Chapitre 36 : colère et apaisement

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Alors que je fixe le mur avec un intérêt nouveau, la porte de ma chambre s'ouvre. Je ne me retourne pas, car je sais qu'il s'agit d'un repas. Lorsque la personne le pose brusquement, je fronce les sourcils. Je sens alors qu'on m'attrape d'un coup et je me retrouve face à Mia, visiblement énervée. Je hausse un sourcil, blasée. Un soucis avec ma vie d'ermite ? Elle pose les poings sur les hanches, et je peux voir ses yeux lancer des éclairs. Dommage, ce ne sont pas des vrais. Je me demande quel effet ça fait.

— Maintenant ça suffit ! Cela fait des jours que toi, t'es là, à rien faire à par te morfondre, et Naël passe sa vie sur un foutu ordi. Vous êtes censés être liés et vous êtes pas capable de parler ?! Vous vous rendez compte que vous souffrez tous les deux inutilement ?

Le silence s'installe, et j'observe la jeune fille. Naël. Il n'est pas venu me voir une seule fois. D'un seul coup, le poids de son absence m'écrase. Il me manque. Des larmes me montent aux yeux. Je veux le voir. Il faut qu'il vienne. Mia soupire et hoche la tête. Elle a compris. Alors, elle fait demi-tour, et moi je reste là, immobile, attendant que la porte s'ouvre à nouveau. J'ai besoin de son aide. Je ne sais pas pourquoi, mais j'en ai besoin.

Le temps passe. Les secondes deviennent des minutes, puis des heures. Toujours rien. Je baisse la tête, attristée. Je me remets en boule, observant à nouveau le mur. C'est toujours plus intéressant que d'attendre quelqu'un qui ne viendra pas. J'entends des petits pas déposer mon repas, et un petit mot d'excuse, prononcé tout bas. C'est Karin. Je ne sais pas pourquoi elle est désolée, mais je ne me pose pas plus de questions. Ce n'est pas important. La nuit finit par s'installer, et je m'endors, toujours dans la même position.

***

Le sol est froid et le vent souffle violemment. C'est ironique. On dirait la représentation de ma colère. Je ne demandais pas grand-chose, juste qu'il vienne. Quelques secondes, quelques minutes. Pas longtemps. Je voulais juste un soutien. Quelqu'un qui pouvait comprendre. Qui pouvait me comprendre. Je frappe avec rage dans une canette vide, qui roule sur le sol. Des pas se font alors entendre. Je me retourne. C'est une blague.

Naël avance lentement vers moi, et s'arrête à quelques mètres. Serrant les dents, je m'approche de lui. S'il croit qu'il va se faire pardonner comme ça...

— Tu te moques de moi, là !

— Maï...

Je le fusille du regard, le forçant à se taire. Il baisse la tête, le regard triste.

— Je ne te demande jamais rien, jamais ! Pour une fois que j'avais besoin de toi, je voulais juste que tu viennes ! Et toi, non. Tu préfères que j'attende avec un faux espoir, pour venir t'excuser comme un lâche en rêve ! Mais qu'est-ce que tu crois ? Que je vais te dire que ce n'est rien et que ce n'est pas grave, que je peux bien souffrir un peu plus, parce que je ne suis plus à ça près ?

— Maïwenn, arrête !

Le jeune homme m'attrape les bras et me secoue un peu, m'interdisant de bouger. Je le fusille du regard, mais il ne détourne pas le sien. Je vois des larmes perler au coin de ses yeux.

— J'avais peur, ok ? J'avais peur. Je viens de passer mes journées à chercher ce malade pour retrouver ta mère, parce que j'étais terrorisé de voir ta détresse. Je ne voulais pas que tu vives ce que j'ai vécu.

Je l'observe sans dire un mot. Puis, à bout de forces, j'éclate en sanglots. Naël relâche sa poigne et je me jette dans ses bras, pleurant toutes les larmes de mon corps. Je sens que lui aussi pleure, et nous restons ainsi quelques minutes, sans bouger. Comme deux naufragés voyant en l'autre une bouée de sauvetage. Peut-être que c'est ce que nous sommes l'un pour l'autre, finalement. Une échappatoire.

***

Je me réveille lentement et frotte mes yeux. Ah, super, je n'ai pas pleuré que dans mon sommeil, on dirait. Je me relève et m'assois en tailleur, avant de soupirer. Nous sommes encore au milieu de la nuit. Je décide alors de prendre une douche, histoire de me changer les idées. Cela me réveillera. En plus, je me suis pas mal négligée ces derniers temps, je pense que ma peau me remerciera. En me plaçant sous le jet d'eau, je ferme les yeux et laisse mes pensées partir avec le courant. J'ai une énorme facilité à me vider l'esprit de cette manière.

En sortant, je décide de me mettre en jogging, et d'aller dans la salle de sport. A cette heure-là, elle sera déserte. C'est parfait. Je me faufile dans le couloir, et trottine discrètement jusqu'au petit gymnase. Lorsque j'entre, celui-ci est baigné par la lumière de la lune et des étoiles. J'avance lentement jusqu'au centre, puis m'allonge au sol pour regarder le ciel. C'est pratique pour observer les astres sans avoir froid, tiens. Il faudra que je pense à revenir, une prochaine fois.

Je reste ainsi sans bouger quelques minutes, et vois une étoile filante passer. Aussitôt, je ferme les yeux pour faire un voeu. Je souhaite retrouver ma mère saine et sauve. En pensant aux avis de mon maître de taekwondo, je décide de me relever et de faire quelques exercices de respiration. Cela me forcera à bloquer mes pensées noires et me soulagera, ne serait-ce qu'un instant. Assise en tailleur, j'inspire avec le ventre, et me concentre sur les sensations de mon corps lorsque j'expire.

J'entends des bruits de pas derrière moi se rapprocher, mais ne réagit pas. Je préfère me concentrer sur l'air qui circule dans mes poumons. La présence s'assoit à côté de moi et ne dit plus rien. Petit à petit, je le sens se caler sur mon rythme. Je me retiens d'esquisser un sourire. Normalement on a tous une vitesse de respiration différente. Et pourtant, naturellement, il faut que Naël ou moi nous calions sur l'autre. J'ouvre les yeux et tourne la tête vers le jeune homme. Sentant mon regard, il pivote vers moi. En silence, chacun de nous fixe l'autre.

Je me rends alors compte d'une chose. Notre lien s'est encore renforcé. Je n'ai aucun contact physique avec lui, et pourtant je peux sentir son pouls. Identique au mien. En cet instant précis, nos coeurs battent en rythme. C'est comme si le temps se suspend et s'étire, et tout ce qui emplit l'espace sont ces battements. Et rien d'autre.

***

NDA

La vie n'est pas toujours rose dans les relations entre les personnes... Que pensez-vous de cet échange ? M'est d'avis que cela ne fera que renforcer le lien entre eux x) A demain pour la suite ~

Le Coeur en RythmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant