Après une petite pause dans ma nouvelle chambre, je décide de partir en exploration. Je n'ose pas entrer dans les autres pièces du couloir, devinant qu'il s'agit également de chambres. A la place, je retourne dans la salle commune et me faufile dans la cuisine. L'endroit est propre et plutôt grand. En fouillant dans les placards, je me rends compte qu'il y a tous les ustensiles possibles. Au détour d'un comptoir, j'aperçois alors une autre pièce, plus petite. C'est la réserve. Je dois sûrement avoir des étoiles dans les yeux en voyant tout ce qu'il y a. La diversité est juste incroyable. Si je dois vivre terrée ici, au moins je vais pouvoir faire plein de pâtisseries. Il faut bien que j'occupe mes journées.
Mais l'heure est avant tout à la découverte des lieux. J'ai tout le temps de faire des biscuits et des gâteaux plus tard. Je retourne dans la grande salle, et me rapproche de la scène. Les deux couloirs qui l'encadrent ressemblent à celui qui menaient à ma chambre. Ils doivent accéder au même type de pièces. Lorsque j'observe l'estrade, la nervosité me gagne. La dernière fois que j'ai dû monter sur l'une d'elles, j'étais complètement malade. Notre professeur de français avait décidé que nous allions réciter un extrait d'une pièce de théâtre dans la cour et avait installé le tout. J'étais en troisième. Résultat, j'ai commencé avec la nausée et le stress a juste accentué l'effet. J'ai failli repeindre les planches. Cet épisode m'a suivie pendant une semaine, après ça. Depuis, je ne suis pas très à l'aise quand je suis proche d'une scène.
Instinctivement, je sors mon cube. Il est devenu mon anti-stress avec le temps. Il va falloir que je trouve de quoi finir de remettre au bon endroit le dernier composant que j'ai déplacé. Je n'avais pas eu le temps de le faire hier, étant donné que le prof m'avait repérée. En y pensant, je me rappelle de la présentation rapide des salles que Naël m'a faite, à mon arrivée. Je me dirige vers le couloir par lequel je suis entrée la toute première fois dans la salle commune. J'hésite à visiter la partie que je n'ai pas pu voir à mon premier passage. La curiosité me démange mais je décide de reporter ça à plus tard. J'ai tout le temps de le faire, autant m'occuper de finir ma petite machine dès maintenant. Je réussis à retrouver l'entrée du labo et lève la tête au-dessus des portes. La lumière est éteinte. Ils ont sûrement fini leur expérience. Sans faire de bruit, je rentre dans la pièce.
L'endroit est bien plus grand que je ne le pensais. Une partie est dédiée au chimique, composée de microscopes, de bec bunsen et d'un tas de vaisselle qui va avec. Une autre est plus informatique, des ordinateurs s'alignant sur une grande table. Mais la dernière que j'aperçois est celle qui m'intéresse. La partie bricolage et mécanique. Je m'y dirige, cherchant une boîte à outils. Un tournevis et une vis, cela ne devrait pas être très compliqué à trouver, ici. Je remarque à ce moment-là une grande zone vide au fond de la pièce. Elle est sûrement prévue pour faire des essais de robotique. De grands tableaux ornent les murs, certains vides, d'autres remplis d'une écriture illisible. Je trouve alors ce que je cherche, posé sur une tablette sous une table. J'attrape l'outil, pose mon cube sur la table et finis de fixer le composant qui menaçait de partir. Voilà. Maintenant, je n'ai plus qu'à retenter ma chance. Sinon, je devrai essayer d'agencer encore différemment. Je sais que le programme fonctionne, c'est le plus important.
Trop concentrée sur ce que je fais, je n'entends pas les pas qui se rapprochent de moi. Je sursaute et me retourne en entendant une voix énervée s'élever derrière moi, mais appuie quand même sur le bouton marche de mon appareil.
— Qu'est-ce que tu fais i...
Elliott, le visage rouge, est visiblement furieux de voir que je me suis introduite dans le laboratoire. Je remarque alors qu'il regarde quelque chose dans mon dos, et tourne la tête. C'est mon cube. Et... il fonctionne ! Tout un tas de fumée sort du petit trou au milieu de la face supérieure. J'ai enfin réussi ! J'ai un sourire de victoire en voyant que tout se passe bien. Je vérifie rapidement qu'il ne surchauffe pas en passant une main dessous, mais suis ravie de constater que tout est normal.
— Je voulais finir de faire un mini appareil à fumée.
Je lève à nouveau la tête vers le scientifique, attendant une réaction. Celui-ci a la bouche grande ouverte, et a l'air complètement sous le choc. Je passe une main devant son visage pour qu'il retrouve ses esprits. Il lève alors son regard sur moi, des étoiles dans les yeux.
— T'as quel âge, déjà ?
Je mets quelques secondes à répondre, ne m'attendant pas à cette question.
— Euh, dix-huit...
— Et tu es déjà capable de créer ça ? Mais... mais c'est incroyable !
Je ne dis rien, complètement perturbée. L'homme blasé que j'ai rencontré un peu plus tôt a laissé place à quelqu'un de complètement euphorique, sautillant sur place de joie. Visiblement, pour découvrir la vraie personne qui se cache derrière son masque de déprimé, il suffit de parler technologie. C'est parfait, je vais pouvoir partager un de mes passe-temps avec quelqu'un. Que cela soit Elliott est simplement inattendu. Je le vois s'approcher du cube et m'interroger du regard. Je hoche la tête rapidement et il attrape l'objet d'une main délicate. Après l'avoir étudié minutieusement, l'homme pousse un sifflement admiratif.
— C'est sacrément bien construit en plus !
J'ai un sourire gêné. J'ai gardé ce projet-là plutôt secret, je n'avais pas prévu qu'on me complimente autant dessus. Elliott repose le cube sur la table et me fait signe de le suivre. Il se met alors à me présenter les différents endroits du laboratoire, tout content de le partager avec moi. Il me montre différentes astuces de rangement qu'il a inventées avec ses collègues pour garder le plus de matériel possible sans prendre trop de place. Là encore, je remarque à quel point ils sont créatifs. J'étais déjà admirative de la voiture que Mia conduisait, mais là je suis époustouflée. L'homme me montre alors ses dernières inventions. Je comprends qu'il travaille avant tout sur la protection des personnes. Un masque à gaz léger et discret, une tenue de protection aux températures extrêmes et un bâton dépliable résistant à des efforts de plusieurs tonnes.
— Quelle est la plus grande innovation que tu aimerais créer, jeune fille ?
Je pointe du doigt mon cube, pour lui montrer la taille maximale de l'objet que j'aimerais inventer. Ensuite, je lui explique en quelques phrases que j'aimerais en faire un projecteur holographique sur trois cent soixante degrés qui serve d'écran d'ordinateur. Comme ça, on a quelque chose de très grand, mais qui prend peu de place. Je sais que la technologie en question est très complexe et qu'il est encore compliqué de miniaturiser le tout. Aujourd'hui nous comprenons tout de même le fonctionnement de l'hologramme de mieux en mieux et je suis certaine que je peux réussir si j'étudie dans le domaine. Elliott me lance un grand sourire quand je termine mon explication.
— Tu as de l'ambition, c'est bien. Suis-moi, je vais te montrer ce sur quoi nous travaillons.
Pendant une heure, il me montre les différentes inventions en cours, et j'ai même l'occasion d'en tester certaines. Une ou deux fois, je propose une idée d'amélioration, et l'homme hoche la tête, les yeux pétillants. Il a l'air très enthousiasmé par ce que je dis. Si je peux passer du temps ici afin d'en apprendre plus et créer de nouvelles choses tous les jours, je sens que je vais rapidement me faire à ce changement de vie.
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Le Coeur en Rythme
FantastiqueCela fait officiellement six mois que je fais des cauchemars toutes les nuits. Pas de chance, mais plutôt banal, pensez-vous. Oui, mais les miens, ils prédisent des catastrophes qui arrivent réellement. Des accidents, des attaques, ce que vous voule...