Sorcellerie

Chapitre 16 : Inaudible Vérité

Les épais nuages grisés restaient immobiles au-dessus du village de campagne, sur lequel il jetait une sinistre ombre. Les rayons dorés du soleil étaient bloqués par ces énormes monstres de vapeur d'eau et ne parvenaient à offrir leur chaleur aux ruelles étroites et aux vieilles fermes de pierre austère, plongées dans une pénombre presque semblable à celle de la nuit.

Malgré ce temps lugubre, un sourire étirait toujours les lèvres d'Ady depuis la veille et la découverte du rituel qui avait emprisonné sa sœur loin d'elle. La jeune femme venait de quitter l'appartement de Mélissa, dans lequel elle avait poursuivit la préparation du rituel de libération, pendant que la serveuse travaillait au bar et se dirigeait maintenant vers la maison en ruine d'Élisabeth. Elle allait chercher l'objet le plus important, la poupée au visage de porcelaine.

Ady traversa la grande pièce de la demeure de sa tante, autrefois si impressionnante de beauté et désormais aussi délabrée que les fermes miteuses et inhabitées depuis des lustres que comptaient les bas-fonds du village. Elle était loin l'époque durant laquelle Élisabeth pouvait se pavaner d'être la propriétaire de l'une des plus belles demeures du village. Pour ce que cela pouvait bien apporter, désormais, le manoir Aragon n'était plus qu'un tas de cendre et de gravats et la maison bourgeoise une ruine imprégnée d'humidité bientôt gagnée par une moisissure dégénérescente.

La jeune femme ne jeta même pas un regard à la désolation qui l'entourait, peu intéressée par le sort de ces murs, entre lesquels elle n'avait vécu que malheur et trahison. Elle gravit les escaliers en toute hâte et s'engouffra dans la chambre de son adolescence. Elle n'avait pas passé la porte, mais brusquement, une douleur insupportable perça sa boite crânienne, comme une lame enflammée dont la lame lui aurait percé l'orbite pour ressortir de l'autre côté de son crâne.

La violence de cette migraine fut telle, qu'Ady ne pu garder l'équilibre, ni avancer encore vers la chambre. Elle tomba à genou sur le sol, ses mains se serrèrent sur son crâne qui semblait vouloir exploser, alors que de puissants flashs lumineux excitaient bien trop ses pupilles pour qu'elle puisse y voir quelque chose.

— Qu'est qui m'arrive, hurla-t-elle de douleur.

Avec une force dont on ne saura donner l'origine, la banshee rampa sur le parquet ternis par l'humidité et recouvert d'un linceuls de poussière, jusqu'à la porte de sa chambre, une poignée de mètre plus loin. Elle leva une main sans savoir comment elle y parvenait et abaissa la poignée.

La porte s'ouvrit devant elle et l'entraîna à l'intérieur de la chambre. Ady s'écrasa de nouveau brutalement sur le plancher de la chambre. Toutefois, lorsqu'elle se redressa, la douleur de son crâne disparut aussi brusquement qu'elle était apparue. La jeune femme ne comprenait rien à ce qu'il venait de se passer, elle leva la tête, mais ne découvrit que la visage souriant de la poupée en porcelaine, tournée vers elle.

Ady se mit vivement sur ses pieds, elle se recoiffa d'une main et épousseta ses vêtements de l'autre.
— C'était quoi ça ? clama-t-elle. C'était déjà ici que j'ai eu ma migraine l'autre jour... après avoir été agressée...
Épuisée, la jeune femme se laissa tomber sur les draps de son ancien lit. Elle se saisit de la poupée et la serra contre elle.

— Comment j'ai pu ne pas le remarquer plus tôt ? Je le sentais pourtant depuis le premier jour ou j'ai posé mon regard sur toi, tu n'es pas une simple poupée. Je ne sais pas si tu peux m'entendre à l'intérieur, mais si c'est le cas, saches que je sais où tu es désormais et que je vais te sortir de là, je vais te libérer, je te le promet ! souffla-t-elle le regard plongé dans les yeux de verre du jouet. Je dois avoir l'air d'une débile à parler à ma poupée, pouffa-t-elle toute seule.

Elle s'extirpa du lit de son adolescence et quitta la maison avec la poupée, à l'intérieur de laquelle était emprisonnée Aurore.

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