Chapitre 39

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Il est bientôt l'heure de rentrer. Le bus viendra nous récupérer en début d'après-midi et nous déposera à l'académie. Ça me fait déjà bizarre de me dire que nous reviendrons à la vie normale. Ce séjour, pleins de rebondissements et de péripéties, me paraît presque avoir été un mirage.

Les élèves font des allers-retours répétitifs depuis onze heures, lorsque nous avons terminées les dernières tâches de fortune. Nous avons aussi passé du temps avec Letty, qui nous a tous entrainés malgré nous dans une séance de yoga sur la plage, alors que Jade et Ioane se ramassaient une bonne gueule de bois.

Aux alentours de midi, pendant que mes camarades oscillent entre quelques balades dans les environs et traquent le déjeuner, je reste assis sur mon lit à plier mes vêtements pour les ranger dans mon sac de voyage. Je suis perdu dans mes pensées depuis ce matin. Je me demande si tout, tout ce qui s'est passé ici restera ici, comme dans un rêve.

J'entends la porte s'ouvrir et tourne la tête. Je suis seul dans le dortoir, sûrement parce que ce n'est pas très productif de faire du rangement quand on est occupé à disséquer chaque neurone en action. Mais Haru se tient dans l'entrebâillement, j'ai un peu de mal à déchiffrer son regard sur le moment. Il entre et fait quelques pas dans ma direction.

— Tu vas bien ? me demande-t-il en posant la main sur l'échelle qui relie nos lits superposés.

— Ça va, je lui réponds.

On s'observe un instant, puis il hoche doucement la tête. Je le vois pousser sur ses jambes pour monter l'échelle et se pencher de moitié sur sa couchette.

— Tu cherches quelque chose ?

— Je crois que j'ai laissé mon portable traîner par-là... Ah le voilà !

Il bondit pour redescendre, me l'agitant sous le nez avec le début d'un sourire.

— J'ai déjà dû en racheter un depuis l'ouragan, je crois pas que mes parents laisseraient passer un autre écart de ce genre.

Je me surprends à rire, automatiquement. Mais en quelques secondes à peine, le silence revient et nous sommes seuls dans cette pièce. La soirée d'hier me revient par intermittences, car il est là et que je tente de juste me concentrer sur l'instant présent. S'il s'en va, que je me retrouve seul, je m'en rappellerai dans les moindres détails, du début à la fin. Je ne sais pas si c'est une bonne idée, de me laisser aussi longtemps avec ces images.

Ça ne fait pas de doute, on est embarrassés.

— Je te préviens quand on mange ? tente-t-il.

Je bats des cils, attrapant cette accroche à la réalité.

— Ouais, s'il te plaît.

Il m'offre un sourire et tourne lentement les talons.

Mais je tends le bras, attrapant son poignet avant qu'il ne s'éloigne de moi.

Je n'arrive pas à savoir si ça l'a surpris, ses yeux s'orientent vers ma main, avant de remonter vers mon visage. Je sais que, d'une question muette, je lui demande de rester avec moi. Alors il fait un pas, et s'assoit à mes côtés. Un nouveau silence pèse alors, et quand je lâche son poignet, mes mains se posent docilement sur mes genoux comme un enfant puni. Je ne sais pas du tout quoi dire.

— Tu...

Je l'entends difficilement avaler sa salive, ses doigts tapotent l'une des barres de l'échelle.

— Tu veux qu'on en parle ?

Je hoche la tête mais je ne sais même pas s'il m'a vu le faire, car il n'enchaîne pas. En même temps, « qu'on » en parle suppose que je suis tout autant légitime de lancer le sujet que lui. Un son guttural m'échappe, et je me gratte la nuque.

— Y'a... beaucoup de gens pour qui ça signifie rien, je commence. Les choses qui se passent pendant ces sorties, parfois ça veut rien dire, pour eux.

Il continue de tapoter les barres de métal, mais bien vite, il s'arrête et plus aucun bruit ne vient troubler nos paroles.

— Et pour toi, ça voulait rien dire ?

Je sens que ça lui coûte, de me demander ça, tout comme j'ai moi-même du mal à formuler mes propres ressentis.

— Justement, si.

Là, il tourne finalement la tête vers moi. Dans son expression, il y a un mélange de stupeur, mais aussi une lueur presque coupable que j'associerai à du soulagement.

Il se penche sur mon visage et je sens une étrange chaleur prendre possession de mon corps. Il surveille chaque détail, dans mon regard, dans mes mouvements, peut-être même dans mon souffle qui se mélange au sien.

Il m'embrasse une première fois, ça ne dure qu'une seconde. Ma bouche reconnaît la sensation de la sienne, qui porte une empreinte se répercutant jusque dans ma mémoire profonde.

Puis il revient. Sa main se pose sur ma joue quand je ferme les yeux, répondant à un baiser plus lent, plus doux. Nos lèvres bougent ensemble, mes doigts prennent appui sur son genou. Je ne suis même pas sûr que nous ayons totalement terminé la discussion que nous devions avoir.

La porte s'ouvre de nouveau et nous nous séparons sous la surprise de cette intrusion. Haru bat des cils et je le vois prendre son portable pour regarder l'heure. De mon côté, je fais mine de continuer de plier le même t-shirt depuis quinze minutes. Magdalena tempête quelque chose sur son mec au téléphone sans prêter la moindre attention à notre présence. Elle attrape la sacoche d'Eisenhawer et sort. En réalité, je suis persuadé qu'elle n'a même pas capté qu'on était là.

J'entends le rire d'Haru, après, quand le silence revient. Il pose sa tête contre mon épaule, sans voir son visage, je sais qu'on sourit un peu tous les deux.

Au bout d'une minute sans rien, il ouvre la bouche. Mais il la referme ensuite, comme s'il ne savait pas comment coordonner ses mots. Il répète cette action deux fois.

Je porte ma main à ses cheveux et y glisse mes doigts, et alors, ça semble lui suffire à rassembler son courage.

— Tu veux bien être mon petit ami ?

— Je veux bien être ton petit ami.

Oops, my badOù les histoires vivent. Découvrez maintenant