Chapitre 49 : grand départ et symptômes inquiétants

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Alors que j'entasse quelques vêtements dans un sac de voyage, j'entends un léger coup à la porte. En me retournant, j'aperçois la tête de Mia dans l'entrebâillement de celle-ci. D'un sourire, je lui fais signe d'entrer, ce que la jeune femme s'empresse de faire. Je continue ensuite à rassembler mes affaires pour ne pas finir en retard. J'entends des pas derrière moi, mais ne m'en soucie pas, jusqu'à ce que je finisse immobilisée, dans les bras de Mia. Elle serre tellement fort que j'en ai du mal à respirer. Je tente de prononcer son nom pour lui demander de me relâcher et aussitôt la pression diminue, pendant que la jeune femme enchaîne les excuses. Je me tourne vers elle, amusée.

— Qu'est-ce qui se passe ?

Aussitôt, Mia baisse les yeux au sol, gênée. Je croise mes bras, attendant qu'elle réponde.

— J'ai juste eu un élan de fierté, ça m'a pris d'un coup, je sais pas ce qu'il m'est arrivé.

Je fronce les sourcils, perturbée.

— Un élan de fierté ?

La jeune femme relève la tête et me fixe, le regard brillant. Sa réaction réussit juste à me troubler encore plus.

— J'ai vu ton combat avec ton amie. C'était incroyable ! Je ne savais pas que tu étais aussi douée. En fait...

Je penche la tête sur le côté, l'incitant à continuer. Elle soupire et détourne le regard avant de finir sa phrase.

— Je pensais que tu n'étais qu'une jeune fille un peu paumée que l'on devait protéger. Maintenant, je comprends que je me suis trompée sur toute la ligne. T'as pas besoin de gardes du corps, tu te débrouilles bien mieux que beaucoup ici.

Surprise par ces aveux, j'éclate de rire. Mia m'observe, les yeux ronds. Elle finit par froncer les sourcils et lever le menton.

— Je ne vois pas du tout ce qu'il y a de drôle !

Sa voix est partie légèrement dans les aigus, comme pour signifier sa vexation. Bien qu'elle ait tenté de prendre un ton hautain, sa réponse me fait penser à une actrice ayant un rôle de reine peu crédible. Il vaut mieux que je garde cette image pour moi. Non seulement elle est farfelue, mais en plus, la jeune femme risque de mal le prendre. Je retiens un pouffement et profite de mes bagages à faire pour me calmer. Mia me propose alors son aide, pour que je finisse à temps. Ravie, j'accepte avant même qu'elle finisse sa phrase.

Après quelques minutes de débat au sujet du climat au Tibet, nous nous décidons pour les vêtements les plus chauds possibles. Alors que je commence à sortir la grosse doudoune du placard, la jeune femme me stoppe et me tourne vers elle. Elle m'observe de haut en bas, esquisse un petit sourire satisfait et quitte aussitôt ma chambre. Je reste plantée là, le manteau dans les mains, ne sachant que faire. Il va falloir que je demande à Karin un mode d'emploi pour comprendre Mia.

Un instant plus tard, la jeune fille apparaît à nouveau dans l'encadrement de ma porte. Ses bras sont chargées de vêtements chauds menaçant de tomber et je m'empresse de venir à son secours. Nous posons le tout sur le lit puis Mia pose les poings sur les hanches, visiblement satisfaite. Je hausse un sourcil, attendant une explication.

— Ce sont mes vêtements. Je te les prête, vu que nous faisons à peu près les mêmes dimensions. Ils seront plus chauds et plus compacts que ceux que tu possèdes pour le moment.

Ravie, je la prends dans mes bras, sans qu'elle ne bouge, prise de court. Je me dégage rapidement pour finir d'empaqueter le nécessaire au voyage. A ce rythme, les autres vont m'attendre. Ce qui est une très mauvaise idée, sachant que Tat' fait partie du voyage... Je risquerais d'essuyer toute une série de reproches sur le risque d'être en retard. Même si ça serait surtout dû au fait que je l'ai forcée à patienter.

Une fois mon sac rempli, je le jette sur mon épaule et me tourne vers la porte. La jeune femme me fait alors une brève accolade, si rapide que je me demande si je ne l'ai pas rêvée. Elle esquisse un léger sourire avant de hocher de la tête.

— Reviens-nous saine et sauve, mais surtout avec les réponses à nos questions, d'accord ?

