La Plume Et L'Archet

Chapitre 36

Elle hésite à lui faire remarquer qu'il semble au fond du trou, bien que pour le moment, s'il y a bien quelque chose au fond de quelque chose, c'est son nez dans le fond de son verre.

- Tu as raison, dit-il au bout d'un moment. On travaillé sur nos techniques pour obtenir un jeu passable, sans se souvenir de ce qu'est vraiment une équipe. Je crois que même Kuroko ne s'en était pas aperçu.

- Tu crois ?

- Oui.

Ils se regardent un long instant, jusqu'à ce qu'il détourne les yeux. Seijuro fini par froncer les sourcils et se lever pour regarder son étagère de livres.

- Tu as tous les livres de Kenichiro Azumane ?

- Oui.

- Il y en a même qui ne sont pas sortis.

Elle sourit doucement, se lève, en saisit un et lui montre :

- Celui-ci sort dans sept mois. La couverture est sympa, non ? Mais honnêtement, ce n'est pas celle que je préfère...

Il ne l'écoute plus. Il la fixe. Son sourire, les gestes de ses mains, l'étincelle dans ses yeux...

- Tu savais que c'était mon auteur préféré ?

Hope se fige, le regarde, secoue doucement la tête et murmure faiblement :

- Non...

- Si j'avais su que c'était toi... je les aurais amenés pour que tu me les signes.

- Ne dis pas n'importe quoi...

- Par contre, j'ai du mal avec la fin du dernier, « Histoire des étoiles ».

Seijuro observe longuement l'ouvrage, gêné.

- Pardon. Tu ne les as pas rangés par date de parution, je ne sais plus où je l'ai pris. En tout cas, ton évolution stylistique est incroyable. Ça n'a rien à voir avec les textes que tu dictais quand nous nous sommes rencontrés. Je ne saurais pas dire lequel je préfère, par contre.

- Tu... tu es sérieux ?

- Tu crois que j'ai l'habitude de dire ce que je ne pense pas aux personnes de mon entourage ? J'ai beau être un Akashi, je sais être honnête.

- Comment tu as su que c'était moi ?

- Tu es... tellement belle... passionnée. Quand tu lis ton travail, quand tu le dicte, quand tu en parle. C'est ... incroyable, tu es impressionnante... C'est toujours la même étoile qui brille dans tes yeux. Je suis sûr de ne jamais avoir vu ça dans les miens.

- Pourtant, ils brillent, là, maintenant. Ton visage s'allume comme un sapin de noël quand... tu es avec moi ? tu es content.

- Je ne suis pas franchement content, là.

- Ah. Alors tu es quoi ?

- Je suis bien. Je suis déçut et inquiet. Mais je suis... tranquille. Au calme. A l'aise. Comme si j'étais planqué dans un coffre fort.

- Tu te sens protégé de l'extérieur.

- C'est ça.

Elle secoue la tête.

- C'est drôle, parce que j'ai une sensation similaire ces derniers temps.

- Ah oui ?

Hope repose les livres et caresse la tranche de l'un d'eux avant de laisser sa main retomber doucement.

- J'ai peur, répond-elle.

Il se tourne vers elle, surprit.

- Mais tu viens de dire que...

- J'ai peur que cette sécurité s'en aille.

- Moi aussi. J'aimerais avoir la certitude que tu reste avec moi. Je crois qu'on se dit la même chose, mais que comme on se le dit à demi-mots, j'en doute, et toi aussi. Je peux te poser une question ?

- Je t'écoute, soupire-t-elle.

- Ta sécurité, c'est quelqu'un ?