Chapitre 19 : Turbulences

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La porte du petit appartement de Mélissa se referma après l'arrivée de la jeune femme et des protecteurs de la forêt. La sorcière des sables ne perdit pas une seconde, elle s'élança vers le salon et versa la fiole de sang de vampire, dans la mixture aux plantes qu'elle avait préparé plus tôt dans la journée. Elle plongea les mains dans la préparation et la mélangea.

Reyna s'agenouilla au chevet de Pauline. Le front de la protectrice du lac était brûlant, pourtant son corps semblait grelotter de froid. Elle restait toujours inconsciente, épuisée par son combat contre le poison d'Émilie.

— C'est prêt ! s'exclama Mélissa après quelques minutes interminables.

La sorcière des sables souleva la couverture qui couvrait le corps de la sirène. La jambe de Pauline s'était entièrement coloré d'un violet sombre, sa peau était parsemée de crevasses desquelles suintaient un liquide noir et visqueux.

— Oh mon dieu, s'exclama Reyna en découvrant l'affreuse blessure. On dirait qu'elle se décompose...
— Oui, c'est pas beau à voir, mais j'ai pu agir à temps et contenir le poison à cette zone. Sans ça, on n'aurait pas put la sauver, indiqua la jeune femme.
— Guéris la maintenant, lui fit Valentin, la voix empreinte d'inquiétude.

Mélissa appliqua la pommade sur toute la jambe de Pauline et enroula le membre blessé dans des bandelettes de cotons blanches.

— J'espère qu'il n'est pas trop tard... souffla-t-elle une fois sa tâche terminée.
— Comment ça tu espères ? Tu disais que ça la guérirai ! lança Valentin.
— En théorie ça le devrait, mais la sorcellerie n'est pas une science exacte, d'autant plus que le venin d'Émilie n'a rien à voir avec tout ce qui est connu. Ce n'est pas comme si il y'avait une recette contre le poison d'une femme araignée mort-vivante.
— Dans combien de temps on saura si ça a marché ? demanda Reyna de sa voix douce.
— On devrait noter une amélioration rapidement, mais il faudra compter des semaines avant qu'elle se rétablisse complètement.
— On a pas des semaines ! s'exclama Valentin. La forêt n'existera peut-être même plus demain.
— Je sais, mais il n'y a rien d'autre que nous pouvons faire pour l'instant.

Les trois jeunes gens s'accroupirent sur le sol, le regard rivé sur la sirène. De longues minutes s'écoulèrent avant que la fièvre de Pauline ne tombe. Les tremblements de son corps cessèrent et sa respiration reprit un rythme normal. Les traits de son visage, jusqu'alors crispés par la douleur, se détendirent lentement. Bien qu'elle restait inconsciente, l'on pouvait voir que son état s'améliorait.

Un sourire commençait à apparaître sur le visage de Mélissa, tous ses efforts n'avaient pas été vain. Mais les réjouissances ne durèrent qu'une seconde. Les deux protecteurs assis de chaque côté de Mélissa, perdirent soudainement connaissance et s'écroulèrent sur le tapis.

***

Le soleil déclinait dans le ciel et ainsi privait la vaste forêt de ses rayons dorés. Athénaïs se hâtait au travers des arbres desséchées qui formait son royaume. L'eau des rivières qui coulaient sur ce territoire mortifère, étaient devenus aussi noir la nuit. Les fleurs avaient flétries et s'étaient assombries, les insectes se paraient désormais de couleurs ternes et grisâtres, tandis que les animaux qui n'avaient pas eu le temps de fuir, arboraient des silhouettes faméliques, des pelages ou plumages obscurs et des yeux immaculés absolument terrifiant.

Ce spectacle de désolation totale, aurait dû avoir le délicieux goût de la victoire pour le jeune homme, pourtant, il ne parvenait pas s'en réjouir. Ce n'était en rien la mort brutale d'Émilie qui l'attristait, après tout elle l'avait bien mérité. Il l'avait mise en garde à de nombreuses reprises, mais elle ne l'avait pas écouté. Non, ce qui lui laissait un goût amer dans la bouche, c'était la résistance du grand chêne. Il n'avait pas le droit à l'erreur, sinon il pouvait perdre tout ce qu'il avait construit jusque là.

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