J'éclate une nouvelle fois de rire et la salue. Normalement, je devrais arriver tout pile à l'heure. Le rendez-vous a lieu juste à l'entrée du bâtiment. Lorsque j'arrive, je vois mon amie faire les cent pas tandis qu'Elliott soupire et secoue la tête, exaspéré. Il m'adresse un regard rapide avant de se tourner pour vérifier ses affaires. Je remarque alors que Naël n'est pas encore là. Je comprends mieux pourquoi Tat' est aussi impatiente. Il y a quelques minutes à peine, il manquait deux personnes.

J'en profite pour essayer de travailler sur le lien qui me relie au jeune homme. Difficilement, je fais abstraction des mouvements de mon amie, pour me concentrer sur mes sensations. Petit à petit, je parviens à distinguer les miennes et à les effacer, pour mieux discerner celles de Naël. Je ne peux m'empêcher de sourire en remarquant son stress et son agacement. Il a peur que ça tourne mal, qu'un imprévu arrive, qu'avoir Tat' nous accompagnant nous pose des problèmes... Ses émotions me submergeant de plus en plus, je remercie mon amie de d'agiter ainsi devant moi. Je reviens rapidement à la réalité, pose mon sac puis repars dans le sens inverse.

Lorsque j'entre dans la chambre du jeune homme, je le vois fouiller dans tous ses tiroirs en marmonnant quelque chose d'incompréhensible. Je m'adosse au mur près de la porte, amusée de le voir perdre ainsi ses moyens. J'en profite pour examiner la pièce. Elle est identique à celle dans laquelle j'ai dormi ces derniers temps, au détail près qu'il y a des affaires éparpillées partout. En cherchant à l'aveugle, il a tout envoyé valser dans la chambre. A distance, j'observe chaque vêtement en détail.

J'ai un léger rictus de victoire en repérant ce que Naël tente désespérément de trouver. Je m'avance vers son bureau et sors un foulard d'un tas de sweats posés sur sa chaise. Je lève mon bras portant le trophée et m'adresse alors au jeune homme.

— C'est ça que tu cherches ?

Celui-ci ne sursaute pas, ayant sûrement déjà senti ma présence. Il détourne la tête de son tiroir et se fige en voyant ce que je brandis. Aussitôt il se relève et attrape le vêtement que je tiens. Il me remercie d'un hochement de tête rapide, le précieux foulard dans son poing, posé contre son coeur. Pendant qu'il le range dans son sac avec toutes les précautions du monde, une idée soudaine me vient à l'esprit. D'une voix douce, je lui pose alors ma question.

— C'est ta soeur qui te l'a offert, c'est ça ?

Naël s'arrête et tourne la tête dans ma direction. L'inquiétude brille dans son regard. Je m'approche de lui pour poser une main sur son épaule.

— Je suis sûre qu'elle va bien. Ne t'en fais pas.

Sans répondre, il ferme son sac puis se redresse. Je comprends que ce n'est pas maintenant qu'il m'en parlera. En silence, nous rejoignons les deux autres. Tat' est dans une telle impatience qu'elle manque de se jeter sur nous en nous apercevant. Je tente de l'apaiser, mais c'est mon regard qui réussit à la calmer. Elle lance un coup d'oeil discret au jeune homme avant de m'observer à nouveau. Elle hoche ensuite rapidement de la tête, pour m'indiquer qu'elle comprend. C'est dans ces moments-là que je suis contente que mon amie me connaisse aussi bien.

Elliott prend alors les devants et ouvre le coffre de la voiture pour y mettre tous nos sacs. En dehors du scientifique, tout le monde voyage léger. Il faut dire que ce dernier a besoin de deux valises juste pour le matériel de sauvetage... Sans un mot, nous montons tous dans le véhicule, Naël au volant. Alors que nous démarrons, un violent mal de crâne me plie en deux. Tat', assise à l'arrière à côté de moi, se penche pour m'observer. Je tente de la rassurer mais vois bien que cela ne fonctionne pas très bien. La douleur disparaît alors aussitôt qu'elle est arrivée. Je me redresse, surprise. Serait-ce une avertissement que Mazko m'envoie ? A cette idée, un frisson de peur me parcourt. Naël me lance un regard à travers le rétroviseur, ayant sûrement senti mon émotion. Je lui fais un petit sourire, mais n'arrive même pas à me convaincre moi-même. J'espère que ce n'est pas le symptôme d'un nouveau coma.

Le Coeur en RythmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant