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Alma

Présent

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Je pousse la porte et je pénètre dans son appartement, enfin son duplex. Putain, je suis chez Lake Evans ! Il m'accompagne, mais il joue le jeu et patiente dans l'entrée.

— Je t'en prie, fais comme chez moi, dis-je en ôtant mon trench pour le suspendre sur le portemanteau que je repère facilement.

Je laisse mes chaussures un peu en vrac sur le tapis, puis je me dirige vers la cuisine. Dans cet espace ouvert, je la repère aisément et je sors à la hâte les plats que Will a gentiment préparés avec moi, enfin pour moi.

— Je te sers à boire ?

— Avec plaisir, me répond-il en déboutonnant le haut de sa chemise avant de retrousser ses manches.

Je ferme les yeux, détachant mon regard de ses avant-bras, et je fonce droit sur le frigo, enfin presque dedans. L'air frais me fait du bien et je ressens le besoin étrange de scanner le contenu de son réfrigérateur. Je n'assimile aucune information, mais compter le nombre de radis et de yaourts m'aide à me calmer. Mes mains n'ont jamais été aussi moites et j'apprécie de les enrouler autour d'une bière humide. Je lui en propose une, au moins, je suis sûre qu'il les aime. Puis, je saisis une bouteille de ginger-beer que j'ai moi-même apportée.

— Où sont les toilettes ? me demande-t-il.

— Au fond du couloir à gauche, dis-je aussitôt.

Il éclate de rire, traverse le salon, s'engouffre dans un petit corridor, et ouvre la porte de droite. Merde, j'avais une chance sur deux ! Chez moi, les toilettes sont à gauche, ce qui signifie qu'actuellement, Lake est en train de pisser dans la chambre d'Iris. Mais peu importe.

*

Je profite de son absence pour prendre mes marques et déambuler dans son appartement. Les espaces sont grands, les plafonds hauts et les pièces lumineuses. Les murs sont en majorité blancs, mais arborent parfois des teintes dans les gris bleutés, ou les verts lichen. Le mobilier est élégant, alliant un style industriel avec une ambiance plus chaleureuse de jardin d'hiver. Du bois, du cuir, des textiles viennent réchauffer le métal, le béton et le carrelage. C'est plutôt masculin, bien rangé et agréable. Je suis aussitôt attiré par les plantes qui s'amassent devant les larges fenêtres.

— Bariole. Il donne des noms à ses plantes.

Je repense à Glenn et je me demande s'il est toujours vivant.

Puis, je monte l'escalier en acier et à l'étage, je découvre un grand espace sous les combles, avec des poutres apparentes. Au fond, il y a une salle de bain, que je devine grâce à la cloison d'atelier en verre armé semi-opaque. Au milieu, se trouvent un bureau, un fauteuil et quelques livres empilés sur le sol. Et à droite, trône un lit, enfin le sien. Putain, je suis devant le lit de Lake !

Il est vraiment grand, j'imagine que je pourrais y dormir dans tous les sens. Il se pare de deux oreillers blancs, comme le drap-housse et le drap plat. Mais aussi, de deux coussins d'un brun noisette, assortis à la housse de couette. Et enfin, un édredon règne sur le dessus, dans un gris anthracite similaire à la tête de lit peinte sur le mur, en une bande horizontale. Dire que j'ai envie de me laisser tomber dans toutes ces couches qui semblent hautement moelleuses est un euphémisme. Et puis, il y a cette odeur de partout. Café. Feuille de tabac. Cuir.

— Alma ?

Je sursaute en entendant Lake derrière moi. Il m'observe depuis le centre de la pièce, près de l'escalier.

— Iris va t'en vouloir, tu viens d'uriner dans sa chambre, mais parle doucement, nous sommes chez les voisins du dessus à présent.

Je suis nerveuse, à deux doigts d'être hystérique, et j'essaie de faire diversion. Il me sourit avec beaucoup de tendresse, comme s'il comprenait ma façon de faire. Il approche lentement vers moi et effleure ma joue.

— Et maintenant ?

— Si je n'étais pas en avance, tu aurais fait quoi en m'attendant ?

— J'aurais pris une douche et je me serais changé.

— Une minute.

J'avance d'un pas, nos corps se retrouvent pratiquement l'un contre l'autre. Je le vois retenir son souffle, sa main ne survole plus ma pommette, mais glisse sur ma nuque, sous mes cheveux. Je me blottis contre lui, frottant mon visage contre son torse et dans son cou. Je respire son effluve et une seconde après, il m'enveloppe de ses bras pour m'étreindre.

— Tu as l'odeur de Plymouth University.

Je le sens sourire contre moi et me serrer un peu plus fort.

— Je crois que je t'ai volé ton t-shirt, Lake. Mais c'était il y a longtemps, j'imagine qu'il y a prescription.

— Je le sais, Alma. Je pense être au courant pour tout ce que tu m'as dérobé.

Ses yeux deviennent malicieux et il se mord la lèvre.

— Tout ?

— Tu ne te souviens pas d'être entrée par effraction chez moi pour subtiliser un pot de fleurs, avant de le remplacer par un pot cassé, tout en orchestrant une mise en scène accusant mon ballon de foot, et finir par te cacher pour ne pas te faire prendre ?

— Oh, merde ! J'ai toujours cru que tu habitais de l'autre côté.

— J'ai envie de toi.

— Hum ?

Je ronronne presque en déposant un baiser sur sa mâchoire, mais au lieu de lui arracher sa chemise, je me mords la lèvre, tentant de garder le contrôle, et je descends l'escalier.

*

Je commence à placer les plats dans les fours et à fouiller dans les placards pour sortir la vaisselle quand il apparaît. Il a troqué sa chemise contre un t-shirt gris et son pantalon de costume contre un jean.

— Tu as trouvé tout ce dont tu as besoin ?

Je m'arrête un instant, il avance dans le salon encore plongé dans l'obscurité, il met de la musique, un morceau de Caamp que j'aime beaucoup, puis il allume le lampadaire cuivré près du canapé. L'ambiance devient cosy, sensuelle et il m'apparaît presque impossible d'y résister. Il prend un plateau devant moi, y place nos bouteilles à peine commencées, des tuiles faites maison avec un pot de sauce blanche. Il pose le tout sur la table basse, et je soupire en matant ses fesses délicieusement offertes à ma vue. La cuillère m'échappe. Il relève la tête vers moi, son sourire est hautement insolent.

— Putain, c'est impossible ! dis-je en étant agacée, tout en libérant mes mains. Je ne peux pas, je n'y arriverai jamais.

— Alma, qu'est-ce qu'il se passe ?

Lake semble troublé, à un tel point qu'il paraît désemparé. Je le rejoins nerveusement dans le salon.

— Lake, je suis désolée, c'était une mauvaise idée, je n'aurais jamais dû t'inviter à dîner.

Little CrushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant