Chapitre 8.4

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Ryan se relève et revient près de moi.

― On s'en va. Maintenant.

― Attends, j'te connais, toi, me lance une jolie fille aux cheveux roses, d'à peu près mon âge. T'es un influenceur, non ?

― Ouais. Influenceur, répond Ryan à ma place.

― Wouah, non ! C'est le mec qu'est passé à la télé, j'l'ai vu chez mes darons. Genre, t'as hérité de Apple, c'est ça ?

― Espèce de débile, c'est pas Apple, reprend la fille, moqueuse. Tiens, c'est lui, là.

Elle semble afficher mes réseaux sociaux sur son téléphone devant ses deux amis. Réseaux que j'ai épurés de tous souvenirs et infos personnelles, bien entendu. En voyant les poings de Ryan se serrer, ma tension monte.

La fille s'avance vers moi avec un sourire sincère.

― Eh, on peut prendre un selfie ? Enfin, si ça te dérange pas, bien s...

― Le premier qui sort son putain de téléphone, je l'éclate !

Le ton autoritaire de Ryan me surprend moi-même. La fille recule avec un air apeuré. Elle me renvoie un air chagrin, visiblement déçue.

― Pardon, les gens comme toi, ils fréquentent pas les gens comme nous... Désolée de t'avoir dérangé.

Elle baisse la tête et rentre entre ses deux amis. Leurs regards sur moi changent aussitôt, entre dépit et distanciation. Je sens un fossé se creuser entre moi et cette population dont je faisais partie, il y a deux semaines encore.

Au fond de moi, je serai toujours comme ces gens. Je refuse d'être associé à la caste des milliardaires inaccessibles.

― Attends... !

La main de Ryan se referme sèchement autour de mon avant-bras. Ses yeux me lancent des éclairs. Je fais en arrière et baisse le menton.

― Donc, le « petit frère » est blindé, reprend Iroquoise. C'est intéressant, ça, bien plus que la course...

Les quelques personnes autour de nous le fixent alors qu'il me prend publiquement pour cible. Avant même que Ryan ne fasse le premier pas, la fille aux cheveux roses part se planter devant lui.

― Tu crois qu'il a tout son argent sur lui, trou du cul ? On veut pas de mecs violents comme toi, ici. Tire-toi vite fait !

L'un de ses amis s'ajoute à ses côtés.

― On est là par passion pour les caisses, pas pour voler des gens. T'as rien à faire là, mec.

Je reste sans voix, touché par leur soutien.

― Dégagez de là, microbes, répond Iroquoise.

J'empoigne la main de Ryan.

― Fais quelque chose, il va les frapper... !

― C'est pas eux que je protège.

― Ryan !

Il me coule un regard noir. Comme unique réaction, il décide de quitter les lieux, la main toujours serrée autour de mon bras. Malheureusement, Iroquoise est venu avec des amis... Deux hommes nous barrent la route.

Sentant les problèmes arriver, les gens autour de nous s'éloignent pour rejoindre l'agitation autour de deux voitures concurrentes. Je me tourne vers la fille, menacée par les poings de l'autre, et lui souris avec bienveillance.

― Va-t'en, ça va aller, ne t'inquiète pas. Merci à vous deux.

J'acquiesce pour confirmer mes propos et elle recule, entraînée par ses amis pour s'intégrer à la foule spectatrice de la course, sur le point de commencer. Pleine de regrets, elle croise deux doigts en cœur à la façon coréenne avant de s'échapper en courant. Un acte qui me fait chaud au cœur.

― La mise a augmenté. Si tu perds, on embarque le gamin.

― Va chier.

― Combien il te paye, hein ? Réfléchis, mec. A plusieurs, on pourrait obtenir une bête de rançon et se faire des couilles en or.

Ryan me pousse dans son dos et pose la main sur l'une des poches de son cargo.

― Dernier avertissement.

Des bras m'attrapent soudain par la taille. Un homme me sangle contre lui et je suis tiré brusquement en arrière.

― Ryan !

Il se retourne vers moi, mais au premier pas, mon agresseur glisse une lame sous ma gorge. Je me tétanise.

― Tire-toi ou je l'écorche vif.

Une sueur froide me traverse. Tous mes membres se mettent à trembler.

― R-Ryan !

― Ça va aller, Ethan.

Il dégaine son révolver et le braque sur l'homme qui me prend en otage.

― Abime-le rien qu'un peu et c'est toute la police des Etats-Unis que t'aura au cul, si c'est pas moi qui te fais pas la peau en premier, pauvre connard.

Je sens la lame tressailler contre ma pomme d'Adam avant de se décoller lentement. L'homme me relâche, me pousse en avant et Ryan me rattrape contre lui. Il passe un bras autour de moi et braque le groupe tout en reculant vers la Jaguar. A notre grand malheur, Iroquoise fait de même et les hommes se ruent sur leurs deux voitures.

Dès que Ryan me libère, nous nous jetons sur les portières et il démarre en trombe dans une nuage de poussière. Nous dépassons les deux véhicules qui devaient courir sous les yeux ébahis des spectateurs, qui nous acclament par de grands gestes.

J'ai à peine le temps de m'attacher qu'il a déjà quitté le parking et fonce, pied au plancher, sur la quatre voies où la première course devait avoir lieu. En quelques secondes, je me retrouve cloué dans mon dossier. Nous sommes déjà à 160km/h.

― Finalement, tu vas l'avoir ta course, patron.


Double jeu (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant