Chapitre 10

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Il y a des choses plutôt prévisibles.

Comme le nombre raclements de gorge que fait Mme Jefferson avant de donner un avertissement à un élève trop bavard : trois.

Comme la phrase que ma mère prononce dès que notre voisin gare sa voiture un peu trop près de notre pelouse : « Il se gêne pas l'asticot ! ».

Comme le fait que dès lundi, Haru va certainement me fuir comme la peste.

J'aurais aimé que cette hypothèse ne me suive pas durant le reste du weekend, mais je n'ai pas réussi à totalement faire l'impasse face à tous les possibles scénarios qui m'attendraient une fois un premier pied dans la classe.

Notre cours de ce matin porte sur la géographie du Moyen-Orient et je suis assis à côté de Faisal. La moitié des élèves n'est pas encore là, et nous faisons passer le temps en débriefant sur notre weekend. J'omets beaucoup de détails. Tous, en fait. Je ne me vois pas plus partager à mes amis les déclarations passionnées de Haru que le réveil catastrophique des quatre énergumènes dans ma piaule. À leurs yeux, j'ai végété du vendredi soir à maintenant.

Un dernier flot d'élèves vient conclure le commencement du cours, je tourne la tête et anticipe déjà l'arrivée de Haru. Il a d'abord la tête basse, les yeux rivés sur son portable tenu à l'envers, il fronce les sourcils comme si quelque chose de très intéressant se retranscrivait sur son écran. Matthew le suit de près, à la différence que son regard croise directement le mien et qu'on se sourit. Quand ils s'assoient à leur place, j'observe Haru en me demandant s'il compte réellement faire comme si je n'existais pas.

Alors, avant même que je ne puisse pousser cette réflexion plus loin, il relève la tête. Je crois qu'il a compté jusqu'à trois pour se donner du courage. Il me regarde, une seconde, avant que lui aussi, un sourire ne prenne place sur ses lèvres.

— Salut.

Je décide de faire fi de l'air constipé qu'il m'adresse, car son effort me soulage malgré moi énormément.

— Salut, vous allez bien ?

Je sais qu'il va falloir qu'on en parle. Du moins, qu'on en parle pour savoir si on fait comme si rien n'était arrivé, ou s'il souhaite une vraie réponse de ma part





Je vois Haru et Matthew au loin, nous rejoignant à la pause méridienne avec Faisal et Blanca.

— C'était la goutte d'eau !

— Pourquoi elle crie déjà ? grimace Haru, plus sûr de vouloir s'approcher davantage.

Mais l'ouïe de Blanca a pour particularité d'être un brin trop développée, et sa tête tourne à presque cent quatre-vingt degrés vers sa provenance.

— Haruuuuuuu !

Oh no...

Malgré lui, les voilà à nos côtés pour le déjeuner.

— Encore désolé pour le bordel de samedi, me confie Matthew avec la même mine contrite qu'il se trimballe depuis ce matin.

Je ris.

— C'est ok, à ce stade il te reste plus qu'à m'envoyer un pigeon voyageur et t'auras tenté toutes les approches possibles.

Il se penche un peu plus vers moi, pendant que Haru se retrouve contre son gré aspiré dans les jérémiades de Blanca. Tentant de baisser son ton, je vois pourtant que l'attention de mon camarade londonien se dirige vers lui.

— C'est un vrai chaton et il penserait jamais à mal te concernant, mais je comprendrais si ce soir-là, ça t'ait mis mal à l'aise.

Ce n'est pas tant le fait que ce soit arrivé, qui me gêne, mais plutôt qu'il le relève.

— Ça aussi, t'inquiète, je le rassure d'un ton un chouïa moins sincère.

Je sais que Matthew est loin d'être aveugle. De mon côté, je me suis toujours réfugié dans cette optique du « Si personne ne dit rien, ça n'existe pas ». Mais je ne peux pas me permettre de faire l'autruche si éventuellement, le sujet revient sur la table.

Alors, je tourne la tête et les scrute. Lui, Blanca et Faisal. Avec les autres, Haru a un naturel que je n'arrive pas à faire émerger. Je les envie un peu, de pouvoir apprendre à le connaître dans sa plus grande vérité. Depuis le début, il a toujours peur de gaffer avec moi, et de cause à effet, il gaffe encore plus. En tête-à-tête, je ne sais pas qui il est.

J'aimerais juste pouvoir échanger avec celui qu'il est quand il se fiche de l'image qu'il renvoie.

— Non mais trop c'est trop ! continue de fulminer Blanca. Le nouveau proviseur enchaîne des bourdes depuis qu'il est là et c'en est ultra offensant !

— Il se passe quoi du coup ? demande Matthew en se mêlant à la discussion.

— Le proviseur Harley a inscrit Blanca dans le comité d'organisation de la quinceañera de Fernanda, une seconde, l'informe Faisal.

Le fait qu'elle l'entende de la bouche d'un autre la fait littéralement exploser :

— Il pouvait pas se renseigner avant de mettre tous les latinoaméricains dans le même panier !

Haru semble perplexe, il ouvre la bouche mais je me dépêche de me rapprocher pour chuchoter sans que Blanca ne m'entende.

— C'est une fête qui ne se célèbre pas au Chili.

Il se tait avant que je n'aie pu dire « ouf ».

— Tu vas faire quoi du coup ? je l'interroge, voyant que cette étourderie semble vraiment lui tenir à cœur.

— Je réfléchis, bougonne-t-elle. Ça m'avait tellement énervée que j'ai été tentée de participer juste pour saboter l'événement. Mais c'est pas à Fernanda de subir mes foudres.

— En plus le dirlo il a quand même mis son ancien petit ami dans le comité, continue Faisal. Ça doit être bizarre de savoir que ton ex organise ta fête ?

Blanca se perd dans ses songes quelques secondes, avant d'élaguer sa remarque d'un signe de la main.

— Bof, ils sont devenus super potes quand elle l'a largué. Fallait juste qu'ils se rendent compte qu'ils sont mieux en tant qu'amis.

L'information fait tilt.

J'ai trouvé.

Pour que Haru soit enfin lui-même, je dois juste lui faire capter qu'il n'aura jamais aucune chance avec moi !



***

Ceux qui sont dans mes contacts proches sur Insta sauront que j'ai écrit les trois-quarts du chapitre pendant mon roadtrip improvisé d'aujourd'hui xD

Je suis complètement dans les vapes tellement je suis fatiguée, mes yeux se ferment tous seuls.

Oops, my badOù les histoires vivent. Découvrez maintenant