Chapitre 11 : Sourds

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— Combien de mort te faut-il avant que tu comprennes que la forêt est dangereuse ! s'exclama Sélina en plantant un regard sévère dans celui de la jeune femme.
— C'est une menace ? rétorqua Charlotte en soutenant son regard avec désinvolture.
— Non, c'est un avertissement ! s'écria Ady. Tu envoies des gens dans la forêt, alors que tu connais les risques d'être attaqué par les bêtes sauvages.
— Arrêter de me prendre pour une conne ! Nous savons toutes les trois que ce ne sont pas des animaux qui on tué tous ces gens. Pourquoi vous ne me dites pas ce que vous cacher dans les bois ?

Sélina et Ady échangèrent un regard. Elles ne pouvaient dire la vérité à Charlotte, quand bien même elles la lui diraient, Charlotte ne les écouterait pas.
— C'est bien ce qu'il me semblait ! lança-t-elle en étouffant un rire. Ne vous fatiguez pas, de toute façon nous découvrirons votre secret et nous le révèlerons au monde.

Charlotte bouscula les deux jeunes femmes qui lui bloquaient le passage et marcha d'un pas rapide aux travers de la place du village.

— Charlotte ! s'exclama Sélina.
La jeune femme se figea un instant, mais ne se retourna pas.
— Ce n'est ce qui se cache dans la forêt que l'on veut protéger, c'est les innocents qui se risquent à y pénétrer !

Charlotte pris une profonde inspiration et poursuivit son chemin.

— On aura essayé, souffla Ady en la regardant s'éloigner.

***

Les rayons dorés du soleil, faisaient scintiller merveilleusement les perles de rosée parsemant les feuilles des arbres et les brins d'herbes verdoyants. Pauline et Luna émergèrent de la forêt et s'approchèrent de la souche du grand chêne, où les attendaient les autres protecteurs.

— Ça a marché ! annonça Pauline au petit groupe.
— On sait ! On l'a ressenti, la forêt est déjà plus forte, répondit Tyméo, un lueur d'espoir à nouveau allumé dans ses grands yeux clairs.

Le regard de Luna balaya la clairière. Le sol était recouvert d'un tapis de mousse brune et des champignons blanchâtres formaient un cercle autour de la souche desséchée. Les bourdonnements des insectes se mêlaient aux chants des grillons et des petits oiseaux multicolores. Quelques écureuils couraient sur les branches des arbres qui entouraient l'étendu herbeuse et sautaient sur le dos des biches, des sangliers ou encore des blaireaux qui observaient les protecteurs.

— Comment on procède ? demanda la nouvelle reine de la forêt.
— Tout est près, il ne manquait plus que vous, fit Valentin. Pauline, il nous faut un petit plan d'eau. Les champignons l'achemineront jusqu'aux racines de l'arbre et enfin Luna, tu offriras quelques gouttes de ton sang pour donner la force au chêne de renaître.

Pauline plaça ses mains au-dessus du sol et ferma les yeux. Lentement, la terre se gorgea d'eau et forma une petite mare circulaire. Tyméo plongea ses mains dans la mousse, ses paumes et ses yeux s'illuminèrent d'un vert clair et pâle. La douce lueur se diffusa dans le sol jusqu'aux champignons. Après quelques instants, le jeune homme se releva et se tourna vers Luna.

— C'est à toi ! dit-il.

Luna s'avança jusqu'à la large souche grisâtre, en prenant garde de ne pas écraser les champignons qui l'encerclaient. Elle entailla sa paume, de la petite lame d'un couteau suisse et laissa son sang s'écouler le long de sa peau, pour tomber en une pluie délicate sur le tronc sectionné. Le liquide pourpre fut rapidement absorbé par le bois, qui petit à petit, reprit une couleur beige olive.

Soudain, la terre trembla légèrement. Luna rejoignit les autres, quelques pas plus loins. Sous les yeux écarquillés des protecteurs et de la reine de la forêt, la souche s'enveloppa d'un halo de lumière verdoyante, sa chair se régénéra, son écorce se reconstitua. En son centre, une petite pousse verte apparue. Une fragile brindille s'éleva de quelques centimètres, ornée de deux petites feuilles.

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