La pénombre présente m'empêche de bien voir autour de moi. Il fait humide. Je frissonne. Je décide alors de m'asseoir, le temps de me repérer. Le sol est en pierre. On dirait que je suis de retour dans la grotte. Encore. Pour une fois, je suis presque contente d'être là. Au moins, ce n'est pas un nouveau cauchemar. Cela n'annonce pas une autre catastrophe. Et je sais à quoi m'attendre. Celui-là ne figure clairement pas dans les plus effrayants. Il s'arrête à temps. Je paniquerai quand même, je ne fais pas non plus la fière. Mais c'est une vision que je contrôle tout de même un minimum. D'un soupir, je m'allonge, les bras sous la tête pour me faire un oreiller.
Je repense alors à la première fois que j'ai rencontré Naël. C'était dans ce cauchemar-là. Je me rends compte que nous n'avons plus un seul rêve en commun depuis ce jour où il m'a annoncé qu'il partait. Malgré moi, je frissonne. Aurait-il réussi à couper les ponts d'une manière ou d'une autre ? Sa présence me rassurait et me donnait du courage pour les cauchemars à venir. Je ne sais d'ailleurs toujours pas pourquoi il voulait ne plus revenir. Il faudra que je pense à lui demander, à mon réveil.
Un grognement sourd me fait alors trembler d'effroi. J'ai beau connaître la situation par coeur, et avoir déjà vu pire, cela n'en reste pas moins effrayant. Je relève lentement la tête et aperçois une énorme silhouette se découper dans la pénombre. Je déglutis, et reste immobile. Non seulement parce que c'est conseillé quand on fait face à un énorme ours, mais également parce que je ne suis pas capable du moindre mouvement. La peur me paralyse. D'un pas sourd, l'animal approche. Ma respiration s'accélère et devient haletante. Je peux voir la lueur des yeux de l'ours briller. Lorsqu'il s'arrête près de moi, je ferme les yeux, tendue. Un filet de bave coule alors sur mon cou, et je retiens une grimace de dégoût. Ce n'est pas le moment de bouger. Vraiment. Pas. Le. Moment.
***
Je me relève en sursaut, le coeur battant la chamade. Je pose une main sur mon cou, mais pas de bave. Ce n'était qu'une simple cauchemar. Je ferme les yeux et me concentre sur ma respiration pour me calmer. Tout va bien. C'est juste une nuit habituelle. Pas de nouvelle vision, pas de prisonnier effrayant. Juste un mauvais rêve. Je ramène mes genoux contre ma poitrine et pose mon front dessus. Je viens de passer deux nuits sans dormir, pour une fois je voudrais me reposer.
J'entends alors quelqu'un toquer timidement. Je soupire et ferme les yeux un instant, pour être sûre d'avoir repris un minimum le contrôle sur moi-même. Puis, je me lève et pars ouvrir la porte. Je découvre sans surprise Naël, qui se tient debout, l'air gêné. Il passe une main dans ses cheveux et paraît chercher ses mots. Epuisée, je le laisse entrer. Je devine qu'il a senti ma panique. Inutile de développer. Le jeune homme m'adresse un petit sourire et fait un pas dans la chambre. Je ferme la porte et, au moment où je repartais me coucher, celui-ci m'attrape par le bras et me serre contre lui. Ma respiration se bloque et mon coeur bat à tout rompre. Je ne suis pas capable de réagir correctement dans cette situation. Je suis fatiguée, je viens de faire un cauchemar, et mon corps décide malgré tout de prendre le contrôle sur moi-même. Foutues hormones. Naël pouvait pas être moche, aussi ? Ça me simplifierait déjà un peu plus la vie. Je le connais à peine, là mon corps ne réagit qu'au physique.
Je retiens un soupir lorsque le jeune homme me lâche. Je ne vais pas le blesser alors qu'il voulait juste me réconforter. Cela partait d'une bonne intention. Mais j'ai toujours eu du mal avec les câlins. Pas sa faute. Je retourne à mon lit, le regard de Naël pesant sur moi. Je sais qu'il s'inquiète et qu'il observe chacun de mes mouvements pour voir si tout va bien. Avec un soupir, je lui fais signe d'approcher. Il pourra peut-être me faire confiance s'il voit que je peux me rendormir. Je suis trop fatiguée pour rester éveillée de toute façon. Le jeune homme s'assoit au bord du lit, et je me roule en boule, en lui tournant le dos. Bien vite, l'épuisement tombe sur moi et le sommeil m'emporte.
***
Je cligne des yeux et plisse les paupières face à la forte luminosité. Après quelques instants où je ne peux rien voir, éblouie, je commence à distinguer le paysage. Je comprends mieux pourquoi le soleil me gêne autant. Partout autour de moi, de la neige. Et sur ma droite, un pic de montagne. Tiens, je ne l'avais pas encore eu, ce décor. Je suis sûre qu'il y a peu, j'étais dans le noir. J'en conclus donc que je rêve. Par pitié, pas un autre cauchemar. J'en ai déjà eu un, merci bien. Apercevant des habitations en contrebas, je décide de les rejoindre pour comprendre où je me trouve. Au bout de quelques minutes de marche, je transpire à grosses gouttes. On a beau être en hiver à la montagne, il ne fait clairement pas froid.
Lorsque j'arrive près de quelques chalets, je peux voir des familles en tenues de ski bavarder gaiement en suivant un chemin. Je dois être à une station. C'est étrange, l'endroit me paraît familier. J'approche d'un chalet et jette un coup d'oeil à l'intérieur. Aussitôt, je souris. C'est celui que mes parents ont loué il y a deux ans. Nous étions partis à quatre, pendant une semaine, et avons passé des vacances de folie. Avec mon frère, nous avons inventé tous les petits pièges possibles avec de la neige. On a fini par devoir arrêter, car un passant a été une victime imprévue de nos bêtises.
Je marche le long du chalet, et observe autour de moi, les yeux brillants. Mon esprit me fait un sacré cadeau, aujourd'hui. Après deux nuits blanches, il a eu pitié, sûrement. Me rappelant le trajet jusqu'au début des pistes de ski, je suis la route, observant avidement les chalets. Il faudra que je demande si nous pouvons y retourner. Cet endroit fait partie de mes meilleurs souvenirs.
Alors que j'arrive près des pistes, un énorme craquement se fait entendre. Quelques murmures inquiets résonnent sur la terrasse d'un café, près de moi. Le serveur les rassure, un peu blasé. Néanmoins, il lève la tête vers la montagne et soupire. Le réchauffement climatique commence à leur causer de sérieux soucis de neige. J'ai un élan de compassion pour cet homme. C'est vrai qu'il fait très chaud pour la saison. Ils doivent avoir beaucoup moins de clients avec ces températures. Ce n'est pas pratique pour skier. J'ai remarqué en arrivant que la plupart des pistes étaient fermées.
A nouveau, un bruit sourd se fait entendre. Tout le monde tourne la tête vers la montagne. Alors, en amont, une ligne nette se dessine d'un seul coup sur la neige. Des exclamations de surprise résonnent en voyant cela. Même le serveur est inquiet. Il n'a jamais vu ça aussi près d'ici. Sans prévenir, l'énorme bloc de neige s'effondre, créant une vague blanche immense qui dévale la pente. Je plaque mes mains sur ma bouche pour retenir un cri. Mes yeux s'écarquillent. On dirait un tsunami. Et il fonce droit sur tout le monde, pas prêt de s'arrêter. Certaines pistes encore ouvertes se trouvent sur son passage. Cela va être une catastrophe. Du coin de l'oeil, j'aperçois le calendrier suspendu au chalet vendant les forfaits pour les pistes. C'est dans deux jours.
***
Je me relève brusquement, les yeux grands ouverts. Je ne suis pas paniquée, car je n'ai pas eu le temps de voir quel serait le bilan. Mais je suis sûre d'une chose, il sera très lourd. Une main se pose sur mon épaule et je sursaute, avant de tourner la tête. Je croise le regard inquiet de Naël. Je n'ai pas du dormir très longtemps s'il est encore là. Rapidement, je me lève du lit, pour ne pas avoir affaire à un autre câlin. J'ai déjà eu ma dose avec le précédent. Le jeune homme s'assoit au bord du lit et m'observe, d'un air interrogateur. Je lui demande alors s'il connaît la station de ski dont j'ai rêvé. Surpris, il hoche la tête.
— Oui, c'est à un peu plus d'une heure d'ici. Pourquoi ?
Je lui résume alors rapidement ma vision, et je vois son visage s'assombrir au fur et à mesure. Lorsque je termine, il se relève et m'emmène avec moi.
— Si c'est dans deux jours, alors on peut essayer d'éviter une catastrophe. Mais on n'a pas beaucoup de temps. Mieux vaut s'y mettre dès maintenant.
Je souris et hoche la tête. Aussitôt, je pars chercher Elliott, pendant que Naël s'occupe de réveiller Mia. Je vais avoir besoin de l'aide du scientifique pour que nous créions un rapport demandant l'évacuation de la station. C'est le seul moyen que nous avons à disposition pour être crédible.
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NDA
On retrouve à nouveau les rêves, avec cette fois non pas un, mais deux cauchemars ! Les capacités de Maïwenn et celles de l'équipe de Naël s'associent enfin... Voilà qui promet ! A demain pour la suite ~
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Le Coeur en Rythme
ParanormalCela fait officiellement six mois que je fais des cauchemars toutes les nuits. Pas de chance, mais plutôt banal, pensez-vous. Oui, mais les miens, ils prédisent des catastrophes qui arrivent réellement. Des accidents, des attaques, ce que vous voule...