Dans l'humide prison où ne passait que peu de lumière, Napoleone était assis contre un mur de pierre. Il se remémorait sans cesse les souvenirs de son arrestation.
La porte s'était ouverte en grand.
- Citoyen Buonaparte?
Ce dernier, plongé dans un livre, regarda les soldats un air interrogateur.
- Euh... oui? C'est bien moi...
Il n'eut pas le temps d'en dire d'avantage que l'un des trois hommes le prit brutalement par le bras.
- Citoyen Buonaparte, Vous êtes en état d'arrestation pour crime contre la République.
- Comment?! Mais... qu'ai-je fait?!!
- Vous avez côtoyé le jeune frère de Robespierre. Cela suffit déjà amplement pour vous suspecter.
- Nous étions seulement amis! Et encore! Je-
- Emmenez-le.
- Attendez! Pouvez-vous m'accordez... une minute encore...? Je vous promets qu'ensuite, vous pourrez m'emmener là où vous voulez.
L'un des soldats soupira. Il était de bonne humeur aujourd'hui. Il lâcha l'emprise qu'il avait sur son bras.
- Une minute. Pas plus.
- Merci, merci...
Napoleone se précipita sur le bureau, et n'eut le temps d'écrire que quelques mots avant qu'on vienne ne le tirer jusqu'au dehors.
Il n'avait pas peur de ce qui pourrait s'ensuivre. Il n'avait pas peur de mourir ni de la guillotine. Non, la raison pour laquelle il ne voulait pas mourir, c'est car il avait encore tant de rêves et de projets à réaliser. l'Égypte... les découvertes qu'il pourrait y faire... le contrôle politique de la France... que deviendra-t-elle...? Et il ne pourra jamais revoir la Corse et sa famille s'il mourait dans les jours à venir... oui, c'était davantage de regrets que de peur dont son cœur était rempli. Et Junot... il aura bien pris soin de lui. Il devra lui en être reconnaissant. Peut-être que de là-haut, il pourra veiller sur lui pour l'en remercier.
Ce n'était pas la première fois qu'il pensait à la mort. De loin même. Qu'il avait tenté de se la donner... les souvenirs de sa presque-noyade, lors de son adolescence, lui revinrent douloureusement en mémoire. Non... il ne devait pas penser à cette période... penser au présent, à l'avenir... en avait-il seulement un, d'avenir? Ou bien était-il sous la lame tranchante du bois de justice? Il se demanda s'il l'on y souffrait. Le coup était sec, rapide. L'on n'avait sans doute pas le temps d'en ressentir la douleur.
Dehors, la population s'agitait. Il ne pouvait pas la voir, mais la petite et haute fenêtre qui laissait entrer en même temps que le peu de lumière, le brouhaha de la foule d'au-dehors, l'accompagnait dans sa nouvelle solitude et atténuait son impression d'isolement.
Certes, il n'était pas seul, mais il n'avait aucune envie d'engager la conversation avec ce vieil homme à moitié ivre assis dans un coin sombre, cette femme pleurant à chaudes larmes en gémissant un nom incompréhensible entre deux sanglots ou cet homme étendu au sol dont il ne savait s'il dormait où s'il était mort de faim.
Il ferma les yeux. Il s'imagina la chaude mer Méditerranée avec ses navires à l'horizon, les ruelles ensoleillées d'Ajaccio, comme il se les était tant de fois représentés lors de son adolescence. Sa famille... il était bien trop las pour pleurer. À la place, il soupira longuement. Il avait toujours su qu'il était un piètre Buonaparte...
Les vagues et les étendues vertes de son enfance à l'esprit, il finit par s'endormir lentement.
~ ☘ ~
Junot frappa son poing sur la table.
- Nous devons aller le délivrer.
Marmont le regardait en haussant un sourcil, l'air de dire que c'était du suicide.
Quant à Muiron, qui était comme eux un fidèle ami de leur général depuis Toulon, il arborait une expression d'inquiétude et tremblait presque de la nouvelle qu'il venait d'apprendre.
- Sommes-nous des soldats oui ou non??!!
- Pour ma part, je n'ai pas demandé à entrer dans l'armée et le diplôme des Beaux-Arts que je prépare m'est bien plus important que la guerre, affirma Marmont.
- Et moi, je... la blessure que j'ai reçue à la cuisse, à Toulon... n'est pas encore correctement guérie...
- Depuis plus d'une année et demie?! Tu marches très bien pourtant!! Qu'est-ce donc que ces soldats couards qui ne sont même pas capable d'aller se battre pour le chef??!! Je pourrais me prendre mille balles à la tête et un million de lames de baïonnette au cœur et je me relèverais sans attendre pour l'honneur de mon général!!!
- Junot... mon bon ami, calme-toi...
- Me calmer?! L'HOMME AUQUEL JE TIENS LE PLUS AU MONDE M'A ÉTÉ ENLEVÉ, MOISIT ACTUELLEMENT DANS LA CELLULE D'UNE PRISON ET POURRAIT SE FAIRE GUILLOTINER DEMAIN!!!
L'auberge dans laquelle ils se trouvaient avait beau être bruyante, le haussement de ton du bourguignon ne passa pas inaperçu et plus d'un se retournèrent vers lui.
- Junot... du calme... mon Junot...
Ce dernier ce rassit et mit sa tête entre ses bras pour étouffer ses sanglots. Son ami d'enfance lui caressa longuement les cheveux.
- Il souffre... oui, il doit tellement souffrir!!! Je ne peux pas rester ici à rien faire...!! Oh, comme je m'en veux, si j'avais été avec lui lors de son arrestation au lieu d'aller acheter ce bête pain, j'aurais égorgé ces soldats avant qu'ils ne puissent le toucher!!
- Tu n'y peux rien, mon Junot. Et ce plan que tu as élaboré pour que l'on le fasse s'échapper... c'est bien trop fou, nous ne réussirons pas.
- Il faut tenter le tout pour le tout!!
- Sais-tu quoi? Envoie-lui un billet, discrètement, par la fenêtre de sa cellule par exemple, où tu lui expliqueras tes plans, et tu attendras sa réponse.
- Et comment vais-je savoir laquelle est, justement, sa cellule?!
- Eh bien tu crieras comme tu sais si bien le faire à toutes les fenêtres de la prison du Temple jusqu'à entendre sa voix te répondre, et tu le trouveras.
- Bon... d'accord... je... je vais suivre ton conseil...
- Ressaisis-toi, Junot. Souris... je te promets que tout cela va s'arranger. Il s'en sortira.
- Promis...?
- Mais oui, promis.
Marmont afficha un petit sourire. Mais au fond, même lui n'y croyait pas.
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Folie rime avec irréfléchi
Historical FictionUn soldat qui rêve de voyages, un général qui devient l'amant d'un futur empereur, et tant d'autres encore, toutes les histoires méritent d'être racontées. Sous la Révolution, le Consulat et l'Empire, guerres et amours s'entrecroisent, tout comme le...