Chapitre 53 - Le choix du monstre

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EZEQUIEL

La douleur a toujours fait partie de ma vie. Qu'elle soit physique ou émotionnelle, elle a toujours pris toute la place. À tel point que j'ai fini par me blinder.

D'abord physiquement, pour pouvoir survivre dans les camps. Encaissant toujours plus, poussant toujours mon corps à refouler ce qui pouvait le foutre à terre.

Puis émotionnellement.

En enfouissant toujours plus profondément les émotions qui pouvaient faire de moi une cible ou me rendre faible.

J'ai laissé West prendre une place dans mon cœur à côté de Flint et de Will. Victor Campbell s'est servi de ça pour m'utiliser. Pour me replonger dans un monde que je voulais fuir à ma sortie des camps. Et j'ai tout fait pour m'en éloigner, en reprenant une vie normale.

J'ai repris le lycée sans grande difficulté malgré mes trois ans d'absence hors du cursus scolaire. J'ai obtenu mon diplôme et j'ai intégré la fac de New York en optant pour un cursus en droit de l'enfance.

Je voulais être celui qui protège les gosses qui se retrouvent seuls après un abandon ou un décès. Pour ne pas qu'ils se retrouvent dans la même situation que moi.

Quand j'y repense maintenant c'est risible et complètement con.

Comme si un homme comme moi pouvait avoir une vie normale ?

Et la destinée m'a rattrapé.

Alors j'ai de nouveau blindé mon cœur en érigeant des murs infranchissables pour qui que ce soit.

J'ai laissé mourir Ezequiel Barrow pour devenir le croque-mitaine, j'ai réveillé l'enragé que j'ai mis des années à endormir, et je suis devenu le monstre de l'histoire en faisant ce que je savais faire de mieux.

Anticiper, analyser, me battre et tuer.

Mais Rio Turner est entrée dans ma vie, tel un ouragan. Une tornade infernale qui a tellement frappé contre les murs, qu'elle a fini par les abattre un par un pour s'immiscer dans mon cœur et investir mon âme.

Elle m'a montré la vie que j'espérais avoir avec ses sourires, ses réparties, son humour, ses baisers et ses caresses. Elle n'a pas fait que frôler mon âme détruite.

Elle me l'a volé, recollé les morceaux un à un, l'a soigné pour me rendre que la moitié en gardant l'autre précieusement auprès de la sienne.

Mais je ne suis pas Ezequiel Barrow.

Harrington me l'a rappelé ce fameux soir en utilisant une nouvelle fois mes émotions, mes sentiments contre moi.

Contre celle qui m'a donné la possibilité de rêver.

Et j'ai su à l'instant où j'ai regardé le ciel cette nuit-là, que j'allais la perdre à cause de ce que j'avais fait.

Des décisions que j'ai prise et qui ont causé ce désastre dans lequel Rio avait déjà un pied mais que je ne fais qu'amplifier en la poussant dedans brutalement, à cause de cette fameuse nuit dans le bureau de Victor. À cause des sentiments que j'ai pour elle.

La cible dans son dos s'est agrandie et la faille aussi. Harrington s'y est engouffré en me laissant le choix.

West ou Rio.

Mon frère qui m'a sorti de l'enfer ou la femme pour qui je suis tombé et qui m'a fait rêver ?

J'ai toujours fait de West ma priorité. Il est mon petit frère, le garçon que j'aurai aimé être et celui qui a bercé mon âme de ses rires pendant que je pleurais encore ma mère, mais aussi la perte d'Hach et Artémis.

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