Francesco sortit de la ville, et admira un peu les alentours. Sur sa gauche se trouvait le Nil, accompagné de palmiers, et devant lui, un peu plus loin, siégeait une grande pyramide devant d'autres plus petites. Et à leur pied, le général en chef, entouré de quelques chercheurs, penché sur une table, au milieu des papiers.
Le napolitain s'essuya rapidement le visage, que ses compagnons venaient d'asperger d'eau malgré lui, et remit quelques mèches trempées de ses cheveux en arrière. Derrière lui, il entendait la population rire et parler dans la ville dans un immense brouhaha. Et en face, le général en chef et son entourage plus silencieux que jamais. Il était vraiment entre deux mondes.
Il observa davantage le général en chef, jusqu'à le fixer presque intensément. Cet air sérieux... il ne pouvait pas s'en détacher... sans qu'il ne s'en revde compte, son cœur rata un battement dans sa poitrine. Il devait être intelligent, finalement, cet homme, et pas si inconscient et égoïste qu'il ne le pensait. Il aurait aimé voir un peu ce sur quoi il travaillait...
Il fut frappé par un élément qui jurait totalement avec la scène : le général Junot, assis un peu plus loin, en train de faire il-ne-savait quoi dans le sable. Une sorte de tas de sable. Dans lequel un homme, un chercheur sans doute, frappa sans le faire exprès et sembla s'excuser. Il vit Junot se lever aussitôt, les larmes aux yeux, et parler avec une voix forte au général en chef qui fut sorti de son monde. Francesco aurait aimé entendre ce qu'ils se disaient, pour comprendre la claque qui suivit et les pleurs redoublés du blond qui fit demi-tour en larmes.
Il serra les dents. De quel droit faisait-il pleurer le général Junot qu'il admirait tant??!! Il se dit qu'il souhaiterait bien lui foutre une baffe en retour, à cet imbécile de général en chef, pour avoir osé en donner une à Junot.
Par réflexe, Francesco s'approcha encore, jusqu'à ce que Junot le remarque.
- Hey, toi! Viens ici!
Il lui obéit, pour le moins surpris.
- Regarde, j'ai refait ma pyramide de sable! Qu'en penses-tu? Trouves-tu qu'elle ressemble aux vraies?
Le napolitain paru confus. Les soldats et les généraux ne se parlaient pas avec autant de familiarité...
- Euh... o... oui.. perfetta... parfaite...!
- Tant mieux!! On l'a détruite, mais... je l'ai reconstruite en vitesse!
Francesco cligna des yeux. C'était ça qui commandait les troupes...? Mais il était plus attendri et amusé qu'autre chose. Il le contempla à sa tâche. Andreas avait raison, c'est vrai qu'il était beau... Sa bonne humeur s'effaça lorsqu'il repensa à ce qu'il avait vu quelques minutes auparavant.
- Mon général... puis-je me permettre... de vous demander pourquoi le général en chef a levé la main sur vous il y a un instant de cela...?
- Hmf... ce n'est qu'un idiot qui ne comprend rien!
- Il vous a donné une claque sans raison, vous auriez dû la lui rendre!
Il avait parlé sans réfléchir.
Les yeux de Junot s'humidifièrent. Il ne fallu pas attendre longtemps pour le torrent de larmes.
Francesco sursauta, choqué et alerté.
- Mon... Mon général, pardon, je ne voulais pas...!!
Junot n'y fit pas attention et se releva pour courir plus loin. Le napolitain resta bête.
Il fit finalement demi-tour, toujours sonné par ce qu'il venait de voir. Un peu plus loin, Napoléon avait relevé les yeux de ses feuilles et observait ce soldat d'un air médisant. Il avait parlé à Junot... et il l'avait fait pleurer...
De son côté, Francesco était retourné au cœur de la ville, et s'assit à même le sol devant Sébastien dès qu'il le vit.
- Sébastien... Si tu savais ce que je viens de voir...
Le gersois était en train de dévorer une sorte de galette, qui ressemblait à du pain, en plus dur.
- Quoi donc? Rien ne me surprend plus dans cette belle contrée.
- Le général Junot a fait des châteaux de sables. Enfin une pyramide... Est-ce un homme ou un enfant? Il est fascinant... Et cet abruti de général en chef l'a frappé! Un jour, je lui metterai ma lame sous la gorge!
- Es-tu sûr que ce n'était pas un mirage? Et arrête de te concentrer sur ces abrutis de généraux et occupe-toi de toi-même... nous sommes en Égypte et toi tu observes un homme jouer avec du sable! C'est toi l'idiot, dans cette affaire.
Vexé. Francesco afficha un air boudeur.
- Et puis qu'est-ce, cette haine que tu as contre le général en chef? Reprit Sébastien. Il ne t'a rien fait, que je sache.
Il n'eut qu'un grognement comme réponse.
Son compagnon roula des yeux.
- Et puis s'il t'énerve tant, tu n'as qu'à le frapper toi-même...
- Si tu crois que je vais m'en priver!! Cracha-t-il en se relevant.
Il était prêt à aller lui régler son compte, quand un autre de ses compagnons se présenta devant lui.
- Francesco! J'ai trouvé un puits où j'ai pu remplir entièrement nos gourdes!
Gabriel... ses cheveux blond platine et son visage enfantin, alors qu'il était pourtant plus âgé qu'eux, lui faisaient penser à un ange. Un ange qui leur apportait l'eau divine.
- Merci... et cette fois, Sébastien, tu ne me l'envoies pas au visage!
- C'était pour te rafraîchir...
- Eh bien c'est fait, et je n'en ai plus besoin.
- Allez, assieds-toi, Francesco. Tu iras casser la gueule à Bonaparte un autre jour. Profite du repos qu'il t'est donné, plutôt...
- D'ailleurs, où est Alexandre? Demanda Gabriel.
- Je ne sais pas, quelque part dans la ville avec Valentin et Andreas. Je crois qu'ils sont allés à la recherche d'eau, eux aussi.
- Bon, au moins nous n'en manquerons pas. Tout va bien, Francesco?
Celui-ci était contre un mur, le visage rouge.
- Non, j'ai chaud. Je cuis comme une pizza dans un four.
- Je me demande quel goût ça a, une pizza...
- Je t'en ferai une. Quand j'aurai les ingrédients. Et un four. Dios mio, que cette chaleur est insupportable...! C'est encore pire quand on ne bouge pas...
Le napolitain ferma les yeux. La chaleur ne tarda pas à le faire plonger dans un profond sommeil.
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Folie rime avec irréfléchi
Исторические романыUn soldat qui rêve de voyages, un général qui devient l'amant d'un futur empereur, et tant d'autres encore, toutes les histoires méritent d'être racontées. Sous la Révolution, le Consulat et l'Empire, guerres et amours s'entrecroisent, tout comme le...