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« J'ai pas envie de sortir cette putain de mixtape Antoine ! » Mathieu criait ses poumons, assis devant son ordinateur, prêt à tout effacer. « J'veux pas faire d'interviews ! J'veux pas prétendre que j'vais bien ! J'veux qu'on m'oublie et qu'on me laisse tranquille ! »

« J'ai besoin que tu me parles. » Antoine était sur le canapé, derrière lui. Il essayait de garder son calme malgré la détresse de son protégé. Inès, sa petite amie, lui tenait l'avant-bras comme pour le prévenir de la bombe prête à exploser devant eux. « Ça a toujours été ton rêve. T'as bossé dur. »

« J'm'en bats les couilles ! Ça ne vaut plus rien pour moi ! »

« C'est à cause de Lina ? » Il se retourna à son prénom et passa de la fureur à la décomposition. « Elle te soutenait dans tout ce que tu faisais, pas vrai ? »

« Justement. C'est une putain de mythos. » Il vit Inès lever les yeux au ciel. Si ça n'avait pas été elle, il lui aurait sûrement donner un coup de poing pour l'assommer. « Quoi ? Tu fais ta putain de Girl Power ? Tu veux la défendre ? »

« Mathieu, ne lui parle pas comme ça. » Antoine l'avertissait, si bien qu'il arrondit les épaules pour se faire plus petit. « De un, ta mixtape va sortir. On ne fera pas de promotion en extérieur, je concède mais le reste non. De deux, tourne la page. Des filles, tu en rencontreras d'autres. Pars en vacances, ça va être l'été. »

« C'est son premier amour. » Inès avait murmuré, tout doucement mais si perceptiblement que le blond crut recevoir un coup de matraque en pleine tête, les larmes montèrent vite. Il les chassa d'un revers de main. « Il a le droit d'avoir le cœur brisé. »

« Mais on se remet tous d'un premier amour. T'es jeune, tu verras, le premier c'est pas forcément le bon. »

« C'est la bonne. » Mathieu se leva pour attraper un verre de vodka. « J'étais peut-être pas le bon pour elle mais elle, j'sais que c'est la bonne. » Inès manqua de lâcher un soupir devant tant de tendresses.

« Tu dis ça maintenant mais tu verras plus tard. » Antoine se leva pour tchecker Mathieu. « On doit y aller nous, tu devrais rentrer pour te reposer et voir ta grand-mère, elle m'appelle tous les deux jours en espérant que j'ai de tes nouvelles. »

Inès embrassa sa joue. « Si tu veux, on peut te ramener ? »

« Ca va, merci. »

Ils partirent tous les deux et Mathieu se laissa tomber dans son fauteuil, tournoyant sur lui-même tout en fixant son verre d'alcool. Il ne savait plus depuis combien de temps il avait hiberner dans son studio mais au vue des bouteilles vides, de son odeur corporelle et de ses racines brunes, cela faisait plusieurs semaines. Du moins, suffisamment pour que son manager et sa petite amie viennent jouer le duo de bon et méchant flics.

Inès réapparut dans l'embrasure de la porte, les lèvres pincées.

« J'ai dit à Antoine que j'avais oublié mes cigarettes. » Elle secoua son paquet devant lui tout en souriant. « Écoute, Mathieu... »

« Inès, c'est pas la peine. »

« J'suis pas de l'avis d'Antoine. » Elle entra pour s'appuyer contre le bureau. Lui, préféra admirer son verre plutôt que de la regarder. « J'vous ai jamais vu ensemble mais je t'ai vu toi, changer... Tu dis que c'est la bonne et j'veux bien te croire... même si j'crois qu'on a pas qu'une âme-sœur sinon ça serait bien triste... »

« Où est-ce que tu veux en venir ? »

« Peut-être que...peut-être que t'es le bon pour elle aussi ? Tu as dit moi-même qu'elle avait crié ton nom quand tu partais... » Inès secoua la tête, essayant de se motiver pour ne pas tourner autour du pot. « Bon, c'est peut-être parce que je suis une nana mais... et s'il y avait une raison pour qu'elle ai fait ça ? Peut-être un truc qui n'aurait rien à voir avec toi ? » Elle haussa les épaules. « Après tout, tu disais toi même qu'en Guadeloupe, elle avait déjà refusé de boire. »

« J'crois que t'as tes cigarettes. » Il se mit debout pour lui indiquer la sortie. « Merci Inès mais j'pense que Flav' va se poser des questions. »

« Fais attention à toi. »

Il acquiesça sans pour autant y croire et elle partit sans rien de plus. Il se sentit vide soudainement, encore plus que lorsque Lina lui avait balancé sa vérité. Il se décida alors à appeler une des personnes qui le connaissaient le plus.

Sa mère.

« Coucou Mathieu. » Sa voix était douce et enjouée. Elle était contente de l'entendre. « Comment tu vas ? » Il murmura un pitoyable ça va.« Quand est-ce que tu viens nous voir ? »

« Justement, je t'appelais pour ça... Est-ce que je peux passer l'été avec vous ? J'ai besoin de couper un peu de Paris. J'me ferai minuscule. »

« Bien sûr. » Il souffla de soulagement. « Léna sera contente de te voir. »

« Merci, maman. »

« J'dois y aller mon chéri, on se rappelle bientôt. Fais attention à toi. »

Il ne prit pas la peine de répondre avant de raccrocher.

Lina fit les cent pas tout en comptant dans sa tête répétitivement pour calmer son palpitant. La peur lui donnait des picotements dans les jambes si désagréable qu'elle manqua de chuter sur la marche du trottoir. Elle regarda encore une fois l'heure, il était temps d'y aller. Alors, elle s'approcha du bâtiment tout en jurant entre ses dents. Néanmoins, elle continua son chemin parce qu'elle n'avait plus rien à perdre et que son esprit devait enfin clôturer cette histoire.

« Bonjour, je m'appelle Lina Diaz. »

« Asseyez-vous là-bas, comme tout le monde. » L'homme ne releva pas la tête, écrivant sur ses papiers.

« Je viens pour l'affaire de Franck.... » Lina se rendit compte qu'elle ne connaissait même pas son nom de famille. « J'suis celle que vous recherchez depuis des mois. » Cette fois, il se mit à la regarder. « Je pense que je peux vous servir. »

Un deuxième homme s'approcha, un gobelet à la main. « Je m'en occupe. Venez avec moi Mademoiselle Diaz. » Il lui montra la machine à café d'un geste. « Un café ? » Elle accepta.

Elle l'attrapa, se réchauffant les mains tout en le suivant. « Merci. » Elle prit place en face de lui. La pièce était froide et inquiétante et elle eut une légère pensée pour Mathieu qui avait connu ces salles depuis jeune. C'était traumatisant et effrayant.

« On commence ? » Elle acquiesça.

« Qu'est-ce que je dois dire ? J'ai pas l'habitude... » Elle se gratta la joue, anxieuse. « Est-ce que je dois me présenter ou on passe directement à ce qui vous intéresse. »

« Je veux tout savoir Lina. Tu commences comme tu veux, je te poserai des questions pour approfondir. » Le policier but une gorgée de son gobelet.

« D'accord. Et bien... Je m'appelle Lina Diaz et j'ai vécu presque un an dans l'appartement de Franck. »

Rusted Souls [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant