Chapitre 46 - La porte des secrets

5.8K 444 89
                                    

RIO

Debout devant moi, Ezequiel attend patiemment une réponse, mes doigts se resserrent sur mon casque.

Dire qu'il ne m'a pas manqué serait un mensonge mais j'hésite, parce que je n'ai pas les épaules pour me faire démolir aujourd'hui.

Mais son visage blafard, ses cernes, ses hématomes apparents me font hocher la tête et je me dirige vers ma moto, préférant venir par mes propres moyens pour repartir sans encombres.

Je le suis jusqu'à son loft, et ne profite même pas des sensations grisantes de la vitesse tant je me suis habituée à bloquer toutes mes émotions depuis la mort de Flint.

Je me gare à ses côtés dans son parking, mais garde une distance physique pendant que nous montons jusqu'à son étage dans un silence pesant.

La discussion va être vachement animée à ce train là.

Je ferme la porte derrière moi pendant qu'il part à la cuisine préparer du café, le mois de décembre est bientôt là et le froid polaire de New-York est rude.

Je dépose mes affaires dans l'entrée en vrac, et me dit que certaines habitudes s'installent bien trop facilement quand il s'approche en me tendant une tasse brûlante.

Je le remercie d'un hochement de tête, sans vraiment le regarder. Je souffle sur ma boisson. Il s'adosse contre le plan de travail en restant à distance, et je m'assois sur la table face à lui.

NDA : Until the ribbon breaks - one way or another.

Je ne le regarde pas dans les yeux, je blinde mon cœur en étudiant son langage corporel. Ses mains serrées sur le marbre derrière lui, sa posture un peu crispée alors que je remonte lentement sur son visage.

- Je suis désolé de t'avoir repoussé. Je n'ai pas su gérer tout ça et j'ai juste été con, commence-t-il mal à l'aise.

Je hausse les épaules, parfaitement consciente que perdre Flint a chamboulé tout son ordre émotionnel. D'une certaine façon je ne lui en veux pas, ma culpabilité me suffit amplement.

Sa gorge déglutit devant mon indifférence feinte, et je l'observe reprendre un peu de souffle avant de continuer.

- Tu n'es pas coupable de la mort de Flint. C'était un guerrier, un enragé que rien ni personne n'aurait pu obliger à faire quoi que ce soit. Il t'a protégé ce soir-là en sachant pertinemment qu'il ne s'en sortirait pas. Il estimait que ta vie avait plus de valeur que la sienne.

Et c'était une belle connerie.

Flint était père, quelqu'un dépendait de lui. Il méritait de vivre.

Comme s'il sentait le cours de mes pensées en désaccord avec ses mots, il s'approche en douceur en jaugeant mes réactions et je repose ma tasse. L'une de ses mains caresse la ligne de ma mâchoire une fois la distance comblée, et je peine à ne pas abaisser toutes mes barrières pour profiter de ce contact réconfortant.

- Regarde moi Rio.

Il me faut quelques secondes pour obéir, et quitter ma contemplation sur sa gorge pour remonter dans ses yeux.

- Flint est mort en te sauvant la vie parce qu'il savait que j'arriverai à encaisser sa perte, mais pas la tienne.

Même en tentant de mettre la distance entre ses mots et mon cœur, ce dernier loupe plusieurs battements sous cette confession inattendue.

Comme à chaque fois que je pense à Flint, il se serre et ma stabilité émotionnelle menace de s'effondrer.

Alors pour ne pas me perdre dans ma tête, je préfère me perdre dans l'ambre whisky de ses yeux qui me renvoie une sincérité désarmante. Comme s'il sentait que tout menace de s'effondrer en moi, ses bras enserrent ma taille en se penchant sur moi.

UndreamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant