- Hozen, j'écoute.
- Bonjour, mademoiselle, excusez-moi de vous déranger, nous avons eut une panne de serveur. Je n'ai pas le document à envoyer demain matin à notre client numéro...
- Demain matin ? Prends de quoi noter.
- Oui, j'ai.
- C'est le numéro cinq quatre deux neuf huit quatre zéro huit deux trois. Tu l'as ?
- Oui. Parfait. Je suis dans le dossier. Il est vide.
- D'accord. Je stocke tout en double dans un dossier externe à la boite pour éviter ce genre de problème. Tu vas appeler le numéro que je vais t'envoyer, d'ici une dizaine de minutes. Je ne peux pas le gérer, il faut que tu te débrouille. Je l'appelle, tu t'en charge.
- Bien, mademoiselle.
- A bientôt.
Elle raccroche et change de numéro.
- C'est moi. Tu m'en dois toujours une. C'est le moment.
- Ça fait plaisir d'avoir de tes nouvelles. Je m'en occupe tout de suite. Raconte.
- Mon assistante va t'appeler. Fais tout ce qu'elle te demande pour ouvrir le dossier HEC quatre deux neuf huit quatre zéro huit deux trois. Seulement ce dossier. Et seulement le sous-dossier A.
- D'ac.
Elle raccroche, et se passe une main sur le visage. Hope ne veut pas savoir pourquoi son assistante s'occupe de ça maintenant. Ni pourquoi ça ne marche pas. Elle ne veut pas non-plus être dérangée, ou devoir se préoccuper de quelque chose qui est sensé fonctionner. Mais dans tous les cas, ce fichier doit être envoyé à l'un de leurs nouveaux fournisseurs. On ne passe pas à côté d'un contrat à trois cent millions d'euros pour un simple plantage de serveur.
- Tout va bien ?
Elle se retourne.
- Tout le monde est vivant, désolée, c'était urgent. Et nous sommes en retard pour le déjeuner.
- Ne t'en fais pas. Nous sommes tous en retard.
Elle regarde la grand-mère, la nièce et la première fiancée avant de croiser le regard du père.
- Je ne sais pas si j'ai mal fait, si ça n'aurait pas dû m'arriver, ou si je les ais surpris. Dans tous les cas. On me regarde. Et je n'aime pas ça.
Ils passent à table. A croire qu'ils ne font que manger et dormir depuis qu'ils sont ici.
- Ton entreprise ne sait pas se gérer toute seule ?
Hope ne dit rien, le nez dans sa salade, pour changer.
- En tout cas, je pensais que vous gériez mieux vos affaires.
Les remarques fusent, mais à la grande surprise de Seijuro, Hope décide de se taire.
Le pire, c'est qu'elle ne prend pas sur elle. Elle n'en n'a pas besoin.
Elle sait ce que c'est de se faire traiter d'incapable, ou d'autres choses du genre. Ce que les gens qui lui disent ne comprennent pas, c'est que ça ne la fâche pas, au contraire. Ça la fait rire. Sourire. Parce qu'à chaque fois dans sa vie qu'on lui a dit qu'elle n'y arriverait pas, elle a réussit. A chaque fois qu'on lui a dit quoi que ce soit, elle s'est débrouillée pour prouver le contraire.
C'est puéril, elle le sait. Mais d'un autre côté, elle peut aller aussi haut qu'elle le veut avec ce raisonnement.
- Mon pauvre, tu aurais mieux fait de m'épouser, au moins nous aurions eu de la conversation.
Le regard de Seijuro n'a jamais été aussi froid. L'atmosphère même de la pièce a changé et la presque pas fiancée ne se prive pas de frissonner.
Pendant ce temps, Hope se redresse pour tremper ses lèvres dans son verre d'eau. Et la grand-mère boue. En fait, la grand-mère explose.
- Elle n'a pas de dignité pour ne pas répondre ?! s'insurge la vieille femme. Elle se permet d'intervenir dans nos affaires de gestions de la maison, ne respecte pas son conjoint, se moque ouvertement de nous...
L'autre plie sa salade tranquillement et répond avec calme :
- Elle s'appelle Hope, Madame. Et elle a justement trop de dignité pour vous dire ce qu'elle pense. Je ne voudrais pas offusquer.
Elle a décidé de relever. Mieux vaut que ce soit elle que Seijuro, de son point de vue.
Elle se redresse, et remonte ses manches, comme elle sait si bien le faire.
- Je ne sais pas quoi vous dire exactement, madame. Mais si je vous laisse vous moquer, ou m'insulter comme vous le faites depuis hier, je ne vous permettrais pas d'insinuer que je vaux moins que vous. Parce que c'est loin d'être le cas. Excusez-moi madame, si je ne « monte pas à cheval », ou si je ne « vais pas à la plage ». J'ai tout simplement autre chose à faire, et je vous avouerais que ce n'est pas pour me déplaire. Vous vouliez avoir ce genre de conversation à table ?
Les deux femmes se toisent.
- Je vois, dit la vieille femme au bout d'un moment. Vous êtes ce genre de personne. Seijuro...
- Laissez-le tranquille un peu, répond-elle sèchement. C'est entre vous et moi qu'il y a un problème. Et nous allons le résoudre.
Le silence autour de la table semble avoir figé le temps. Personne ne mange, tout le monde écoute. Et au milieu de ça, on ne sait pas si on doit apporter les plats suivants ou non.
- Vous lui ressemblez beaucoup.
La grand-mère se lève.
- Peut-être même trop.
- Et si vous vous trompiez. Et si j'étais la seule de nous deux. Vous ne vous êtes jamais posé la question, n'est-ce pas ? La perfection vous en empêche. Réfléchissez-y tout de même.
- Ne me donnez pas d'ordre, jeune fille.
Hope sourit franchement, debout, elle aussi.
- Tiens, ça vient de là, ça.
L'autre la regarde, stupéfaite.
- En tous cas, vous n'avez pas à quitter votre table, madame.
Elle s'incline doucement.
- Je vous prie de m'excuser pour la gêne occasionnée. Je mangerais plus tard pour ne déranger personne.
Hope sort de la pièce, le pas léger.
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La Plume Et L'Archet
FanfictionQuand il la rencontre pour la première fois, il ne se doute pas de l'impact qu'elle aura sur sa vie. La perfection est un critère de taille, quand on vient de l'illustre famille Akashi, si bien qu'il ne s'en formalise plus vraiment. Mais étouffant p...