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Lina caressa du bout des doigts le visage rond de Luisa. Cette dernière avait grandi et ne ressemblait plus à un poupon mais à un bambin, souriante et aux yeux brillants. Dire qu'elle lui avait manqué serait réduire le sentiment qui s'était installé dans sa poitrine. Toutefois, en la revoyant, une autre douleur se créa parce qu'elle avait peu de chance de vivre ce moment avec son propre bébé.

Lucie lui tendit un cocktail maison avant de s'asseoir sur le fauteuil en face. Elles étaient dans l'appartement de celle-ci depuis quelques minutes déjà et la tension entre elles semblaient impossible à réduire.

Pour sûr, c'était la dernière tentative de Lina. Elle rentrerait auprès de Mathieu. Peu importe la réussite ou non.

« Elle est toujours aussi adorable. »

« T'en as fait le deuil ? » La brune releva le menton pour la regarder. « De pas pouvoir être mère, j'veux dire. » Elle ne répondit pas, se replongeant dans les prunelles de la petite fille pour y trouver un réconfort. Inès n'était pas encore arrivée, le travail la retenant, et Lina regretta de ne pas l'avoir attendue avant de venir ici. « Tu bois pas ton verre ? »

« Si bien sûr. Merci. »

Elle trempa ses lèvres. Elle avait le pressentiment que quelque chose allait arriver et le regard noir de son ancienne meilleure amie ne l'aidait pas. Finalement, face à son insistance et à cause de la peur qu'elle lui engendrait, elle céda et but plusieurs gorgées avant de reposer sa boisson sur la table basse. Elle se concentra de nouveau sur Luisa pour éviter toute conversation. Elle n'avait plus aucun coup à jouer, peu importe ce qu'elle faisait Lucie arrivait toujours à esquiver les questions et remarques comme si elle savait depuis le début ce qu'elle essayait de faire.

Alors qu'elle regardait son téléphone pour voir l'heure, sa vue commença à se troubler. Elle fronça les sourcils et plissa les yeux mais rien n'y faisait. Elle tenta de se mettre debout, l'envie soudaine de vomir prenant son estomac. Toutefois, un vertige attaqua tous ses sens et elle s'écroula sur le canapé.

« J'me sens pas très bien. » Elle essuya son front du dos de la main. « J'ferai mieux de rentrer. »

« Allonge-toi plutôt. »

Lucie quitta son fauteuil pour l'obliger à s'étendre. Lina n'eut la force de lutter. Elle ferma les yeux, se recroquevillant sur elle-même pour se protéger avant d'être incapable de bouger. Elle balbutia quelques mots incompréhensibles mais l'autre jeune femme était déjà dans la cuisine, humidifiant un torchon et servant un verre d'eau.

« J'te déteste tellement. »

Tw
Elle l'essora sur la tête de la brune qui n'eut la force de s'éloigner. Peu importe ce qu'elle avait mis dans son verre, cela faisait effet.

« T'as tout gâché et c'est pas parce que t'as quitté ton putain de mec que je vais te pardonner. Et putain, qu'est-ce que tu peux être conne pour m'avoir fait confiance. T'es vraiment décevante du début à la fin. » Elle étendit le tissu sur le visage de Lina avant de verser quelques gouttes d'eau, la laissant suffoquer. « Tu pensais que je n'oserai pas ? J'attends ça depuis des mois. Tu m'as tout pris, tout. »

Elle essaya de se débattre mais Lucie lui attrapa les poignets et de toute manière elle était si faible et effrayée qu'aucun geste n'était suffisant pour retenir le torchon. Ses cris firent pleurer Luisa mais sa mère ne s'en préoccupa, continuant de verser lentement le reste du verre d'eau tout en l'immobilisant. La respiration de Lina était courte et douloureuse. À chaque inspiration, elle avait l'impression de se noyer alors elle se mit à la supplier de tout son être, tout en étant secouée par des sanglots de panique.
Heureusement pour elle, Inès toqua enfin à la porte, mettant fin à son calvaire.

Fin TW
« T'as de la chance. Je commençais tout juste à m'amuser. » Lucie plia le torchon pour le poser sur le front de Lina comme si elle prenait simplement soin d'elle. Elle fouilla dans son sac à la recherche de son téléphone. Elle supprima l'enregistrement audio. « Et franchement, tu pensais que je n'avais pas vu ton portable toujours posé près de moi et tes questions à la con, sérieusement Lina. » Elle attrapa Luisa pour la calmer et partit ouvrir la porte. « Mon dieu, Inès.. contente que tu sois là.. je sais pas ce qu'à Lina mais elle délire complètement... elle bouge pas et elle crie dans tous les sens ! Elle fait sûrement une crise d'hystérie ou un truc du genre. »

La jeune femme se précipita vers son amie. « Merde Lina, ça va ? »

« Elle sait. » Elle murmura faiblement.

Inès se releva, son cœur tombé dans son estomac. « J'vais la ramener. »

« Elle peut rester ici, t'inquiète pas, j'peux m'occuper d'elle. »

Elle secoua la tête, les larmes aux yeux, rangeant les affaires de son amie. Elle passa le bras de Lina au dessus de ses épaules avant de la porter, priant pour qu'elle fasse un dernier effort jusqu'à l'extérieur. Elles partirent sans un mot de plus tandis que Lucie souriait. Inès lâcha la jeune femme sur le trottoir quelques mètres plus loin, épuisée de la porter et incapable de faire un pas de plus. Elle commanda un uber avant de s'asseoir à ses côtés, la laissant se reposer contre elle. Et, alors qu'elle pleurait elle-même, elle la berça tout en lui susurrant des mots réconfortants. Elle dut tenir sa tête tant Lina était submergée par la drogue et l'émotion.

« Reste éveillée, s'il te plaît. » Elle embrassa sa tempe. « Qu'est-ce que t'as pris ? »

« C'était dans mon verre. »

« Putain mais merde. C'est vraiment une... conne psychopathe. Tu veux qu'on aille aux urgences ? » Elle secoua la tête. Elle voulait juste s'allonger, dormir, oublier. « Alors reste éveillée parce que je flippe à mort. »

La voiture arriva enfin et elles montèrent avec difficulté à l'intérieur. Inès envoya un texto à Antoine pour qu'il les attende en bas de l'appartement, certaine que si elle continuait toute seule, Lina finirait par tomber au sol. Et ça serait sûrement un petit peu trop pour la soirée, déjà qu'elle n'avait aucune chance de dormir, son amie tapotant sa joue dès qu'elle osait se détendre un peu.
Elles arrivèrent enfin et, comme prévu, le producteur était en bas du bâtiment. Il ouvrit la portière et ne put retenir sa surprise en voyant la tête de la brune, blafarde, les cheveux trempés et les yeux clos. Il lui demanda d'entourer son cou mais elle était complètement amorphe alors il la porta.

« Emmène la sur le canapé. Il faut pas qu'elle dorme. »

« Elle est épuisée. »

« J'm'en fous Antoine. » Il lui fit les gros yeux, surpris de son langage. « J'ai trop peur qu'elle se réveille pas. Je sais pas ce qu'elle lui a donné, je sais pas ce qu'elle lui a fait. » Il la laissa alors dans le salon avant de la scruter. « J'aurai jamais dû la laisser y aller seule. Je lui ai dit de m'attendre mais j'aurai dû quitter le boulot avant.» Il attrapa la nuque de sa petite amie pour l'approcher et l'enlacer.

« C'est pas ta faute. »

« C'est qu'une gosse. » Elle secoua la tête, se détachant de lui pour essuyer ses larmes. « Regarde-la. C'est qu'une gosse qui veut vivre une vie normale. On a échoué. »

« Non, on n'a pas échoué parce que c'est pas terminé. » Il embrassa sa tempe. « J'reviens. J'ai une course à faire. »

Golden Souls [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant