Acte III - scène 14

3 1 0
                                    

Le théâtre change et représente un jardin magnifique.

Wuyuan, prince Chen, Ling

La reine est dans un état d'agitation. Elle fait les cent-pas sur scène jusqu'à l'arrivée du prince. Elle ne prête aucune attention au décor contrairement à Ling, émerveillée. La reine porte un nouveau costume et une nouvelle coiffure. Ce n'est pas le costume d'une reine, mais d'une femme qui veut plaire.

Ling : Le voilà, ma Reine.

La reine cesse de s'agiter et va vers le côté de la scène d'où vient le prince Chen.

Wuyuan, douce : Entre.

Prince Chen : Ce serait sacrilège de franchir la Porte de la Fierté Divine, car seuls le roi et la reine ont le droit d'entrer dans le Jardin du Roi. Je constate que votre intendante a commis cette transgression.

Wuyuan : Je ne la punirai pas si c'est ce que tu me demandes de faire. Si je t'ai invité dans un lieu interdit aux princes comme aux serviteurs, c'est que j'ai une bonne raison de le faire. Et si tu crains de commettre un sacrilège, alors saches que le roi ne le saura jamais.

Prince Chen : Le Roi, mon père, s'est choisi le meilleur des ministres. Et ce ministre le lui dira tôt ou tard, car rien n'échappe au ministre de la Maison du roi.

Wuyuan : J'ai une bonne raison de croire que ni le roi ni le ministre Zhong ne le sauront. Je te demande de me faire confiance.

Prince Chen, faisant un pas en arrière : Hélas, je ne vous ai jamais fait confiance.

Wuyuan, malheureuse : Je le sais... Je le sais, je l'ai toujours su... Et si j'ai décidé que ma servante me suive dans ce lieu qui lui est interdit au péril de sa vie, c'est que je prends un risque pour moi-même que j'ai bien calculé. Crois-moi, il faut que tu entres.

Le prince Chen hésite longtemps avant de parcourir la scène. Puis il regarde pendant longtemps chaque élément du décor du jardin magnifique. On entend des bruits d'oiseau et de l'eau.

Prince Chen : Tout cela est un enchantement ! Tout n'est ici que merveille pour les yeux ! Paix pour les oreilles ! Et repos pour le nez ! Et dire que j'aurais pu attendre encore des années d'incertitude pour découvrir ces beautés en tant que roi ! La nature est ici libre de s'épanouir ! Elle est sauvage si elle le désire, car nul ne vient ici pour l'entretenir ! Elle grandit libre, comme toute créature qui devrait vivre libre ! Son attrait nous rappelle le droit naturel de toute existence vivante à une vie libre ! La liberté est ici, partout dans ces jardins ! Elle nous apprend par les bonnes odeurs et l'éclat superbe des plantes et des arbres que vivre est un autre mot pour dire libre !

La reine se plaît à regarder le prince momentanément insouciant.

Ling, murmurant à la reine : Il jouit, ma Reine, comme la première fois d'un jeune homme avec une femme.

La reine, heureuse, ne dit rien avant longtemps. Elle contemple le prince explorant chaque centimètre des décors de la scène. Elle jouit elle aussi de voir Chen sentir les fleurs, les toucher, regarder les végétaux et les animaux, lever la tête pour faire comme s'il regarde et touche des oiseaux.

Wuyuan : Pourquoi portes-tu ton arc et chargé ton carquois ?

Prince Chen : Depuis que je me sens responsable de cet attentat... je...

Wuyuan : Tu ne peux t'approprier la culpabilité de ceux qui ont commis un crime parce que tu penses que tu aurais pu l'éviter.

Prince Chen : Mais si j'étais resté avec mes frères, j'aurais parfaitement pu l'éviter.

La malédiction de la Cité Pourpre - tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant