CHAPITRE 10 : Toucher

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—    Argh, soupirais-je en me laissant tomber en arrière.

A côté de moi, Kandinsky riait à gorge déployée. Nous étions dimanche, autrement dit il ne nous restait plus qu’aujourd’hui pour faire les devoirs qui nous avaient été donnés un mois auparavant.  

—    Comment ça se fait que tu sois aussi calme ? le questionnais-je impressionnée par son détachement.

Il haussa simplement les épaules.

—    Je suis habitué à me faire gronder. Je ne fais jamais mes devoirs.

Il m’avait rejoint dans la salle de jeu et nous y étions depuis dix heures ce matin. Pour Kandinsky, c’était un exploit de se lever aussi tôt un jour de week-end. Je l’avais un peu forcé.

—    Au pire, ce n’est pas très grave.

Je secouais la tête. Je ne voulais pas être catalogué à peine un mois après mon arrivée.

—    C’est important d’effectuer ses exercices, lui rappelais-je.

Il secoua la tête en levant les yeux vert le ciel.

—    Un exercice c’est fait pour s’entrainer quand on ne sait pas. Moi, je sais.

J’haussais un sourcil, perplexe vis-à-vis de son résonnement.

—    Dans ce cas, donne-moi les dates de la première guerre mondiale.

Il me regarda dans le blanc des yeux. La lueur bleue me fit presque perdre la notion du temps. Je me ressaisis aussi vite que j’ai pu pour qu’il ne voit pas à quel point il m’intimidait.

Je sentis mes joues chauffer sous son regard qui n’arrêtait pas de me fixer. Je détournais les yeux, me raclant la gorge.

—    Pourquoi est-ce que je devrais retenir le passé ? Le présent est tellement plus intéressant.

Son regard me brulait mais je ne pouvais m’empêcher de sourire. Je ne savais pas si ce qu’il avait dit été visé mais je le prenais personnellement parce qu’au fond, j’espérais que ce serait le cas.

Je voulais plaire à un garçon. Je voulais qu’on m’aime, même si ce n’était pas réciproque. Je voulais me sentir importante pour quelqu’un. J’avais manquée d’amour masculin durant trop d’années.

—    Tu ne sais pas, avoue, lui lançais-je amusée.

Il me sourit de toutes ses dents blanches. Je finis par exploser de rire. J’adorais son comportement tellement détaché de tout. Il me faisait oublier la réalité de ma vie.

Je pouvais me perdre tranquillement dans un monde avec lui, sans avoir à me soucier des conséquences.

—    Aller, viens.

Il prit nos cahiers avant de les jeter en l’air. Ils retombèrent dans un fracas et je n’eus pas le temps de protester. Il me prit par la main et me força à me lever du sol.

Il m’entraina en dehors de la salle de jeu.

—    Hey, attend !

Il ne m’écouta pas et continua à m’entrainer je-ne-sais-où. Nous franchissions les portes du jardin et l’air glacial de janvier me frappa le visage de plein fouet.

La neige avait fondu mais le froid était toujours présent, malgré les faibles lueurs du soleil.

Nous courions jusqu’à la chapelle. En entrant à l’intérieur, je m’arrêtais avant de reprendre mon souffle. Dedans, j’avais l’impression qu’il faisait encore plus froid qu’à l’extérieur.

Mon maigre corps se mit à frissonner sur place. Mes dents claquèrent et je plaçais mes bras devant ma poitrine pour avoir un minimum de chaleur.

—    Qu’est-ce qu’on fait ici ?

Kandinsky ne répondit pas à ma question. A la place, il saisit ma main et m’amena jusqu’au banc devant l’autel. Sur le banc reposait une couverture. Il la passa autour de ses épaules avant de s’allonger sur le banc.

—    Viens.

Il m’ouvrit ses bras. J’hésitais à accepter. Nous allions être proche l’un de l’autre. Je secouais la tête, ce n’allait être qu’un simple câlin.

Je m’allonger sur lui, mon dos contre son torse. Il m’entoura de ses bras, les enroulant autour de mon ventre. La couverture replier sur moi et sa chaleur me fit vite oublier le froid qui me faisait claquer des dents quelques secondes auparavant.

—    Pourquoi tu m’as emmené ici ? murmurais-je en regardant les vitraux.

—    J’avais vu la nuit où je t’avais demandé en ami que tu admirais les reflets de vitraux. Si tu as adoré que la lune les éclaire, tu vas adorer le soleil.

Pile à se moment, la lumière jaunâtre du soleil se refléta sur les vitraux. Les couleurs se mirent à s’afficher partout sur les murs et le sol. Je regardais avec admiration les reflets colorés.

Une chaleur se rependit dans mon ventre. Je ressentais souvent ça avec Kandinsky, sans vraiment savoir ce que c’était. J’étais touchée de constatais qu’il faisait attention à mes moindres mouvements.

J’étais touché qu’il s’intéresse un tant soit peu à moi.

La chaleur se son corps me donna vite chaud mais je ne pouvais pas me résigner à bouger. J’étais si bien dans ses bras.

Nous sommes restés jusqu’à ce que la nuit tombe, bercé par la chaleur de nos corps collés. J’appréciais ce câlin mais je me surprise à avoir peur. Peur d’en vouloir plus souvent, plus longtemps.

Le visage de maman réapparu dans mon crâne. J’aimais ses câlins. Au fond, la chaleur de Kandinsky me rappelait celle de maman.

Les portes s’ouvrirent brusquement. Je sursautais tandis que Kandinsky était serein, presque en train de dormir.

—    Vous êtes là ?

Une chevelure rousse apparue dans mon champ de vision. Malgré le noir, je réussis à distinguer ses yeux bleus mi inquiet mi énervés.

—    On vous cherche depuis ce matin ! C’est l’heure de manger.

Je me relevais, gênée que Charles nous ai surpris. Je ne voulais pas qu’il s’imagine que Kandinsky était mon amoureux.

—    Je suis quand même surpris que tu ais raté le repas, lança-t-il à mon ami.

Il se frotta les yeux, montrant à quel point ne rien faire l’avait fatigué.

—    C’est vrai, répondit-il. Je crois que j’ai trouvé quelque chose de mieux à faire que de manger.

Il me lança un regard tout en se grattant la nuque. Je pouvais voir à quel point il feignait son assurance mais je trouvais ça mignon. Je lui souris, flattée.

Il se leva avant de s’étirer. Je recommençais à frissonner. J’avais l’impression qu’il faisait encore plus froid qu’avant.

Kandinsky remarqua mes tremblements incessants et me tira contre lui, m’enveloppant dans la couverture.

—    Aller les amoureux, on va manger, lança Charles.

—    Ce n’est pas mon amoureux ! crachais-je.

Je croisais les bras avant de m’éloigner de mon ami. Il me dévisagea avec une expression que je ne lui connaissais pas.

Je regrettais soudainement ce que je venais de dire. Du moins, la façon dont je l’avais dit. Je ne voulais pas être aussi méchante.

Le rouquin leva les mains en signe de capitulation.

—    Ok, mais venez manger.

Je baissais les yeux vers le sol, n’osant pas affronter le regard triste de Kandinsky.

Sans rien dire de plus, je suivis Charles jusqu’au réfectoire.

C’était la première fois que Kandinsky et moi avions passer un repas dans un silence lourd.

SANS TOI [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant