Chapitre 31.2

598 78 23
                                    

PDV Ethan

 

Bercé par le mouvement de la voiture, je réalise que nous arrivons devant un motel après un moment de somnolence. Ryan remercie l'homme et nous quittons le véhicule pour nous diriger à la réception, cachés sous nos capuches. 

La cinquantenaire à lunettes de l'accueil nous donne une clef et nous courrons sous la pluie battante nous réfugier dans la chambre 823. J'ôte mon blouson trempé et me laisse tomber sur le lit double dans un soupir. Ryan fait de même avec son vêtement en grimaçant.

― Ça va ? Tu...

Son bras droit ruissèle de sang.

― Ryan !

Je me rue sur lui, soulève la manche de son t-shirt moulant et examine le petit trou noir dans son biceps, à l'extérieur du muscle.

― Ça va, c'est rien. La balle est ressortie.

― Tu te fous de moi ? Tu te vides de ton sang depuis tout à l'heure ! Enlève ça, je vais chercher de quoi te soigner à l'accueil.

Il me saisit par le bras.

― Tu bouge pas d'ici. Tu appelles avec le téléphone de la chambre, sinon on fait sans.

Je me jette sur le téléphone du chevet et supplie la femme de m'apporter du matériel de soin de toute urgence. Elle arrive dans les deux minutes, munie d'une trousse de secours. Une fois la porte fermée, elle contemple Ryan, torse nu et ensanglanté, puis nous dévisage tous les deux. 

Je reconnais qu'avec tous ses tatouages, ses piercings aux oreilles et ses airs de délinquants, il n'inspire pas franchement la sérénité, mais dans ce genre d'établissement et avec son expérience, ce n'est sans doute pas la première fois qu'elle rencontre cette situation.

― Madame, nous ne sommes pas des criminels, s'il vous plaît, aidez-le...

― Je suppose que vous n'irez pas à l'hôpital, hein ?

― Non, fais-je en me pinçant les lèvres.

― Hmm. J'connais votre tête, vous êtes passé à la télé, récemment. J'sais que vous êtes pas un dangereux.

― En effet. Et cet homme est mon garde du corps. Nous n'avons pas eu de chance, cette nuit...

Elle grommèle dans un instant de réflexion, puis elle tire deux chaises pour s'y asseoir avec Ryan et entame les soins.

― Je vous remercie, madame. Du fond du cœur.

― Hmm. 'Savez que vous avez d'la chance que la balle ait pas pété la grosse veine et qu'elle soit ressortie ?

Ryan hausse un sourcil en ma direction pour sous-entendre « tu vois, c'était rien ». Sa mâchoire se contracte lorsqu'elle le recoud à vif, mais il ne bouge pas d'un pouce. Une fois terminé, elle enroule son bras dans un bandage et se lève en ronchonnant.

― Z'allez attirer des ennuis à mon motel ?

― Non, bien sûr que non ! Je vous enverrai d'ailleurs une compensation financière en guise de remerciement.

Elle a vu ma carte argentée Visa Palladium et elle me connaît, elle sait que je ne bluffe pas.

― Hmm, pas la peine. Juste ramenez personne de bizarre ici.

― Soyez sans crainte.

Les mains tachées de sang, elle quitte la chambre en reniflant et claque la porte. J'accompagne Ryan sur le lit.

― Allonge-toi.

― Non, je dois surveiller.

― Ryan !

― C'est rien, arrête de t'inquiéter pour si peu.

― Je m'inquiète de te voir blessé et j'ai des raisons, cesse de me le reprocher ! m'écrié-je, sur les nerfs. Qu'est-ce qu'on aurait fait si la balle avait causé une hémorragie létale ? Ou si elle avait traversé un poumon ? Tu m'énerves !

Je prends une longue inspiration. Il m'attire à lui, entre ses jambes.

― Sujin, petit cœur, je t'assure que ça va. OK ? Le jour où ça ira pas, c'est promis, je fermerai ma gueule.

― Ha ! Ce jour-là, tu seras en train de mourir.

― Fort probable.

Il sourit. Ses mains se glissent sous mon sweat et il passe sa tête dessous pour se caler contre mon ventre.

― Ton joli ventre, c'est tout ce dont j'ai besoin, dit-il d'une voix étouffée sous mon vêtement.

Je secoue la tête et le serre contre moi. La situation vient de prendre une autre gravité. Je sais qu'il nous a sortis des ennuis plus d'une fois, mais s'ils m'ont retrouvé en si peu de temps alors que nous étions perdus en pleine nature, ce n'est qu'une question d'heures avant qu'ils ne nous repèrent à nouveau et Ryan n'aura pas quelqu'un sur qui compter indéfiniment.

Jusqu'à présent, je ne pouvais pas agir de mon côté, mais maintenant que les preuves peuvent être remises au FBI, il est temps de jouer mon unique carte. Je ne voulais pas en arriver là, mais je n'ai plus le choix.

― Je dois appeler ma mère, Ryan.

Il retire sa tête.

― Pardon ? Maintenant ?

― Oui, maintenant. Elle saura nous aider.

― Ta mère est cheffe des armées ? Elle est haut placée dans le gouvernement américain ?

― Non, mais elle travaille pour celui de Corée.

Il ouvre de gros yeux.

― Donc, à moins que tu sois ami avec le président, laisse-moi gérer, à partir de maintenant, d'accord ?

― Ethan, j'ai besoin de tout contrôler pour garantir ta sécurité.

― Chéri, fais-moi confiance pour cette fois, d'accord ? On a dit qu'on ferait des concessions, tous les deux. A toi d'en faire une.

Il pousse un souffle nerveux et finit par acquiescer. Je dépose un baiser sur le haut de son crâne, écarte ses cheveux de son visage et le pousse à s'allonger avant de composer sur le téléphone de ma chambre le numéro pour joindre ma mère.

― Eomma² ?

― S-Sujin ? C'est vraiment toi ?

La douceur dans sa voix me fait chaud au cœur et l'entendre me répondre en coréen est réconfortant.

― Comment vas-tu ?

― Eomma, j'ai besoin de ton aide en urgence.


______

² : « maman » en coréen.

Double jeu (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant