Chapitre 8.5

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Une course dans l'esprit d'un pari ou d'un jeu, oui, mais pour sauver ma vie, je m'en serais passé... Je déglutis.

― Dis, tu as... déjà perdu ?

― Si je les sème pas avec ce bijou, je porte plainte au constructeur, ricane-t-il sur un ton beaucoup trop détendu pour moi.

Je ferme les yeux, soulagé, et m'agrippe à la ceinture de toutes mes forces. Comment l'un de ces types pourrait battre sa Jaguar ? C'est impossible.

― Tiens, ils ont pas perdu de temps, cette fois.

― Qui ?

Une lumière bleu et rouge m'interpelle dans le rétroviseur.

― La police ? C'est la police ?!

― T'inquiète, la routine.

Mon cœur bat à mille à l'heure. Il allume la musique et les basses résonnent la voiture.

― Sujin.

Je tourne la tête vers lui et découvre son sourire en coin.

― Voici un petit bout de ma vie.

Je le fixe quelques secondes, puis lâche un petit rire nerveux. J'ose à peine regarder le paysage flou défiler autour de nous. Les virages, même les plus larges, me paraissent horriblement serrés, à cette vitesse, et chaque tournant me plaque sur le côté du siège. 260km/h.

― Mon Dieu, je vais mourir ce soir et je n'aurai jamais...

― Jamais ?

Il freine pour absorber deux virages consécutifs et ralentit un peu à l'approche du centre-ville.

― Jamais ?

― M-mangé français.

― Ha, ha ! C'est vraiment ce que tu voulais dire ?

― Si j'avais dit embrasser un homme, tu aurais dit quoi ?

Ses lèvres s'étirent.

― J'aurais dit : dommage.

― Espèce de...

Je me retrouve projeté contre la ceinture à l'arrivée d'un carrefour. Des feux ! Il y a des feux, et ils sont rouges !

― Ryan !

Il braque, la voiture accroche la route dans un long drift et se faufile entre deux véhicules en sens inverse. Je plante mes ongles dans la ceinture et ferme les yeux en gémissant.

― Mon Dieu, mon Dieu, mon Dieu...

― D'habitude, quand j'entends ça, c'est dans un autre contexte.

Je rouvre grands les yeux sur lui et il s'esclaffe avec un air salace tout en slalomant entre les voitures. Cet homme est cinglé. Et en même temps...

― J'aimerais bien te le dire dans cet autre contexte... marmonné-je pour moi-même.

― Quoi ?

― Rien, rien.

Nous échangeons une œillade taquine, puis il franchit de nouveaux carrefours comme un fou furieux. Ou un roi du bitume.

Après plusieurs virages et quelques rues désertes à vitesse plus raisonnable, il coupe la musique et passe un appel.

― Hey, Ryan, quoi de neuf ?

― J'ai besoin que tu effaces des enregistrements pour moi. Du rasso de Jimmy à chez moi. J'ai la Jag'.

― Mec, c'est la sixième fois en...

― Pas de blabla, j'suis avec mon patron.

― Oh, OK. J'te fais ça de suite.

― Merci. A plus.

Il raccroche, l'air de rien. A priori, cette situation est des plus banales, pour lui. Il emprunte une série de petites rues à rythme tranquille, puis, après quelques minutes, il tourne et entre dans son sous-terrain.

La voiture s'arrête à son emplacement, le moteur se stoppe et la musique se coupe. Malgré le calme, les battements de mon cœur cognent aussi fort que des basses, dans ma poitrine.

― Je ne verrai plus les Fast and furious de la même manière...

― Ha, ha ! Allez, viens.

Nous faisons le cheminjusqu'à son appartement en silence, un court laps de temps où mes émotions commencentà redescendre.

Une fois à l'intérieur, nous nous déchaussons, il retire son sweat et son t-shirt, part chercher une bière dans le frigo et ouvre un paquet de cigarettes pour aller fumer à la fenêtre, torse nu.

Je m'assois au bout de son lit et le contemple. Il est si décontracté, si détaché de tout... En toutes circonstances, il semble garder le contrôle. Je me demande ce qui est capable de l'affecter.

― Prends-toi à boire dans le frigo. Ça te fera du bien.

Je me lève et récupère une bière parmi les nombreuses bouteilles qui se trouvent dans le frigo. Je n'ai pas l'habitude de boire de l'alcool, mais il a raison, j'en aurais grand besoin.

J'en choisis une avec un nom français et un cœur sur l'étiquette, la décapsule et en avale de grosses rasades.

― Personne ne va nous retrouver, pas vrai ?

Il sourit en soufflant sa fumée dehors.

― Même si les flics se pointaient là, y'aurait pas de soucis.

― T'es toujours si sûr de toi...

Un frisson remonte le long de mon échine. La bière trop froide ? Un courant d'air ? Je m'appuie contre le plan de travail et prends mon front dans ma main en soupirant.

― Hey, ça va ?

― Juste un coup de fatigue, je crois.

Il referme la fenêtre et vient se planter devant moi pour me frictionner les bras. Il tâte mes joues et m'examine.

― C'est la pression qui redescend. Viens t'allonger.

Je le suis en traînant les pieds.

― Il fait froid... t'as pas froid comme ça ? fais-je en le regardant faire le lit.

― Il fait bon, c'est la chute de tension. Viens là.

Il ouvre la couette et je retire mon pantalon avant de me glisser dessous. J'enfonce ma tête dans un oreiller et prends une grande inspiration. Son parfum, le coussin en est gorgé...

Ryan s'installe de l'autre côté et m'attire dans ses bras pour me réchauffer.

― Ce soir, on t'a mis un couteau sous la gorge. Tu as eu peur et tu as eu un gros shoot d'adrénaline. C'est normal de te sentir fébrile, OK ? Rien d'alarmant.

― Comment tu fais pour rester tout le temps aussi calme ?

Il me caresse les cheveux.

― Je suis habitué aux sensations fortes. Et puis, c'est mon boulot de garder mon sang froid. T'imagines un garde du corps en panique devant son patron ? Ça la fout mal.

― Mais tu ne perds jamais le contrôle...

Il souffle du nez.

― Je l'ai déjà perdu.

― Ah oui ? Quand ?

― ... Avec toi.

  

Vous sentez cette bonne odeur citronnée 🔞 ? Ethan au prochain chapitre : 🧯🔥

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