ㅤ📃 CHAPITRE 18

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Pendant tout le trajet vers leur maison, Cassandre réfléchit. Que devait-il faire ? Depuis que Céleste et Connor s’étaient fiancés, tout allait vite dans sa tête. Il avait bien compris en voyant le regard de sa sœur : elle acceptait malgré le sort qu’il lui avait imposé et elle n’allait plus s’en plaindre. Peut-être qu’elle aspirait à autre chose, dans sa vie mais semblait désormais abandonner une nouvelle fois ces maigres ambitions pour se plier encore un petit peu plus aux attentes.
 
Est-ce que Levi savait ce qui la tourmentait ? Est-ce qu’elle lui faisait assez confiance pour lui raconter ce qu’elle avait sur le cœur, lui chuchoter les rêves qu’elle nourrissait peut-être encore aujourd’hui ?
 
Cette question devenait de plus en plus accablante dans l’esprit du noiraud. Quelle relation entretenaient ces deux là, de quelle manière se comportaient-ils lorsqu’ils n’étaient pas observés ? Est-ce que la demoiselle le voyait plus que comme un ami ? Il ne savait pas réellement, s’inquiétait d’apprendre la vérité. Et si elle l’aimait ? C’était impossible, ils ne se connaissaient pas assez, mais peut-être qu’un jour…
 
Le retour de Céleste et Cassandre ne passa pas inaperçu. Cela était normal, ils rentraient à une heure absolument inacceptable. Et si la noiraude avait de la chance parce qu’elle était restée endormie, ce n’était pas le cas du grand frère qui subit sans rechigner le regard énervé de Charles-Henry. Ce dernier toisa son fils et le suivit dans les couloirs alors qu’il partait déposer sa sœur dans sa chambre. Elle fut prise en charge par sa dame de chambre qui avait été réveillée à leur arrivée, qu’elle soit au moins débarbouillée avant d’être installée dans ses couettes.
 
Lorsque le père et le fils se retrouvèrent seul à seul dans le couloir, un silence pensant s’installa avant d’être interrompu par le plus âgé.
 
« Je peux savoir ce que vous faisiez ?
— On n’a pas pu partir avant que la pluie ne s’arrête. Si je suis trempé c’est parce que ma jument s’est enfuie, j’ai dû la rattraper…
— Et c’est pour ça que j’aurai dû vous obliger à prendre le carrosse. Dès le départ. J’ai été trop naïf.
— Père, tout va bien. C’est la première et dernière fois que nous arriverons en retard, je vous l’assure.
— Fais attention à tes promesses, Cassandre, certaines se retournent déjà contre toi. »
 
Le jeune homme prit la réflexion à cœur, alors que son père se massait les tempes. Est-ce qu’il faisait confiance à ses enfants ou qu’il se faisait vieux et moins regardant ? Ce n’était pas normal qu’il laisse les choses se passer aussi sereinement pour le frère et la sœur.
 
« Va te coucher, nous en reparlerons demain.
— Bonne nuit, père. »
 
Pas de réponse. C’était habituel.
 
Cassandre se dirigea alors vers sa chambre à pas de loup. Il ne voulait déranger personne, aller se coucher le plus vite possible. Mais sur son chemin, il croisa quelqu’un qu’il n’avait pas vu depuis longtemps ; un instant, l’héritier resta figé devant sa mère. Elle qui n’était pas sortie de sa chambre depuis des années, ne s’était même pas donné la peine de voir l’anniversaire de sa fille, se trouvait ici ? Elle semblait d’ailleurs attendre le noiraud puisque quand elle le vit, elle tendit sa main vers lui.
 
« Mère ? Que faîtes-vous là ? Vous n’êtes pas censée être en train de vous reposer ?
— Je vais bientôt y aller. Mais avant, je voulais te parler. Est-ce possible ?
— Bien évidemment. »
 
Entre ses maladies à répétition et son caractère réservé, Frieda n’était pas une femme qui avait accordé beaucoup d’attention à ses enfants. Et si elle se montrait quelque peu affectueuse à l’époque, elle n’osait presque plus les regarder depuis que Claude était parti.
 
Cassandre ouvrit la porte de sa chambre et invita sa mère à y entrer. Cette dernière resta debout dans la pièce, regarda la décoration sobre qu’il avait installé. Elle découvrait les quelques tableaux qu’il avait peint, remarqua la boîte sur son bureau, ouverte et offrant à la vue de tous les lettres qu’il échangeait avec sa fiancée…
 
« Que vouliez-vous me dire ?
— Est-ce vrai que tu as précipité les fiançailles de ta sœur ? »
 
Il n’y avait aucune remontrance dans sa question, seulement une curiosité qui allait à coup sûr mener vers d’autres interrogations. Cassandre se décida à répondre honnêtement.
 
« Oui.
— Pourquoi ?
— Eh bien…
— Était-ce pour voir Claude ?
— Quoi ?
— Je suis au courant que tu échangeais des lettres avec lui, avant. J’ai eu ouïe dire que votre correspondance avait été détruite mais je sais tout de même qui sont mes enfants. Je me doute bien que tu as continué de lui écrire et que tu as tenté de le rencontrer. Et si je l’ai deviné, ton père l’a aussi compris. Vois-tu où je veux en venir ?
— Non. À quoi cela vous sert il de me dire tout cela ?
— Cassandre, mon fils, tu es intelligent. Tu sais que ton père est au courant que deux fois par mois, vous vous en allez retrouver Claude et que vous passez du temps avec lui. Et si ces actions sont tolérées, c’est parce qu’elles ne dureront pas. Toi, tu finiras par t’ennuyer de ton frère, tu n’auras bientôt plus de temps à lui consacrer. Et Céleste, elle sera dans une nouvelle famille, n’aura même plus le droit de venir te voir sans demander la permission à son époux. Et penses-tu qu’elle l’aura, cette permission ? Charles-Henry n’attend que deux choses, que Claude périsse et que Céleste s’en aille.
— Une nouvelle fois, mère, je ne comprends pas pourquoi vous me racontez tout cela, je n’en vois pas l’utilité.
— Je sais que je n’ai pas été une bonne mère. Que je vous ai abandonné. Mais, malgré tout, je garde un certain amour pour vous. Une affection toute particulière. Et j’ai déjà perdu un enfant, je ne veux pas qu’un autre disparaisse alors que j’ai la possibilité de faire quelque chose. Cassandre, je t’en prie, il faut faire annuler les fiançailles de ta sœur.
— Quoi ?
— Toi, tu aimes ta fiancée. Tu t’es pris d’affection pour elle et tout le monde ici sait que tu as hâte de la rencontrer. Mais qu’en est il de Céleste. Penses-tu qu’elle sera un jour heureuse aux côtés de Connor ? Tu penses connaître ce garçon mais moi je connais son père. Et je sais comment il élève son fils, ce qu’il lui murmure à l’oreille. Et je ne veux pas que ta sœur subisse ce que la mère de ce garçon a vécu. Je ne peux pas abandonner mon dernier enfant à ce sort, je préfèrerai la savoir dans les montagnes, à survivre par ses propres moyens. »
 
Le ton ferme de Frieda surprit Cassandre. Jamais il n’avait vu sa mère aussi sûre d’elle et, une seconde, il vit le visage de sa petite sœur. Malgré leurs différences physiques, les deux femmes se ressemblaient énormément et il se dit alors que cela jouait un rôle dans les propos de sa mère.
 
Dans tous les cas, elle avait raison et le noiraud s’en doutait bien. Mais comment faire pour annuler des fiançailles ?
 
« Je sais que tu te demandes comment faire. Écoute-moi, il y a plusieurs possibilités. Tu dois les décider avec ta sœur.
— Quelles sont-elles ?
— Trois options. La faire disparaître, la rendre inaccessible, arrêter les Tinnend. La première et la deuxième options sont compliquées, il faudrait qu’elle accepte de totalement bouleverser sa vie. Mais la dernière est possible. Il faut simplement que vous trouviez quelque chose qui déshonore suffisamment les Tinnend pour que même ton père refuse de s’allier à eux.
— Est-ce seulement possible ? N’est-ce pas plus simple de cacher Céleste quelque part ?
— N’impose pas cela à ta sœur. Laisse-la choisir ce qui lui semble le plus juste. »
 
La situation n’arrangeait pas Cassandre. Devoir attendre que Céleste décide d’elle-même ce qu’il valait mieux faire était une perte de temps dont il aurait aimé se passer mais sa mère avait raison ; il ne pouvait pas lui imposer de telles conséquences sans même lui demander son avis. Il l’avait déjà fait et voilà le résultat…
 
« Est-ce que l’armée pourrait être un bon moyen ?
— Sûrement, oui. Beaucoup y sont envoyés pour se faire oublier, tu peux toujours y réfléchir. »
 
Frieda regarda son fils droit dans les yeux, avant de poser sa main sur sa joue.
 
« Mon fils, tu as bien grandi. Et même si je ne suis pas là, je sais qui vous devenez et j’en suis fière. Malgré tout, vous vous transformez en adultes au grand cœur et je ne peux en être que ravie. Garde seulement ceci à l’esprit, mon fils : n’oublie jamais d’où tu viens. Tu es un Fosten, la gloire d’une famille noble et brillante, fier et respectable. Personne ne peut dicter ta vie et seul toi peut décider qui tu seras au final. »
 
Ce furent ses dernières paroles. À peine eut-elle fini de parler qu’elle s’en alla d’elle-même, laissant son garçon les bras ballants dans la chambre.
 
Cassandre n’avait jamais été proche de sa mère, encore moins de son père, mais il avait eu l’impression à cet instant même de l’avoir toujours connue. Étrangement, ses mots l’avait réconforté, lui avait donné un nouveau souffle. C’était inespéré, inattendu, et il ne pensait pas que les choses se dérouleraient ainsi. Mais avait-il vraiment le droit de s’en plaindre ?
 
L’esprit plus tranquille que quelques heures plus tôt, le jeune homme partit se coucher.
 
Lui qui avait passé toute son après midi à se plaindre auprès de son frère que Céleste était encore fâchée, qu’elle s’était beaucoup trop rapprochée de Levi et qu’il ne lui faisait pas confiance, quelque chose s’était réparé dans son cœur. Il avait la certitude qu’il pouvait faire quelque chose pour arranger la situation, pour se battre comme il l’avait promis à sa sœur.
 
Pour lui prouver que lui aussi pouvait la défendre.
 
Certes, il était toujours incertain de ce qu’il fallait faire, se méfiait toujours du soldat qui accompagnait constamment Claude, se demandait si les choses allaient réellement s’arranger mais il essayait de garder espoir.
 
Et puis, au pire, il y avait toujours la solution de l’armée. Là bas, Céleste serait en sécurité, pourrait être soutenue par un autre frère et un ami. Oui, il y avait des solutions, des idées qui pouvaient résoudre au moins partiellement toute cette histoire.
 
Cassandre s’endormit alors l’esprit tranquille, certain que la nuit lui porterait conseil.

oui, cassandre et céleste ont une mère, je sais, je sais, tout le monde avait oublié son existence ;

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oui, cassandre et céleste ont une mère, je sais, je sais, tout le monde avait oublié son existence ;

ne vous attachez tout de même pas à frieda, elle ne reviendra plus, j'espère que cette brève apparition vous a suffit ;

est-ce que ça sent le faisan ? totalement ; est-ce que j'ai honte ? non ;

la partie I approche de la fin et plus on y avance, plus ça pue la merde et ça, c'est beau ; promis, cassandre ne va plus faire de bêtises, il a compris qu'il était couillon ;

mis à part ça, j'espère que vous aussi avez aimé ce chapitre ! à votre avis, qu'est-ce que va faire notre cassandre national ? va-t-il obliger céleste à agir ? va-t-elle prendre les choses en main par elle-même sans prévenir les autres ? la réponse dans les prochains chapitres aha

DANSE À TROIS TEMPS ET MOTS EFFACÉS | levi x oc - T1 & T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant