Chapitre [81]

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Junot se tordit de douleur dans son lit. Il ne savait pas depuis combien de temps il était alité, des semaines sans doute, mais cela lui semblait une éternité. Depuis ce duel, son torse était en feu, et il ne se passait pas un jour sans qu'il ne bouge trop et que la plaie ne se rouvre. Il sentit une fièvre s'emparer de lui. Il voulait partir... rejoindre son général...

Lorsqu'il entendit la porte s'ouvrir, son regard se remplit d'espoir. Mais ce fut la désillusion totale lorsqu'il vit Murat s'approcher de lui.

- ...Ce n'est que toi.

- Quel enthousiasme.

- Je m'attendais à voir quelqu'un d'autre, cracha-t-il sèchement.

Murat laissa échapper un soupir.

- Je sais très bien qui tu t'attendais à voir. Malheureusement, il ne viendra pas de sitôt.

- Plaît-il?

Le général s'avança vers son lit, et fixa le sol un instant, prenant une grande inspiration.

- Le général en chef va rentrer en France, Junot, et je vais le rejoindre ce soir. Nous partons demain matin, avant l'aube.

- Mais... et moi?! Je ne viens pas?!

Junot avait retenu trois mots. Rentrer. France. Partir. Et lui dans tout ça?! Quel lâche!!

- Tu n'es pas encore assez guéri pour faire le voyage.

Murat prit une chaise et s'assit à ses côtés, avant de prendre une boîte en bois sur la table de nuit, de l'ouvrir et d'en sortir du matériel médical. Quelques bandages, un mouchoir épais et une petite gourde d'eau.

- ....Tue-moi.

- Pardon?

- Je veux que tu me tues. Mon général m'abandonne... et je suis totalement inutile... je veux que l'on me tue.

- Je ne vais pas te tuer, Junot. Je vais même te soigner. On va nettoyer un peu ta plaie.

Il reposa la boîte et lui déboutonna sa chemise, avant de lui enlever son bandage teinté de rouge. Puis il prit la gourde et en déversa quelques gouttes de son contenu sur le mouchoir.

- Hmf!! Pourquoi est-ce toi qui t'y attèle?

- Je voulais seulement vérifier si ton état s'était amélioré. Et converser un peu avec toi.

Junot ne répondit rien, il se contenta de froncer les sourcils. Il grimaça au contact de l'eau sur sa plaie.

- J'ai mal...!!

- Je sais... cela va passer.

Le bourguignon évita de le regarder, et tourna la tête vers le mur.

- Pourquoi... critiques-tu autant le général en chef?!

Encore ce sujet... Murat haussa les épaules. Il humidifia à nouveau le mouchoir.

- J'ai mon propre avis sur certaines questions, voilà tout.

- C'est lui qui a toujours raison! Et nous devons suivre ses directives!

- Nous n'avons guère le choix, en effet, mais je n'approuve pas tout.

Il continua d'appliquer son mouchoir imbibé d'eau sur la future cicatrice, que Junot ne semblait plus sentir. Il l'observa davantage.

- Tu as de la chance, ta blessure est étendue, mais peu profonde. Une fois complètement guérie, elle ne se verra peut-être plus.

- Peu importe.

Junot se fichait bien de combien de cicatrices décoraient son corps. Tant qu'il plaisait encore à son général. Son général... son Napoleone... il retint une larme, et déglutit en silence.

Folie rime avec irréfléchiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant