De chair et d'écailles ▬▬ VKOOK

▬ 32 ▬ Au soubassement de Gasamhart ▬▬▬

Hoseok était un homme prévoyant, très prévoyant, et j'eus l'occasion de l'observer quand je vis le pic de Gasamhart fièrement érigé, défiant la hauteur du ciel, le matin du huitième jour. Cette montagne des plus imposantes de ce monde formait une pointe assez étroite, si bien qu'on se demandait comment le sommet pouvait ainsi tenir debout malgré la rudesse des orages, ou de l'action plus sournoise mais non cruelle du temps qui passe.

Siwon, avec qui j'échangeais dorénavant un peu plus, ma colère se dissipant au fil des jours, m'avait prévenu que nous devions grimper jusqu'à environ la moitié du pic avant de retrouver le fameux vaisseau. J'étais soulagé de ne pas devoir monter jusqu'en haut mais cette seule tâche me paraissait tout de même éprouvante, et j'espérais non insurmontable.

Petit à petit, la forêt passa de feuillus aux conifères, qui me rappelaient la sylve stäfoise. J'humai alors avec une certaine mélancolie cette forte odeur de sapin qui imprégnait ses sentiers pigmentés d'un vert foncé.

« Nous arriverons ce soir comme prévu, il est heureux que le lézard maudit n'ait pas perturbé davantage notre voyage », me dit Siwon avec qui je buvais dans la salle commune.

Je hochai la tête en souriant, heureux d'être arrivé jusqu'ici. Je me souvenais des nombreuses fois où Junmyeon m'avait parlé de Gasamhart sur un de ses innombrables atlas aux pages jaunies par le temps. Il faisait partie des régions les plus désertiques qui existaient, la peur que le sommet du pic ne s'effondrât un jour représentant un facteur important dans le choix d'implantation des villes. Cependant, il existait des fermes aux alentours, notamment des éleveurs de chèvres, qui donnaient le lait le plus cher que je connaissais. Ces fermes étaient la seule forme de vie que l'on m'avait rapporté mais j'étais certain qu'il pourrait y avoir d'autres civilisations, que j'espérais non hostiles.

Nous fîmes une halte au bord d'un ruisseau, de quelques minutes, pour nous permettre de nous laver et aux oliphants de s'abreuver avant d'être privés d'eau jusqu'au pic. J'en profitais pour remplir les cinq gourdes qu'on m'avait accordées, et je lavai aussi avec soin mes vêtements de rechange, profitant du soleil qui s'annonçait pour les faire sécher pendant cette ultime journée au dos des oliphants. Mïro semblait de plus en plus dans son élément, et en avait profité pour courir un peu dans la forêt de conifères pour se dégourdir les jambes, semblant retrouver toute son énergie quand il était entouré de ces sapins épineux.

Une fois cette courte pause finie, je remontais avec plus d'aisance l'échelle de cordage avec mes compagnons. Je vis qu'Hoseok avait cueilli beaucoup de baies, et je ne pus m'empêcher de me rappeler celles que j'avais englouties et qui m'avaient donné l'impression que ma dernière heure avait sonnée. Je les regardais alors d'un œil noir, me rappelant des moqueries de Jungkook, et refusait poliment d'y toucher, préférant le pain de route qui me paraissait bien plus rassurant.

Si je revoyais Jungkook, il faudrait que je lui demande comment je pourrais les reconnaître. J'étais en plus sûr que son égo serait flatté.

« Il faut dire qu'il faut être idiot pour manger de la nourriture inconnue», résonna une voix maintenant familière dans ma tête.

J'haussai un sourcil en regardant le coupable qui se léchait la patte innocemment, près des genoux de Siwon. Il avait un sacré caractère ce petit.

« Je deviendrai plus grand que toi. »

J'étouffai un rire dans une toux, ne voulant pas que Siwon me prenne pour un fou.

Hoseok se joignit à nous, et s'assit à mes côtés, suivant l'habitude qu'il avait prise depuis le début de la semaine.