Chapitre soixante et un

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Yann faisait les 100 pas comme un lion en cage, il savait qu'Eva était quelque part en mer entre Brest et le sud des Amériques... Il était sorti de l'open space et s'était mis à tirer sur l'un de ces cohiba, la fumée emplissait ces poumons et lui donnait de l'oxygène alors qu'il semblait étouffer... Contrairement à ces habitudes, il enchainait la prise de ce tabac rare pour calmer ces nerfs.

Dans un fracas de bois clinquant, Verdier claqua la porte de son bureau et remonta le couloir en direction de Yann.

- Interdit de fumer ici Yann, on est plus dans notre grenier, tu vas faire sonner les alarmes !

- T'as des nouvelles pour le bateau ?

- Oui, j'ai réussi à décider les supérieurs, Faure est inquiet alors on joue sur des œufs là Yann ! On nous donne la possibilité d'y aller avec la maritime !

- Alors Go !

- Attends Yann, bordel, part pas comme ça, faut qu'on soit raccord sur les méthodes ! Là on est regardé de très haut, on est limite ! On est dans les eaux internationales, on frôle l'incident diplomatique, surtout après votre balade au Mexique !

- Ok boss, on se réunit dans l'open space et tu nous brief, je fermerai ma gueule pour une fois, promis, t'auras tous les regards sur toi !

Yann retrouvait ces sarcasmes, ce qui n'était pas mauvais signe. Lui et les autres se mirent en cercle autour de Verdier, pour une fois personne ne semblait enclin à plaisanter, l'heure était à l'écoute et on se concentrait déjà sur ce qui allait suivre. Verdier pris une grande inspiration et prise la parole.

- Bon, on a une ouverture, le proc veut bien nous accorder une chance, une seule et c'est bien parce qu'on lui met la pression au-dessus qu'il nous laisse cette opportunité, que ça soit clair on en aura pas d'autre ! Si on se plante, c'est toute l'affaire qui nous file entre les doigts et je ne parle pas de notre crédibilité tout simplement.

- OK boss, on comprend et on va se la jouer serrée, pas de vagues les gars compris ? Yann lança un regard à ces compagnons de route en prononçant ces mots.

- C'est clair ! Bon, on sait où se trouve le navire qui est parti de Brest, il s'agit du Seawise, une poubelle flottante, on va y aller sous ce prétexte, contrôle de cargaison pour cause de pavillon de complaisance, ça nous laisse la possibilité d'y aller en hélico, équipe serrée, pas plus de 10 mecs, nous compris... Vu le genre de lascars qui pourraient se trouver à bord, autant vous dire qu'il va falloir y aller doucement...

Verdier continuât dans ses explications, il présentât un plan sommaire du bâtiment que les gars de la maritime leur avaient fourni, le monstre d'acier était un vrai labyrinthe, ils allaient devoir suivre sans broncher les spécialistes du domaine et ne pas se la jouer cowboy ! Le plan d'intervention était simple, le temps était compté, ils allaient devoir embarquer à 4 du SRPJ accompagné par 6 officiers de la maritime et un pilote, il embarquerait dans un Super Puma de la marine nationale, le genre de gros bébé qui se pose pas facilement par gros temps sur un bateau... Fort heureusement le temps était plus que clément !

- Heure H moins deux les gars, Gabin, Krim, Max et...

- N'y pense même pas Henri, ne me laisse pas sur la touche... Yann avait appelé Verdier par son prénom, loin de ses habitudes mais il n'avait pas l'intention de rester là, à regarder les autres aller à la castagne...

- OK Yann, c'est bon, tu y vas aussi, mais s'il te plait, tu restes derrière les autres, tu restes à ta place, ta gros à jouer et tu le sais !

- OK boss, t'as ma parole.

Les hommes se turent, ils partirent prendre un café et les quatre élus se regardèrent un long moment, ils n'avaient pas le droit à l'erreur et ils savaient que la cible était liée à Yann, pas question de laisser quoi que ce soit lui arriver.

Yann se préparait dans le vestiaire, pas de costume cette fois, il enfila une tenue destinée au maintien de l'ordre, entièrement noir, rangers aux pieds, il enfila un pare-balles, « POLICE » inscrit en gros sur le dos, il vérifia son arme, pas de place à l'improvisation, sur ce genre d'intervention il disposerait d'un SIG 9mm et d'un fusil mitrailleur, un HK G36, le genre d'engin qui sort 750 coups par minute, de quoi rivaliser avec les armes que ces malfrats avaient utilisés contre ces gendarmes à Narbonne...

Une fois en tenue, les quatre hommes se retrouvèrent ensemble, ils se suivirent dans les interminables couloirs du 36 pour arriver au sous-sol, ils montèrent tous les trois dans la voiture de Yann, qu'un APJ avait dû aller récupérer à l'aéroport dans la matinée. Casques lourds sur la tête et cagoules, ils semblaient sortis d'un film de gangsters.

La BMW sortit en trombe du sous-sol et prit la direction de l'héliport d'Issy les Moulineaux. Les hommes ne parlèrent pas, ils étaient concentrés et pensaient déjà à l'intervention. La route était dégagée en cette saison estivale, le bitume était brulant et les hommes vêtus en tenues lourdes souffraient sous leurs casques. Ils passèrent devant la ville d'Issy les Moulineaux, une ville posée sur la Seine avec autant de verdure que de béton. Ils suivirent ensuite une route serrée pour arriver sur le site. Là-bas ils rejoignirent un pilote de la marine nationale venu les chercher pour l'intervention.

L'oiseau d'acier ronronnait sur le tarmac du site plus habitué à voir des engins de tailles plus modestes, les quatre hommes montèrent dans la machine et le pilote de la marine nationale fit gronder les deux turbines du Super Puma, les plus de 2000 cv se firent entendre par le bruit strident caractéristique des hélicoptères et les près de 5 tonnes d'acier s'élevèrent sans mal dans un panache de poussière soulevée au passage du monstre.

L'engin fila à plus de 260 km/h pour rejoindre Brest et ainsi récupérer les officiers de la maritime déjà sur place. Les quatre hommes purent enfin discuter par leurs casques-radio pendant le temps de vol, ils se préparaient à la mission, ils avaient en main les plans du Seawise, le navire était monstrueux, impossible de faire une recherche approfondie, ils allaient devoir faire parler l'équipage pour trouver l'objectif tout en ne prenant pas le risque de créer un incident en plein océan, ils allaient devoir jouer serrer.

Les minutes passèrent et en à peine deux heures ils arrivèrent près de la base maritime de Brest, l'Arsenal. Le Super Puma EC 225 se posa au sol, les machines soufflaient à plein régime, six hommes en tenues noires estampillées également Police arrivèrent au pas de course vers l'hélicoptère, ils montèrent, armés également de fusils mitrailleurs de même catégorie que ceux de Yann et ces collègues. Les hommes se saluèrent brièvement, chacun connaissait la situation et le but réel de leur mission, l'escouade était désormais au complet, dix hommes, pas un de plus...

Pas de répits pour cette équipe, le Super Puma refit gronder ces turbines au-dessus des pistes de la base Brestoise, les dix hommes, lourdement armé filaient désormais vers leur objectif, le super tanker Seawise Giant, restait désormais à savoir ce qu'ils y trouveraient.

Les disparus de la RadeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant