Chapitre 16 : réveil brutal et âmes soeurs

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Je me redresse brusquement, haletante et en sueur. Il me faut un peu de temps pour comprendre où je suis et ce qu'il m'arrive. Je suis complètement paniquée. Une main est posée sur mon bras droit, et quelqu'un me frotte le dos pour me calmer. Petit à petit, ma respiration ralentit et je reprends enfin le contrôle de moi-même. Une larme décide alors de couler le long de ma joue. Je crois que je n'ai jamais eu aussi peur de ma vie. Depuis quand quelqu'un s'adresse à moi comme s'il comprenait totalement qui j'étais et ce que je faisais là ? J'étais en plein cauchemar prémonitoire enfin ! Je ne suis pas censée me retrouver à cet endroit !

Le visage inquiet de Naël surgit alors dans mon champ de vision. Je me rends alors compte que c'est lui qui m'a aidée à me calmer. Dans un geste totalement irréfléchi, je m'agrippe à lui, les bras autour de son cou. Je tremble encore un peu de la vision que je viens d'avoir. Je crois que je n'ai jamais été aussi soulagée de le voir. Cela ne fait qu'une semaine, mais avoir quelqu'un de présent m'aide énormément. Je pense que ça aurait pu être n'importe qui d'autre, j'aurais fait pareil. Enfin, sauf le type de mon cauchemar. A cette pensée, je frissonne.

— Tout va bien, c'est fini.

Je remercie intérieurement Naël pour avoir été là pile au bon moment. J'aperçois alors du coin de l'oeil mon maître, qui attend sur le seuil de la porte, l'air inquiet. Je me détache du jeune homme, un peu gênée de voir que l'on nous observe ainsi. Le silence s'installe dans la pièce et je déglutis, mal à l'aise.

— Naël a senti que tu faisais un cauchemar et il est venu me prévenir. Cela fait presque dix minutes que nous essayons de te réveiller.

Un frisson parcourt mon corps et les larmes me montent aux yeux. Je ne peux même pas échapper à mes cauchemars, alors. C'est un miracle que j'ai pu me réveiller au pire moment. Ou peut-être que c'était prévu. Les deux hommes se rapprochent de moi pour me rassurer. Je vois bien leurs questionnements. Ils ne savent pas ce que j'ai vu, et ils doivent se demander ce qui me met dans cet état. J'inspire lentement, avant de commencer à leur raconter ma vision, d'une voix tremblante. Je dois m'y reprendre à plusieurs reprises, car la panique me gagne à nouveau au fur et à mesure du récit. En face de moi, je vois le visage de Naël s'assombrir.

— A quoi ressemblait le prisonnier ?

Je tourne la tête vers mon maître, qui vient de me poser la question. J'essaye de le décrire du mieux possible, avec le plus de détails. L'avantage, c'est que ce n'est pas dur pour moi de m'en rappeler. L'image est marquée au fer rouge dans mon esprit. Je vois les deux garçons échanger un regard, une lueur étrange dans celui-ci. Instinctivement, je comprends qu'ils connaissent l'homme dont je parle. Peut-être pas directement, mais ils savent de qui il s'agit. Je baisse la tête, gênée, avant de finir mon récit. Naël émet alors un hoquet de surprise. Mon maître me tourne vers lui, une lueur alarmée dans les yeux.

— Tu es sûre qu'il t'a adressé directement la parole ?

Je hoche la tête en réponse. La scène tourne en boucle dans ma mémoire, et je me souviens parfaitement avoir regardé autour de moi. J'étais seule. Il n'y a aucun doute là-dessus. Alors que je me retenais depuis tout à l'heure, je fonds en larmes. Rapidement, je sens des bras qui m'entourent et me font basculer tout doucement. Je me retrouve contre le torse de Naël avant même de comprendre ce qu'il m'arrive. Si je n'étais pas sous le choc de mon cauchemar, cela aurait été extrêmement gênant. Mais actuellement, c'est tout ce qu'il y a de plus réconfortant. Après quelques minutes à pleurer, je parviens à me calmer. Je me redresse et passe une main sur mon visage.

— Comment as-tu su que je faisais un cauchemar ?

Je fixe attentivement le garçon, pendant que celui-ci passe une main dans ses cheveux, mal à l'aise. Mon maître se relève alors en essayant de faire le moins de bruit possible, comme pour partir. Naël le fusille du regard, sûrement désespéré de se voir abandonné, mais l'homme s'éclipse par la porte. Je tourne la tête vers la seule personne restante, qui se mord la lèvre, gêné.

— J'ai senti ta peur et j'ai tout de suite compris que c'était lié à tes visions.

Je hausse un sourcil, curieuse d'en savoir plus. Naël soupire, et détourne le regard.

— Me demande pas comment j'ai fait, je sais juste que je suis capable de sentir tes émotions fortes, même si on n'est pas dans la même salle. Et j'entends aussi les battements de ton cœur lorsque nous rêvons.

Je vois ses joues rougir légèrement. Je baisse la tête et fixe le sol, gênée par ces informations. Au moins, je comprends mieux pourquoi il a tout fait pour me réveiller, il y a quelques jours. D'une voix hésitante, j'en profite pour le remercier à ce propos-là. Le garçon lâche un petit rire nerveux, sans savoir où se mettre.

— Sentir quelqu'un ne plus réussir à respirer, je crois que c'est la chose la plus effrayante que j'ai pu connaître dans ma vie. Tu m'as fait une peur bleue cette nuit-là.

Je déglutis, me sentant un peu coupable de lui avoir causé tout ce stress inutile. Je ne comprends pas ce qu'il m'est arrivé, mais je ferai attention, désormais. Je lève alors les yeux, croisant le regard de Naël. Un instant, je me perds dans ses iris brunes qui reflètent une inquiétude certaine, et j'en oublie la question qui me venait à l'esprit. Je me ressaisis tant bien que mal, pour essayer d'obtenir une réponse.

— Dis-moi, comment ça se fait que tu n'aies pas réussi à entrer dans mon cauchemar ? D'habitude, tu y arrives, cela m'aurait peut-être permis de me réveiller.

Le garçon soupire et baisse la tête. Je le vois passer une main dans ses cheveux, et prendre quelques secondes pour me répondre. Puis, je croise à nouveau son regard, et observe une lueur de douleur dans ses yeux.

— Sincèrement, je n'en ai aucune idée.

Après ça, nous passons le reste de la nuit à essayer d'oublier ma vision effrayante et de penser à autre chose. Comme prévu lorsque cela m'arrive à cette heure-ci, impossible de me rendormir, et je remercie intérieurement Naël d'être resté avec moi durant tout ce temps. J'en profite pour essayer de déterminer quel est ce lien mystérieux qui nous unit et le jeune homme se prend rapidement au jeu. Visiblement, il n'en sait pas plus que moi là-dessus.

— Imagine, c'est le cliché comme dans les livres et les films. On découvre alors qu'on est âmes sœurs. Ça n'a aucune crédibilité parce que les divorces se multiplient aujourd'hui, mais c'est drôle, comme idée...

Je remarque alors que Naël se renferme sur lui-même. J'essaye de lui poser des questions et de garder un air joyeux, mais impossible de relancer la discussion. Je fronce les sourcils. Peut-être qu'il sait ce qui nous lie, finalement.

Le Coeur en RythmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant