami était froid et effrayant. « Non, viens avec moi. »

« Ils sont là pour moi alors va t'en avant qu'ils ne te voient et qu'ils fassent un lien avec Franck. » Il attrapa sa propre valise avant de s'éloigner. « On se retrouve à l'hôtel. Je t'aime. » Il se retourna une dernière fois pour s'écrier afin d'être entendu par la police et de la faire passer pour une fan. « J'fais pas de photos dans les aéroports désolé ! »

Lina hocha la tête, les yeux remplis de larmes, avant de rentrer à l'intérieur pour s'y cacher. Mathieu, lui, n'eut le temps de marcher plus que les policiers attrapaient ses bras. Il lâcha sa valise tout en se libérant de leur contact.

« Ça va Monsieur Pruski ? Ça fait longtemps ! » Il hocha la tête, préférant obtempérer pour ne pas se faire arrêter. « Tu pars en vacances tout seul ? C'est un peu bizarre ? »

« T'essayes de fuir quelque chose ? »

« On a eu des nouvelles informations. » Un des policiers tapota son taser. « On va devoir t'emmener avec nous pour en discuter. »

« J'ai rien à dire, moi. J'fais de la musique maintenant, rien d'autre. »

« Écoute, j'ai aucune envie de te mettre les menottes alors fais un effort. Dans deux heures, tu seras chez toi. »

« J'vous suis. »

Et c'est ce qu'il fit, regardant une dernière fois derrière lui pour essayer de voir la petite brune mais elle n'y était plus. Il secoua la tête, dans ses pensées, tout en entrant dans la voiture de police. Il resta silencieux jusqu'à ce qu'on le force à s'asseoir dans une salle d'interrogatoire. Il souffla tout en se redressant alors qu'un homme prenait place face à lui.

« Où est-ce que t'étais ? »

« En Guadeloupe. »

« Seul ? »

« J'ai trouvé de la compagnie là-bas. » Il haussa les épaules tout en mettant ses mains dans les poches de son jogging. « C'est ça qui est bien quand on fait du rap, toujours des meufs prêtes à tout. Mais j'suis pas là pour discuter de mes parties de baise, si ? »

« Les voisins de Franck ont la langue bien pendue, tu savais ? » Le policier tapota son stylo sur la table. Mathieu eut envie de l'attraper pour lui planter dans la carotide. « Il parle que notre inconnue était en fait une femme et qu'elle avait une place privilégiée. »

« Sûrement une pute de Franck, demandez-lui, non ? » Mathieu essaya de ne pas croiser son regard pour ne pas se trahir. Ses propres mots lui brûlaient la langue.

L'homme en uniforme claqua sa langue plusieurs fois. « Nan, le truc tu vois, c'est qu'ils ont dit qu'elle déplaçait tout le temps des sacs.» Il continuait de jouer avec son crayon, fier de cette nouvelle information. « Et je trouve ça bien pratique, qui penserait qu'une femme pourrait être le bras droit de Franck ? C'est très malin. »

« J'en sais rien moi. J'vous ai déjà dit. » Il se redressa sur sa chaise. « Lâchez-moi maintenant, j'ai rien pour vous. J'suis même plus dans tout ça depuis presque un an. Laissez-moi tourner la page. » Il n'eut le temps de continuer sa défense qu'un autre policier rentrait. Mathieu le connaissait bien, c'est lui qui l'avait arrêté pour la première fois mais qui l'avait aussi aidé à plusieurs reprises.

« Ça va Mathieu ? » Il acquiesça. « Pourquoi il est là ? »

« Parce qu'il a des informations qu'il ne veut pas nous donner. »

« Ou peut-être qu'il n'a pas les informations ?...Mathieu, lève-toi, récupère tes affaires, tu sors. »

Il ne se fit pas prier pour se lever, signer la paperasse et récupérer ses affaires. Il courait presque pour sortir et quitter ce lieu sordide qui ne lui avait apporter que des malheurs. Il ralluma son téléphone pour appeler la seule personne qu'il voulait entendre, Lina. Elle répondit immédiatement et il put l'entendre paniquer de l'autre côté de la ligne.

« Mathieu ? Allo ? Mathieu, c'est toi ? »

« Ca va Lina ? »

« Oui mais toi, ça va ? »

« Je rentre, j'arrive, t'es dans quelle chambre ? »

« Je...J'ai pas pu. »

« Quoi ? » Il s'était écrié plus fort qu'il ne le voulait. « T'es où ? »

« Mat... j'ai...j'ai appelé ta grand-mère. J'suis chez toi. »

« Putain, tu déconnes ? » Cette fois l'énervement était tel qu'il ne se contenait plus, donnant un coup de pied dans sa valise. « Fais chier Lina ! Je t'avais dit d'aller à l'hôtel ! J'arrive ! »

Rusted Souls [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant