Chapitre 8.2

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― C'était quoi, ça ?

― Il est 20h, dit-il en regardant sa montre. L'embrouille du soir de mes voisins.

― Mais... il y a des cris, il va la tuer !

Il ricane.

― Il l'aurait déjà tuée cent fois. Cette cinglée hurle sans arrêt et fracasse les meubles par terre pendant qu'il défonce les murs à coups de marteau. Aussi tarés l'un que l'autre. Le seul que je plains, c'est leur proprio.

J'ouvre grands yeux en même temps que nous pénétrons dans l'appartement. Qui sont ces fous ?

J'entre chez Ryan et découvre une pièce de vie - lit et cuisine compris - d'à peine trente mètres carrés. Les lieux sont plus ou moins rangés, contrairement à ce qu'il disait. Des fenêtres parcourent les deux murs qui composent l'appartement et le petit pan de meubles de la cuisine fait face au lit.

Il y a une odeur de renfermé, typique des logements peu habités. Toutefois, tout semble propre, bien que le lit soit défait.

― Je vais me changer, je reviens.

Il me jette entre les bras un sweat à capuche noir taille L.

― Je ne sais pas combien de personnes ont vu votre visage tourner sur les réseaux, en quelques jours, donc enfilez ça, laissez vos cheveux sur votre front et mettez la capuche. Ce soir, vous serez mon petit frère.

― Ce serait bien d'être plus familiers, si on est frères.

― Ouais, réflexe. Désolé.

Tandis qu'il se déshabille dans la petite salle de bain à droite du lit, je fais un tour le long des fenêtres et m'approche du chevet. Un petit carré argenté m'interpelle sur le sol, à moitié caché par la couette. Un sachet ouvert de préservatif...

Je prends une grande inspiration et jette un œil en direction de la porte entrouverte de la salle de bain. Combien de partenaires Ryan a-t-il eu dans sa vie ? Un bon nombre, sans doute. A ce sujet, est-il celui qui agit ou celui qui...

Une bouffée de chaleur me monte aux joues en l'imaginant en plein acte. Je n'y connais rien, mais la scène est très claire et détaillée dans mon esprit.

Je fais volte-face et me fige vers une fenêtre, face à l'immeuble d'en face. Le vis-à-vis est terrible, ici, une centaine de personnes peut voir tout ce qu'il passe. Ma contemplation des lieux se poursuit. Je réalise qu'être entré dans l'intimité de Ryan me fait beaucoup d'effet. Mais quel effet ?

Ce que je ressens envers lui n'est que rarement lié au sexe, à bien y réfléchir. Des papillons frétillent dans mon ventre lorsqu'il m'enlace, qu'il me sourit ou qu'il me regarde un peu trop longtemps, mais je ne ressens plus rien d'obscène, juste de la tendresse et des sentiments profonds.

En fait, il suffit de m'attarder sur lui et mon cœur se met à battre plus vite. Je me surprends de plus en plus à le fixer sans raison, à vouloir lui prendre la main, à caresser les vêtements qu'il laisse traîner du bout des doigts, quand il n'est pas dans les environs, et à m'enivrer de son odeur pour me rassurer.

A l'inverse, imaginer du vrai sexe avec lui m'intimide et je m'interdis à y songer trop longtemps par peur de bafouiller ou de rougir. Bien sûr, j'ai une envie folle de lui, et bien sûr, mon corps réagit au sien, de manière plutôt incontrôlable, d'ailleurs - je remercie ma virginité pour ces pulsions... Mais, même si je l'ai déjà taquiné, je ne suis mentalement pas prêt à assumer un rapport sexuel avec lui.

Je me prends le front dans la main. J'étais en totale roue libre, la semaine dernière, lorsque j'ai tenté de l'embrasser et que je l'ai provoqué... Je prends conscience des bêtises dont je suis capable à cause de mon sentiment de solitude.

Mon besoin d'amour et mes manques affectifs peuvent m'aveugler au point de faire n'importe quoi. S'il n'avait pas été aussi professionnel et qu'il avait voulu profiter de la situation, nous aurions déjà couché ensemble.

Dire qu'il est le premier à se décrire comme égoïste et sans scrupules... Quel inconscient j'étais.

― T'es toujours pas habillé ?

Je me retourne et l'admire de la tête aux pieds. Il apparaît dans un cargo noir à lanières, resserré aux mollets afin de rentrer dans des rangers Buffalo, et dans un sweat à capuche marqué d'une inscription blanche « XRBNX.1 ». Seuls les tatouages sur sa main sont visibles.

Sa bouche et son nez sont cachés par une sorte de masque chauffe-cou aux finitions futuristes vert fluo et ses cheveux retombent en désordre sur le côté droit de son visage, mettant en valeur le tatouage dans son cou.

Je suis bouche bée. J'avais découvert ce style dans des trailers de jeux vidéo cyberpunk et à travers la communauté urbex, mais le voir sur Ryan... J'ai l'impression de prendre feu.

― Ethan ? dit-il en baissant son masque. T'es si perturbé que ça par mes fringues ?

― N-non... t'es juste canon.

Il ouvre de grands yeux surpris, puis réagit par un sourire amusé. Mon Dieu, ce sourire... Je hausse les sourcils, soudain conscient de ce que je viens de dire. Ai-je réellement prononcé ces mots ? Je me pince les lèvres et détourne un regard fuyant. Je n'ai jamais été aussi bête qu'en sa présence...

― Merci ? répond-il, rieur.

A moitié honteux, je retire mon sweatshirt et le laisse sur son lit pour en enfiler le sien avant de le rejoindre à la porte.

― Tu ne pourrais pas m'apprendre à être aussi sexy ? Franchement, tu m'as vu, soupiré-je. Il me faudrait plus de muscles et de charisme.

― Je fais beaucoup de cardio et de MMA pour mon boulot, mais je n'ai pas un corps épais et d'énormes muscles comme certains pour autant, je suis juste tracé, rétorque-il en refermant à clef.

Très bien tracé, alors...

― Et toi, t'as pas besoin de cours de charisme.

Je le suis jusqu'à l'ascenseur d'un pas mollasson.

― Tu dois attirer des tonnes de mecs. Qui je vais attirer, moi ? Des filles intéressées par mon compte en banque, ou par les gentils garçons, erk !

― Parce que tu n'es pas un gentil garçon ? sourit-il, malicieux.

Je le regarde.

― Ça dépend... Tu aimes ça, toi ?

Il réprime un rire et fixe les portes.

― Je ne te dirai jamais ce que j'aime.

― T'es pas drôle.

Nous entrons dans l'ascenseur.

― Ce que j'aime chez toi, poursuit-il, c'est que tu as plusieurs facettes. Un PDG élégant qui a une grande prestance, un garçon adorable et, avec tout le respect que je te dois, patron...

Il me jette un œil de biais et me détaille de la tête aux pieds.

― ... un petit pervers dans l'âme.

Mon visage s'échauffe.Ça voudrait dire qu'il aime ma personnalité et qu'il apprécie lorsque je flirteet joue avec lui ? Je tourne la tête pour cacher la rougeur de mes joues. Les portes s'ouvrent vite, pour mon plus grand soulagement.


Ethan dans ce chapitre :

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