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Alma

Sept ans plus tôt

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Malgré mes réticences et la peur de le revoir après son attitude odieuse l'an dernier, me voilà quand même en plein milieu de la soirée hivernale de la Villa des Quatre Saisons, complètement sobre, en train de courir à la recherche d'une cachette digne de ce nom. La blonde aux cheveux frisés, la petite copine du pote de lycée de Riley, dont je ne me souviens pas de son prénom, s'affaire à compter dans les toilettes. Un cache-cache géant, avec comme unique règle, rester dans la maison. À chaque manche, la première personne trouvée rejoindra cette fille pour un nouveau décompte. En gros, cela devrait rapidement finir en énorme chasse à l'homme.

Je m'engouffre dans la chambre des parents de Will, mais je n'aperçois aucune planque et surtout aucune armoire. Le décompte touche bientôt à sa fin et je ne sais toujours pas où me cacher, en réalité, j'ai trop peur de tomber sur lui. « Cinq. » Je marche à pas feutrés dans le couloir. « Quatre. » J'avance jusqu'à l'entrée. « Trois. » J'ouvre délicatement la porte du placard dérobé sous l'escalier. Un placard, un cagibi ou une armoire, c'est un peu pareil au final. « Deux. » J'entre et je me glisse entre les manteaux. « Un. » Je referme la porte avec la même douceur. « J'arrive. » Je prends une barrette de mes cheveux et munie de cet outil improvisé, je tourne la serrure depuis l'intérieur, verrouillant l'issue.

Je me laisse couler au sol pour m'asseoir contre le mur, gardant la sortie à ma gauche. Je déplace des objets que j'aplatis avec mes fesses, le tout dans une obscurité parfaite. Je suis introuvable de toute façon, alors, je réajuste les manteaux, histoire de les dégager de mon visage pour avoir moins chaud. Je me fige quand je perçois des pas dans le couloir. Je retiens mon souffle en entendant les talons de cette blonde approcher vers ma planque. Soudainement, un coup violent s'abat sur la porte qui tremble, et me fait sursauter.

Je présume avoir crié, mais presque en même temps, une main étouffe le son de ma bouche. Cette fois-ci, je crois bien que je meurs de peur. Il y a quelqu'un dans le placard, bordel de merde ! J'attaque de toutes mes dents la paume chaude qui me bâillonne afin de tâcher de me libérer, mais alors, il presse son corps contre le mien, à moitié assis sur moi. Je le mords encore et il étouffe un grognement tout près de mon visage. La blonde dans le couloir frappe une nouvelle fois sur les planches, tente d'ouvrir, puis abandonne. Quand j'entends les marches de l'escalier grincer, la personne qui m'écrase, cette personne à l'odeur intrigante... Putain, Alma ! C'est peut-être un fou ! Donc, cette personne, sans nul doute masculine, murmure quelques mots qui me laissent interdite.

— Je ne veux pas perdre...

Cette voix. Sa voix. Je redouble d'efforts pour me débattre, afin de le dégager de moi, de reprendre le contrôle, mais j'en suis incapable. Et pour être honnête, je ne saurais dire s'il me tient trop fermement ou si je n'ai pas suffisamment de volonté pour résister. Pour finir, je le laisse continuer.

— ... j'ai envie de gagner, j'ai besoin d'une pause, d'un putain de break, où je n'aurais pas à la voir m'ignorer...

Il parle de moi, là ? Putain, c'est lui qui m'ignore sans que je ne sache pourquoi !

— ... où je n'aurais pas à regarder ses chevilles nues si délicates, où je pourrais cesser de me demander si elle porte quelque chose sous son pull. Putain, je compte bien rester planquer dans mon coin pendant la petite heure que durera cette chasse à l'homme en imaginant qu'elle...

Quoi ? Pendant qu'elle fait quoi ? Pendant que je fais quoi ?

— Je m'égare. Alors je ne sais pas qui tu es, je ne t'ai pas vu dans le noir, mais veux-tu ranger tes crocs et tes cris, glisser quelques manteaux entre nous, et attendre tranquillement dans ton angle ? Je suppose que c'est aussi ton but, sinon tu n'aurais pas fermé le placard à clef, ce qui est brillant, je dois le reconnaître.

Little CrushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant