Chapitre 40 - La voix d'Ezequiel

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EZEQUIEL

Un grognement agacé me fait lever les yeux vers la source de ce son disgracieux, qui m'arrache un énième sourire. Dans la douche, Rio râle, s'agace, peste et est d'humeur de chien. Elle pourrait littéralement me fusiller sur place d'un seul regard si c'était possible.

J'apporte ma tasse à mes lèvres pour cacher mon sourire moqueur, avant de me faire émasculer si elle le voit. Depuis une semaine, elle squatte chez moi et sa présence est naturelle, apaisante, énervante et brûlante. Son corps va mieux, même si les douleurs sont toujours présentes. Les hématomes sur son visage commencent doucement à s'estomper après avoir pris une teinte violacée qui n'a fait qu'alimenter sa mauvaise humeur.

C'est son esprit qui peine à guérir, à cause d'une vulnérabilité qu'elle n'aime pas ressentir.

Ses côtes et son genou la font encore souffrir et quand le gel douche lui glisse des mains pour s'écraser sur son pied, l'obligeant à se baisser douloureusement, je comprends qu'elle est au bord de la crise de nerf.

Ma tornade ne va pas bien.

Cette semaine a été plutôt calme, je suis resté avec elle les deux premiers jours, mais rapidement, Flint m'a averti qu'il fallait que je revienne pour gérer les enragés. Il en est capable, cependant son niveau de patience n'est pas aussi élevé que le mien. Il a eu des envies de meurtres et en plus de gérer les enragés, il a dû s'occuper de mon territoire avec Jorel.

À contre cœur, j'ai laissé Rio seule. Ezra, Léa et Stacy sont passés régulièrement pour lui tenir compagnie mais le plaisir de la retrouver le soir, endormie sur mon canapé, assise sur la terrasse avec un livre et une grosse couette, ou nue sous la douche n'a fait que renforcer ce que je sais déjà.

Je n'ai jamais vécu avec une femme. Aucune d'entre elles n'a même jamais passé les portes de mon loft et pourtant avec Rio, bien qu'elle soit bordélique, ça se passe bien.

Le nez dans ma tasse, j'observe son corps nu, trempé et encore douloureux se baisser pour rattraper la bouteille de gel douche au sol. La douleur crispe ses traits, ce qui me donne envie d'intervenir. Mais Rio n'a pas besoin que je lui vienne en aide, elle a besoin que je lui montre qu'elle n'est pas faible.

Alors je reste immobile dans la cuisine, les yeux rivés sur elle avec une trique monumentale. Je m'allonge avec elle dans mon lit, m'endors même parfois, rêve à ses côtés, mange avec elle sur le canapé. Nous discutons de tout et de rien et on s'engueule aussi pour finir par la prendre dans mes bras, mon nez fourré dans son cou. Mais à côté de tout ça, je ne la touche pas.

Et sentir son odeur, sa chaleur, sa présence ne m'aide pas à refroidir ma libido. Son rire, ses répliques mordantes, son humour et sa façon de me regarder me mettent dans un état de frustration intense. Cette même frustration l'habite, la consume mais elle comme moi, sachons que son corps n'est pas encore en état pour reprendre nos activités torrides, qui envahissent parfois les nouveaux rêves que je suis capable d'avoir.

Rêver.

Je suis encore perdu sur le pourquoi du comment c'est possible et surtout pourquoi maintenant, pourquoi avec elle uniquement ? Quel phénomène pousse mon cerveau à s'éveiller pendant la nuit en sa présence ?

Avec détermination, elle réussit à rattraper le gel douche et se redresse doucement en fermant les yeux.

Ma tornade a mal et quand son regard trouve le mien, mon cœur se serre.

Sa vulnérabilité la tourmente en plus de l'aspect de son corps abîmé. Pourtant, même si sa peau est bleuit, meurtrie et douloureuse, elle reste la seule femme qui chamboule mes convictions, fait battre mon coeur et allume un brasier ardent dans tout mon corps.

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