ㅤ📃 CHAPITRE 10

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Elle avait hâte. Les mains tremblantes d'excitation, Céleste essayait d'oublier la fébrilité qui prenait son corps. Car bientôt, elle allait le revoir, le frapper de toutes ses forces et lui dire à quel point il l'avait manqué. Il méritait au moins les deux. Cassandre, lui, semblait dans le même état qu'elle, bien qu'il ne fût qu'heureux de retrouver son cadet. Il ne pouvait se départir de son sourire niais, tapotant machinalement la petite table près de lui tandis que sa sœur pianotait distraitement un piano pour s'occuper. Il émettait quelques sons désaccordés, avait soulevé un petit nuage de poussière lorsqu'on l'avait touché pour la première fois.

Le regard dans le vide de l'héritier se fit cependant interrompre lorsqu'un oiseau se posa près de la fenêtre, se mit à gazouiller un peu trop fort. En le voyant faire, il siffla en direction de la noiraude qui fut bien heureuse de jouer sa mélodie affreuse. Elle regarda une seconde le volatile, puis son frère qui se demandait ce qu'il lui voulait.

« Tu crois qu'il m'insulte ?
- Cui cui lui après, tu verras bien. »

Il darda un instant du regard sa sœur, se demandant si elle était sérieuse ou non. Mais devant l'air qu'elle avait, il ne put s'empêcher de rire. Épaules levées, un grand sourire aux lèvres, elle ressemblait soudainement à un personnage comique. C'était amusant, de la voir ainsi, une poussière posée sur ses cils sombres, à moitié assise sur le vieux siège du piano. La demeure où ils se trouvaient n'avait pas été visitée depuis quatre ans et encore moins entretenue. Et même si les deux noirauds avaient fait l'effort de passer un coup de balais, d'ouvrir les fenêtres et aérer les lieux, la pièce donnait l'impression d'avoir été abandonnée plusieurs décennies. Ce n'était pas leur faute, leurs parents avaient arrêté de venir ici, interdisant à leur progéniture d'y aller. Ils avaient donc bravé l'interdit en se retrouvant ici.

Finalement, ils décidèrent de migrer dans le jardin, là où le soleil pointait son nez et réchauffait une petite table. Elle avait été assiégée de feuilles mortes, que la cadette s'amusa à retirer avec une lenteur toute particulière. Elle voulait prendre son temps, puisqu'elle n'avait rien d'autre à faire.

« Tu sais qu'il ne sera là que dans quelques heures ? Au minimum.
- Pourquoi est-ce qu'il prend autant de temps !
- Pourquoi pas ?
- Sandre ! »

Ce fut son tour de lancer une œillade courroucée à laquelle son frère répondit en lui tirant simplement la langue. Dans un faux élan de compassion, il finit par lui expliquer que l'attendu avait, dans sa lettre, expliqué qu'il ne viendrait que dans le milieu de l'après-midi, le temps de profiter d'une nuit complète de sommeil bien méritée.

Soudain, alors que Cassandre essayait une nouvelle fois d'expliquer à sa sœur qu'ils ne pouvaient pas faire autrement, le hennissement d'un cheval se fit entendre. Ils levèrent leurs têtes en même temps en direction du bruit et de grands sourires apparurent sur leurs visages.

« Claude ! »

D'un bond, elle s'était levée de son siège et s'était mise à courir vers celui qui venait d'arriver, malgré sa longue robe qui semblait la gêner. Mais elle s'en moquait ; après toutes ces années, elle avait enfin ce qu'elle désirait tant. Le soldat, qui venait à peine de descendre de son cheval, se mit lui aussi à courir vers la demoiselle, arriva très vite à sa hauteur et la prit sans attendre dans ses bras. Un rire, puis un soupir de contentement se fit entendre. Elle lui avait manqué. Il s'écarta finalement d'elle pour la regarder, admirer à quel point elle avait changé.

« Qu'est-ce que tu as grandi !
- Ah ouais ?!
- Non, Claude, ne lui fais pas confiance, elle va te- ! »

Cassandre n'eut pas le temps de finir sa phrase, à peine le jeune homme s'était-il éloigné de sa sœur qu'une main rencontra violemment sa joue. Sonné, Claude recula une seconde, alors que son aîné rejoignait le duo. Il souffla, tapa l'épaule de Céleste qui ne fit que ronchonner, et se mit à la hauteur du « blessé ».

« J'ai essayé de t'avertir.
-Et tu en mériterais même une deuxième, tiens ! »

Poings sur les hanches, Céleste regardait le soldat. Il ne prononça aucun mot, baissa tête. Un « je suis désolé » franchit ses lèvres, alors que le plus âgé grondait sa sœur du regard. Finalement, elle se rapprocha des deux garçons, frappa leurs dos dans un soupir théâtral.

« Ça, c'était pour nous avoir abandonné avec Sandre. Parce que, vraiment, tu nous as laissé dans une belle merde. Mais maintenant que j'ai fait ce que je devais faire, on peut s'embrasser parce que, mine de rien, tu m'as un tout petit peu manqué. »

Aussitôt dit, aussitôt fait, frères et sœur se prirent tous les trois dans les bras l'un de l'autre, même si Claude craignait tout de même une nouvelle gifle de la part de sa sœur. Ou pourquoi pas de Cassandre ?

« Si tu m'avais dit que c'étaient des retrouvailles avec ta famille, je ne t'aurai pas accompagné.
- Merde, c'est vrai. »

Le soldat se détacha de sa fratrie, sourire gêné aux lèvres. Puis, il se décala d'un pas, dévoilant une autre personne qui était restée près des chevaux. Sandre et sa sœur comprirent que leur frère n'était pas venu seul les voir et qu'ils rencontraient pour la première fois un des amis du benjamin.

« Cassandre, Céleste, je vous présente Levi. J'avoue qu'il n'était pas prévu pour la journée mais je n'avais pas envie de le laisser seul au quartier général alors qu'il aurait pu passer un bon moment avec nous ! »

L'arrivée du nouveau venu déclencha presque immédiatement un froncement de sourcils de la seule fille du quatuor. Qu'est-ce qu'il venait faire là ? Elle échangea un regard étonné avec l'héritier ; au moins, il n'était pas au courant. Puis, elle se mit à toiser cet inconnu qui avançait vers eux d'un pas lent. Était-il timide ? Non, il n'en avait pas l'air. Il devait sûrement vouloir retarder ce moment, tout autant que la noiraude. Il arriva enfin à leur hauteur et sa main se tendit directement vers le plus âgé, pour le saluer correctement. Ce dernier s'en saisit sans se faire prier, un sourire amical aux lèvres.

« Désolé de perturber vos retrouvailles.
- Oh, ne t'en fais pas, ça nous fait plaisir de rencontrer un ami de Claude. Pas vrai Cæl ?
- Je suis ravie de faire ta connaissance. »

Un instant, il ne sembla pas comprendre l'ironie qui avait dépassé ses lèvres. Pourtant, elle lui faisait clairement comprendre qu'elle n'acceptait pas sa présence, qu'elle ne voulait pas de lui ici et qu'il aurait mieux fait de ne pas venir. Il soupira, préférant visiblement ne pas relever sa visible hostilité. Pire, il sonda du regard son camarade qui haussa ses épaules, avant de souffler un « elle est pas très sociable, t'inquiète pas ». Céleste eu envie, à cet instant, de frapper à nouveau son frère mais cette idée mourut quand elle croisa le regard de ce Levi. Ses yeux brillaient, pas de larmes ou d'amusement, mais plutôt d'une sorte de fébrilité qu'elle avait déjà vu chez Becca.

« Céleste, tu pourrais montrer à Levi l'enclos pour les chevaux ? Faudrait leur donner de l'eau, aussi.
- Pourquoi c'est à moi de le faire ?
- Pourquoi p-
- Parce que je dois parler avec Cassandre d'une chose importante. On vous retrouvera là-bas si vous mettez trop de temps. »

La noiraude tiqua. C'était quoi, ces retrouvailles ? Elle voulait bien croire que Claude était un peu fâché pour la claque, bien qu'il la méritait terriblement, mais il n'avait pas le droit de l'exclure ainsi ! Surtout pour rester avec ce soldat ! Mais en voyant Cassandre hocher sa tête vers elle, elle accepta et se décida à guider Levi jusqu'aux fameux enclos où étaient déjà leurs propres chevaux. Heureusement pour elle, il n'avait pas l'air très bavard et cela l'arrangeait plutôt bien. L'adolescente n'avait rien à dire à cet inconnu et encore moins envie de faire ami-ami avec lui. Lui non plus, visiblement. Il n'arrêtait pourtant pas de lui lancer de temps en temps un regard, comme s'il observait ses traits avec attention.

« J'ai quelque chose sur le visage ?
- Je me disais seulement que tu avais le même air que ton frère.
- Ce qui veut dire ?
- Vous êtes des nobles même dans votre façon de respirer. »

L'envie de lui faire goûter son poing la démangea mais elle savait que c'était une très mauvaise idée. Mais elle ne rétorqua pas, tandis qu'elle attrapait les rênes d'un des chevaux et que lui prenait les autres. Elle n'avait pas envie de perdre son temps dans une joute verbale. Pire, elle savait qu'elle arriverait à la perdre face à lui. Il semblait capable de la faire sortir de ses gonds à n'importe quel moment, sans même y prendre le moindre plaisir. Et ça l'effrayait légèrement, de se dire qu'il y avait visiblement quelqu'un sur cette terre capable de l'énerver aussi facilement et rapidement. Elle ne le connaissait pas, pourtant. Ils arrivaient déjà à l'ancien enclos, qui ressemblait aujourd'hui plus à un grand champ sauvage qu'autre chose. Mais au moins, les barrières avaient tenu et les abreuvoirs semblaient encore être en bon état.

« Je suis désolé, sincèrement. Si j'avais su que ton frère venait vous voir, je ne serai pas là.
- Claude est imprévisible, ça m'aurait étonnée qu'il ne nous fasse pas un coup foireux de ce genre. Enfin... Il y a la rivière plus loin, allons chercher de l'eau. »

Finalement, elle en voulait plus au brun qu'à cet inconnu qui semblait, l'espace d'un instant, réellement navré pour ce revirement de situation. Mais Céleste savait que ce n'était pas de sa faute et que son frère avait voulu bien faire en lui demandant de venir. Un instant, elle se dit que s'il était là, c'était car il n'avait pas de famille à visiter. Ils arrivèrent jusqu'à une sorte de ruisseau où d'anciens seaux demeuraient, attendant d'êtres utilisés à nouveau. La noiraude s'en saisit sans faire attention au soldat et se rapprocha du bord, avant de le remplir avec précaution. Le sol était légèrement glissant et en pente, parfait pour une glissade improvisée dans la presque boue.

« Et je suis désolée d'avoir été aussi hostile, ce n'est pas ta faute si la situation est ainsi. »

Elle l'entendit souffler du nez dans son dos et alors qu'elle se retournait pour retourner à l'enclos, elle vit une main tendue dans sa direction. Est-ce qu'il était en train de l'aider ? Sans réfléchir, elle l'attrapa et le remercia. Un instant, elle se dit qu'elle l'avait mal jugé et n'était peut-être pas si « mauvais » que ce qu'elle avait cru au départ. Il lâcha sa main aussi vite qu'il l'avait attrapée et commença à partir, retrouvant les pas qu'ils avaient fait quelques minutes plus tôt.

« Je te demande pardon pour mon comportement. Je pourrai t'apprécier, en réalité. J'avoue que je n'ai pas envie de te haïr. »

Il tourna sa tête vers elle, semblant réfléchir quelques secondes à ce qu'elle disait là. Puis, il la hocha de haut en bas.

« Je pense qu'en effet, nous pouvons apprendre à nous fréquenter. Surtout si je dois revenir. »

la fratrie fosten est réunie ! ça se fête ! certes, les retrouvailles n'ont pas été les plus joyeuses du monde mais elles sont là et c'est déjà très bien !

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la fratrie fosten est réunie ! ça se fête ! certes, les retrouvailles n'ont pas été les plus joyeuses du monde mais elles sont là et c'est déjà très bien !

et on a aussi la première apparition de levi ??? depuis le temps, il est enfin là aha

je n'ai pas grand chose à dire sur ce chapitre, mis à part qu'il me plaît assez même si je vois déjà des points que j'aimerais améliorer un de ces quatre

en attendant, j'espère que ce chapitre vous a plu et vous dit à dimanche !

DANSE À TROIS TEMPS ET MOTS EFFACÉS | levi x oc - T1 & T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant