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Mathieu verrouilla la porte derrière lui et laissa en même temps sa carapace. Il souffla tout en regardant sa main douloureuse. Celle-ci était bleutée et œdémateuse. Lina n'eut le temps de s'en approcher que tous leurs amis se précipitaient vers eux, inquiets mais surtout soulagés de les voir enfin rentrer. Antoine raccrocha son téléphone avant de venir vers eux, bien plus en colère que les autres. Ils avaient trop pris l'habitude des drames dans le couple pour ne pas s'attendre au pire.

« Vous étiez où putain ? J'ai essayé de t'appeler et je tombe sur ta messagerie à la con ! »

« On s'est fait arrêter. » Le blond cacha sa main dans son dos alors que Lina prenait leur défense. « Alors on pouvait pas répondre. Et si tu as envie de râler par rapport au live, fais le demain, s'il te plaît. On a eu notre dose. »

« Calmé direct ! » Inès apparut derrière son petit ami, pouffant face à sa tête. « Bonne nuit vous deux. »

Lina n'attendit pas plus pour se diriger vers les escaliers et s'effondrer dans le lit. Mathieu arriva quelques secondes après et ferma doucement la porte pour s'y appuyer. Il scruta la brune qui était encore accoutrée de sa tenue de soirée mais qui s'était déjà renfrognée dans son oreiller. Il avait eu si peur qu'il eut besoin de s'assurer qu'elle respirait, qu'elle était toujours là, indemne. Toutefois, en l'entendant avancer, elle revint à la réalité et se redressa. Elle le rejoignit avant même qu'il ne fasse un nouveau pas. Elle essaya de prendre sa main mais une nouvelle fois, il l'esquiva.

« Mathieu. »

« J'ai besoin d'une douche. » Elle attrapa sa manche avant qu'il ne s'éloigne. « Tu viens avec moi, non ? »

« Je veux voir ta main. Tout de suite. » Il jugea le niveau de tension et lui tendit finalement. « Tu croyais que t'allais pouvoir me cacher ta blessure jusque quand ? T'es vraiment... »

« ...adorable et sexy. »

« Chiant. Quand t'es comme ça... t'es chiant. » Il pencha la tête, elle n'avait pas tort mais il savait qu'elle s'inquiéterait et il n'avait qu'une seule envie, taire le sujet parce que cet événement était pour sûr un des plus traumatisants pour lui, pas pour lui-même et la mobilité de sa main mais pour ce qui pouvait arriver à Lina et le petit haricot dans son ventre. Il ne voulait pas d'un autre drame, pas après tout ce qu'ils avaient subi. « Bouge-la. » Il le fit tout en grimaçant. « On dirait que t'as une main de bibendum. »

« Merci pour le diagnostic, infirmière. » Elle le poussa tout en soufflant, aucunement amusé cette fois. « J'ai le droit à ma douche ou tu dois encore m'embêter ? »

« Il faudra que tu fasses une radio. »

Il ne répondit pas et tira seulement sur son bras pour qu'elle vienne dans la salle de bain. Il alluma le jet avant de retirer ses vêtements et de se faufiler dans le douche. Lina resta immobile, le regardant faire, frustrée de le voir encore se renfermer. Il ouvrit les yeux en ne la sentant pas contre lui. Il passa une tête au-delà de la vitre de protection pour l'interpeller.

« Qu'est-ce que tu attends ? »

« On va pas en parler. » Il se pinça les lèvres. « Tu veux pas en parler mais pourtant depuis toute à l'heure, t'es en train de te monter la tête. Et moi, j'ai besoin d'en parler. »

« Viens. » Elle souffla et retira sa tenue pour le rejoindre. Il l'emmena dans ses bras et caressa ses cheveux rapidement trempés tout en embrassant son front. « Je crois que si j'en parle, si je mets des mots, j'vais peter un câble. » Il attrapa le shampoing sans quitter sa peau. « Tout ce qui compte c'est que tu ailles bien. »

« Que nous allions bien. » Son ton était ferme. Elle détestait la manière dont il gérait cette situation. Il ne verbalisait rien, s'enfermant comme toujours. Pourtant, elle avait toujours été d'une écoute attentive. « Bah moi... moi, j'ai vraiment eu peur. Le policier voulait absolument que je dise que tu me faisais du mal ou je ne sais quoi. Il voulait nous arrêter, t'embarquer et leur donner raison... sûrement pour démentir tes propos. » Elle le sentit retenir un soubresaut de sa cage thoracique. Il allait craquer et parler, finalement.

« C'est de ma faute. » Il avait murmuré d'une voix enrouée alors elle se retourna pour le voir, espérant que son regard plein d'amour lui permettrait de se confier. Elle attrapa le gel douche pour masser ses épaules et son buste. « J'aurai pas dû dire ça mais j'étais en colère. Malgré toutes les réussites et tous les accomplissements, j'ai pas confiance en moi. Mais encore une fois, c'est toi qui paye. » Elle se pinça les lèvres, se retenant de le contredire. Elle voulait qu'il parle, qu'il extériorise pour peut-être passer à autre chose parce qu'au fond, le problème ce n'était pas les réseaux mais la manière dont ça le touchait. « J'ai l'impression d'avoir un boulet à ma cheville et j'essaye de courir vers mon avenir mais le passé et ses conneries me retiennent. Ça devrait plus me toucher ce qu'on peut dire. »

« C'est pas si simple, bébé. » Elle remonta ses mains sur ses bras, son cou jusqu'à prendre son visage en coupe. Il n'avait plus le choix de se plonger dans son regard. « Mais tu vois, de ce que j'ai appris de mon propre passé, c'est qu'on oublie pas et qu'il vaut mieux en faire une force plutôt qu'une faiblesse. C'est dur de le faire mais ça marche. Et.. regarde...le fait que tu n'aies jamais eu beaucoup d'argent et que tu aies dû tout faire pour en trouver, t'as permis de connaître sa valeur. Le fait que... que tu aies eu une enfance difficile avec des parents peu présents, tu sais que l'amour et l'affection sont indispensables pour un enfant... »

« ...Ok tu veux pas incruster ta petite voix dans ma tête ? »

« Je répète quand tu veux. » Elle embrassa ses lèvres et il attrapa son cou pour prolonger. « Parce que j'y crois à cent pour cent. Et pour tout. » Elle posa son index contre son menton pour le retenir de s'approcher pour un nouveau baiser. « Par contre tu gardes un défaut. J'ai vraiment besoin que tu t'exprimes. Même si c'est difficile parce que moi, je le fais avec toi. »

« J'le fais un peu plus. Nan ? »

« Oui, bien sûr, mais j'ai l'impression que t'es pas assez confortable avec moi pour être vulnérable. »

« Lin... »

« J'te le dis juste. » Elle haussa les épaules. « Je t'aime pour qui tu es, entier. Et je n'ai pas peur de ce que tu peux ressentir ou penser. » Elle déposa sa bouche sur sa joue, longuement, cherchant un moyen d'alléger leur humeur. « Après tout j'entends tes pensées salaces tous les jours et je n'ai pas pris la fuite, au contraire. »

« Promis, je vais faire un effort. »

Golden Souls [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant