De chair et d'écailles ▬▬ VKOOK

▬22▬ In extremis ▬▬▬

« Prêt ? Un, deux, trois ! »

Nous soulevâmes le pan de bois sur lequel reposait Jungkook, lequel gémissait toujours de douleur, et nous ne perdîmes pas de temps avant d'avancer vers la rivière de roche irrégulière qui nous menait hors de la crevasse.

Le louveteau ne nous quittait pas et je l'entendais parfois pleurer lorsque Jungkook poussait une plainte plus bruyante, soit souvent lorsque l'écart entre les roches variait tellement que le pan de bois penchait et se stabilisait par à-coups, allant buter contre une de ses nombreuses plaies.

Hoseok semblait posséder une force impressionnante, car je n'avais curieusement aucune peine à soulever cet ersatz de civière, ce qui était étrange vu la corpulence robuste de Jungkook. Je l'accusais de porter bien plus de la moitié du poids du blessé.

Alors que nous étions en train de monter avec moult précautions les gravas, j'observais avec une certaine fascination sa chevelure qui paraissait bordeaux avec cette lumière nocturne. Il avait l'air si jeune, je me demandais comment il pouvait être à la tête d'un groupe de dresseurs d'oliphants.

Nous arrivâmes au sommet après une bonne vingtaine de minutes. Nous nous arrêtâmes quelques temps pour reprendre notre souffle sans pour autant reposer Jungkook, de peur de lui provoquer d'autres douleurs avec ces opérations. La suite de notre retour se passa dans un calme ponctué par des gémissements qui au début me fendaient le cœur, mais qui furent remplacées par nos respirations lourdes.

En une heure, nous nous arrêtâmes par trois fois pour reprendre notre souffle mais de toute évidence la tâche nous épuisait.

« Nous ne serons jamais de retour à l'heure que j'avais prévu si nous continuons ainsi, souffla Hoseok qui montrait des signes de faiblesse.

- A quelle distance sommes-nous du village ?

- Nous n'avons même pas encore fait la moitié, avoua le roux. Il faut qu'on trouve un moyen d'aller plus vite.

- Pourquoi est-ce si important pour vous ?, lui demandais-je presqu'agacé.

- Parce que les oliphants ont des routines quotidiennes qui dénotent des nôtres dans le temps, et une bonne partie de ce peuple se réveille très tôt. Je ne voudrais pas que nous en rencontrions un alors que nous n'avons pas de quoi nous défendre. »

J'encaissai l'information, la peur me triturant l'estomac quand je pensais aux ravages de Tafëndël et aux tremblements que ces bêtes provoquaient lorsqu'ils marchaient.

« Combien de temps disposons-nous pour rentrer ?, demandai-je avec une certaine appréhension.

- Je doute que la réponse vous plaise, dit prudemment Hoseok. Il faut qu'on accélère. »

Je tiquai à sa réponse, appréhendant ce qu'il voulait dire par là.

« Que proposez-vous ?

- Et bien, commença Hoseok d'une voix gênée. Votre ami nous ralentit énormément dans cette position alors...

- Je n'abandonnerai pas Jungkook », claquai-je d'une voix implacable.

Le roux sembla sursauter et se retourna brièvement pour jauger mon expression avant de s'empresser de répondre :

« Je ne voulais pas insinuer qu'il faut qu'on l'abandonne ! Ce que je dis c'est que de le porter dans ces conditions ralentit considérablement notre pas.

- Vous voyez pourtant qu'il est incapable de marcher dans son état, je commençai à m'énerver.

- Je le sais bien ! Ce que je proposerais serait plutôt qu'on le porte à tour de rôle, sur notre dos. »