Chapitre 73

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Paul fit ses lacets, et se regarda dans le miroir. Il ferma le bouton de sa chemise, et ajouta le pull qui était sur son lit. Il courut vers le salon, et regarda son père qui lui mettait ses chaussures.

- Moi aussi, je peux avoir des chaussures comme toi ? demanda-t-il.

- Pourquoi ?

- Bah, je les aime bien, et je veux les mêmes.

- D'accord mon Paulo, répondit Fred en souriant.

- On part bientôt ?

- Très bientôt.

- Papy, il a dit, que si on veut aller manger au restaurant avant d'aller au spectacle, on devait partir maintenant.

- Et où est papy ?

- Avec Ada dans la chambre.

- Va les chercher, on va partir.

Paul hocha la tête, et courut vers la chambre de sa sœur. Il revint vers son père cinq minutes plus tard, suivi de Jacques et Ada. Fred avait déjà mis son manteau, et tendait celui de Paul. Le petit garçon le remercia et le mit. Ils quittèrent l'appartement pour rejoindre ce lieu que tous redoutaient de visiter chaque semaine. Fred gara la voiture et prit la main de Paul, une fois celui-ci sortit. Il suivit Jacques et Ada qui étaient un peu plus devant.

- C'est quoi le spectacle qu'on va voir après ? demanda Paul en regardant son père.

- On va au théâtre, mon chéri.

- Mais c'est un spectacle quand même ?

- Un peu oui, répondit-il en souriant.

Fred s'arrêta une fois arriver devant la tombe de sa fille. Jacques posa un bouquet de lys dessus. Paul comme à son habitude, s'avança, embrassa sa main et la posa pour dire bonjour à sa sœur. Il s'agenouilla et commença à raconter sa semaine à Elena, comme il le faisait à chaque fois. Ada et Fred l'écoutaient et ne disaient rien. Ada avait sa main dans celle de son grand-père. Paul se replaça aux côtés de son père, et le laissa s'avancer pour saluer sa fille et lui dire qu'elle lui manquait. Ada puis Jacques dirent quelques mots à Elena aussi.

Jacques jeta un coup d'œil à Fred qui lui fit un signe de tête. La famille se décala de quelques pas pour se mettre face à une seconde tombe. Paul prit le bouquet de roses que son père lui tendait, et le posa. Il s'avança et fit le même geste qu'il avait fait quelques minutes plus tôt. Jacques se baissa à son tour, posa sa main et laissa quelques larmes couler sur ses joues. Paul s'avança vers son grand-père, et le prit dans ses bras pour le réconforter. Le petit garçon pleura lui aussi. Ada prit place à côté de Jacques, et posa une rose blanche sur la tombe. Jacques et les enfants restèrent un moment comme cela pendant que Fred était en retrait. Ils finirent par se lever après un long moment. Jacques fit un signe de tête à son gendre, et prit les mains de ses petits-enfants. Paul se tourna, et regarda une dernière fois la tombe.

- On t'aime et tu nous manques, dit-il tristement.

Après un dernier regard, ils quittèrent l'allée puis le cimetière laissant Fred seul face à la tombe. Il souffla et s'avança. Il s'agenouilla avant de prendre place sur les cailloux. Il essuya les larmes sur ses joues. Il attendit un moment avant d'ouvrir son manteau, et de sortir une enveloppe de sa poche intérieure.

- Un an, dit-il doucement. Un an et je n'ai toujours pas réussi à l'ouvrir. Je n'ai pas encore trouvé le courage, avoua-t-il en baissant la tête. La première fois que je l'ai eu dans mes mains, le jour où tu es morte, murmura-t-il. Je pensais que j'allais me précipiter pour lire les derniers mots que tu avais pour moi, pour nous, mais avais-je vraiment envie de les connaître. Tous les jours, l'envie de savoir est là, mais le courage n'y est pas. Il essuya de nouvelles larmes. Tu me manques Alice, chuchota-t-il. Si tu voulais que je ressente, ce que tu as ressenti quand on a perdu Elena. Laisse-moi te dire que tu as réussi. Je suis brisé, comme tu as pu l'être, dit-il alors que de nouvelles larmes remplissaient ses yeux.

Destins brisésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant