Chapitre 8 : nouveaux indices et bagarre

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Je suis dans une ville. Un silence de mort y règne. Tout est désert. J'entends le vent siffler entre les immeubles. La lumière autour de moi est surnaturelle. Un espèce de jaune soufre. Pourtant, dans le ciel, les nuages gris sont menaçants. J'avance de quelques pas, en soulevant de la poussière sur mon passage. Ce paysage est inquiétant. L'ambiance autour de moi est lourde et pesante. J'ai envie de courir pour fuir cet endroit. Mais je sais déjà que je n'y arriverai pas. L'endroit est trop grand. J'ai déjà essayé de nombreuses fois. Je n'ai qu'à m'asseoir et attendre. Dans peu de temps, des bombes retentiront. Tout ne sera que destruction. Et au moment où l'une d'entre elles atterrira juste à côté de moi, je me réveillerai. Classique. Mais il me fait toujours autant paniquer. C'est sûrement l'un des plus longs et des pires parmi tous les cauchemars que j'ai fait. Je déteste quand il revient. En général, je suis d'une humeur massacrante le lendemain.

Je pose mon coude sur ma jambe, ma tête posée dans la paume de ma main. Je soupire. Il ne me reste qu'à compter les secondes. De toute façon, je ne peux rien faire de plus. Des pas se font entendre derrière moi. Je me retourne, pour voir quelqu'un apparaître de derrière un bâtiment. L'inconnu. Qui d'autre ? Dans ce cauchemar, c'est toujours un horrible désert. Je me lève, pendant que celui-ci s'approche de moi. Cette fois, aucune musique ne retentit. Pour le coup, cela me paraît bien moins rassurant. Je vois le garçon ralentir, et s'arrêter, avant de lever la tête en l'air. En me concentrant, je me rends compte que cette fois, son visage n'est pas flou, mais bien net. Ses cheveux châtains sont en bataille, comme s'il venait de courir et que le vent les avait emmêlés. Ses yeux bruns reflètent une inquiétude contagieuse. Sa peau mate en fait ressortir la couleur. Je l'observe se mordre la lèvre, d'un geste absolument adorable, mais pas rassurant du tout actuellement. Il a l'air vraiment paniqué.

C'est alors qu'il baisse la tête pour poser son regard sur moi. La lueur inquiète dans ses yeux ne l'a toujours pas quitté. Il se met alors à courir vers moi, et je ne bouge pas, incapable de savoir quoi faire. Qu'est-ce qui se passe, bon sang ? Je ne vais pas créer de nouveaux cauchemars à partir d'anciens, maintenant ? Le garçon m'attrape par les épaules et me fixe intensément. Toujours, cette inquiétude est présente en lui.

— Réveille-toi. Bon sang, il faut que tu te réveilles ! RÉVEILLE-TOI !


***

Je me redresse sur mon lit, haletante. J'avale de grandes goulées d'air, et mon cœur bat à cent à l'heure. Je ne me sens pas très bien, j'ai la tête qui tourne. Mes poumons me font mal. Comme si j'avais arrêté de respirer. Je pose une main sur mon torse, pour essayer de me calmer. Je suis complètement perdue. Qu'est-ce qu'il m'est arrivé ?

Je tourne la tête vers mon réveil, et je lève ma main pour la poser sur mon front. Bon sang, cette migraine ! Ce simple mouvement a réussi à la déclencher. Je regarde l'heure, même si je ne vois pas bien net. Étrange, j'ai toujours eu une bonne vision. Quatre heures douze. J'ai encore fait un cauchemar, visiblement. Je soupire. La douleur dans mes poumons se réveille à nouveau. Je grimace. Mais qu'est-ce qu'il m'est arrivé encore ?

Je m'adosse au mur pour essayer de me calmer et de rassembler mes esprits. Voyons voir, quel cauchemar ai-je fait ? L'image de la ville me revient. Ah, le pire, bien évidemment. J'essaye de calmer ma respiration en fermant les yeux. Inspiration, expiration douce. C'est douloureux mais je sens que cela me fait du bien. Reprenons. Les deux nuits précédentes, je voyais cet inconnu. Il faut que j'arrive à me souvenir de cette fois. Petit à petit, à force de me concentrer, certaines images me reviennent à l'esprit. Enfin, surtout la fin. Son visage, inquiet, si près, qui m'observe paniqué. "Réveille-toi !" J'ouvre grand les yeux. Pas de soucis, je suis bien réveillée. Je pose une main sur mon torse, là où mes poumons me font mal. Une théorie se dessine lentement. J'ai sûrement arrêté de respirer, pour une raison qui m'échappe totalement. Lui, il l'a remarqué. Je ne sais pas comment, mais toujours est-il qu'il le savait. Il m'a forcé à ouvrir les yeux, pour que j'évite de mourir asphyxiée. C'est possible de mourir comme ça ? Vu le rêve que je viens de faire, je pense que cela ne m'étonnerait pas. Les larmes me montent aux yeux. Cet inconnu vient de me sauver la vie. Fatiguée, affaiblie, je fonds en larmes.

***

— Il a quoi ?!

Tat' et Conan me regardent avec un air choqué. Nous sommes dans le bus, et je viens tout juste de leur raconter la nuit passée. Enfin, j'ai d'abord dû tout expliquer à Tat' car elle n'était pas au courant. Et comme elle aime épier les conversations, naturellement, elle est venue poser des questions... Si au début, elle avait l'air moqueuse, n'y croyant pas, elle est vite redevenue sérieuse quand Conan lui a expliqué mon malaise de l'autre jour. Et là, tous les deux m'observent avec un air ahuri. Mon meilleur ami est le premier à reprendre ses esprits. Il affiche un air solennel, et pose une main sur mon bras.

— Je ne sais pas qui est ce garçon, mais je lui dois toute ma reconnaissance. Sans lui, tu ne serais plus là. La vie serait devenue bien sombre.

Je ne dis rien. A son regard, je sens qu'il est plus que sérieux. Tat' approuve d'un hochement de tête. Là, ils ne prennent plus du tout l'histoire de cet inconnu à la légère. Mon amie sort alors un carnet ainsi qu'un crayon de bois. Je comprends qu'elle veut essayer de dessiner le garçon qui m'a sauvée. Je sens que cela va prendre un petit moment. Heureusement, elle est très douée en dessin. On devrait pouvoir obtenir quelque chose de réaliste, pour que Tat' et Conan puissent voir à quoi ressemble cet inconnu.

Nous commençons à avoir quelques esquisses un peu plus proches de la réalité, quand des éclats de voix se font entendre à l'avant du bus. Intriguée, je tourne la tête pour voir deux garçons en train de monter le ton face au conducteur. Ils veulent sûrement passer sans payer de ticket. J'échange un regard avec Tat', et celle-ci hoche la tête avant de poser son carnet. Nous nous levons pour aller voir ce qu'il se passe.

La suite se passe à une vitesse folle. Je ne sais pas comment c'est arrivé, toujours est-il que cela a dégénéré de manière surprenante. Le premier d'entre eux a envoyé son poing sur la figure de Tat', mais celle-ci a paré avant de riposter immédiatement. Réflexe de combat. Le deuxième, d'abord surpris, décide de m'attaquer pour que je ne puisse pas aider mon amie. Mauvais choix, les gars. Je finis par lui envoyer un coup de genou dans l'estomac qui lui coupe le souffle. A ce moment-là, le temps s'arrête, les deux attaquants nous regardent, choqués et apeurés, avant de fuir du bus. Le conducteur nous balbutie un remerciement, et redémarre lentement.

Nous rejoignons Conan qui nous regarde, surpris.

— Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Tat' soupire.

— Franchement, aucune idée.

Le Coeur en RythmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant